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Lundi dans l’Octave de la Fête-Dieu (avant 1955)

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

En 1955, le Décret de simplification des rubriques a supprimé l’Octave de la Fête-Dieu. Depuis, au bréviaire, l’Office est réduit à la lecture de l’Écriture occurrente (ancien premier nocturne des Matines), la psalmodie est celle du jour de la semaine et non plus celle du Jour de la Fête.

Nous donnons ici l’Office des Matines avec les deux lectures patristiques propres à chaque jour, et les commentaires habituels.

On trouvera une introduction à l’Octave au Vendredi, et les commentaires généraux sur le jour même de la Fête ici.

Textes de la Messe

Pendant tous les jours de l’Octave, sauf le Dimanche, la Messe est dite comme au jour de la Fête

Office

L’Office est celui de la Fête, sauf les lectures des Matines.

A MATINES

Invitatorium Invitatoire
Christum Regem adorémus dominántem Géntibus : * Qui se manducántibus dat spíritus pinguédinem. Adorons le Christ-Roi, dominateur des nations : * Qui donne à ceux qui le mangent l’abondance de son esprit.
Psaume 94 (Invitatoire)
Hymnus Hymne [1]
Sacris solémniis iuncta sint gáudia,
Et ex præcórdiis sonent præcónia ;
Recédant vétera, nova sint ómnia,
Corda, voces, et ópera.
Qu’à ces solennités sacrées se joignent nos joies,
que du fond des cœurs résonne les louanges ;
loin de nous la vétusté, que tout soit nouveau,
les cœurs, les voix et les œuvres.
Noctis recólitur cœna novíssima,
Qua Christus créditur agnum et ázyma
Dedísse frátribus, iuxta legítima
Priscis indúlta pátribus.
Nous célébrons la mémoire de la dernière cène,
de cette nuit où nous savons que le Christ
partagea aux frères l’agneau et les azymes,
selon les rites légaux donnée à leurs pères [2].
Post agnum týpicum, explétis épulis,
Corpus Domínicum datum discípulis,
Sic totum ómnibus, quod totum síngulis,
Eius fatémur mánibus.
Après l’agneau figuratif, le repas terminé,
le corps du Seigneur fut donné aux disciples
tout entier à tous, tout entier à chacun,
par ses mains : c’est notre foi.
Dedit fragílibus córporis férculum,
Dedit et trístibus sánguinis póculum,
Dicens : Accípite quod trado vásculum ;
Omnes ex eo bíbite.
Aux faibles, il donna son corps en aliment,
aux tristes, il donna son sang en boisson,
disant : Prenez la coupe que je livre ;
buvez-en tous.
Sic sacrifícium istud instítuit,
Cuius offícium commítti vóluit
Solis presbýteris, quibus sic cóngruit,
Ut sumant, et dent céteris.
C’est ainsi qu’il institua ce sacrifice
dont il a voulu que le ministère
fût confié aux seuls prêtres : à eux il appartient
de s’en nourrir et d’en donner aux autres.
Panis Angélicus fit panis hóminum ;
Dat panis cǽlicus figúris términum ;
O res mirábilis : mandúcat Dóminum
Pauper servus et húmilis.
Le pain des Anges devient le pain des hommes ;
le pain du ciel met fin aux figures ;
o prodige admirable : il mange son Seigneur,
le pauvre, l’esclave, le tout petit.
Te, trina Déitas únaque, póscimus ;
Sic nos tu vísita, sicut te cólimus :
Per tuas sémitas duc nos quo téndimus,
Ad lucem quam inhábitas.
Amen.
O Dieu unique et Trine, nous vous le demandons ;
visitez-nous en ce jour où nous vous honorons ;
et, par vos sentiers [3], conduisez-nous au but auquel nous tendons,
vers la lumière que vous habitez !
Amen.
In I NocturnoAu 1er Nocturne
Ant. 1 Fructum salutíferum * gustándum dedit Dóminus mortis suæ témpore.Ant. 1 C’est un fruit apportant le salut * que le Seigneur nous a donné à savourer au temps de sa mort [4].
Psaume 1
Ant. 2 A fructu fruménti * et vini multiplicáti fidéles in pace Christi requiéscunt.Ant. 2 Multipliés par l’abondance du froment * et du vin, les fidèles se reposent dans la paix du Christ [5].
Psaume 4
Ant. 3 Communióne cálicis, * quo Deus ipse súmitur, non vitulórum sánguine, congregávit nos Dóminus.Ant. 3 C’est par la communion au calice * où l’on se nourrit de Dieu lui-même et non par le sang des taureaux, que le Seigneur nous a rassemblés [6].
Psaume 15
V/. Panem cæli dedit eis, allelúia.V/. Il leur a donné le pain du ciel [7], alléluia.
R/. Panem Angelórum manducávit homo, allelúia.R/. L’homme a mangé le pain des Anges, alléluia.
Lectio i1ère leçon
De libro primo Regum.Du premier Livre des Rois.
Cap. 5, 1-5.
Philísthiim autem tulérunt arcam Dei et asportavérunt eam a Lápide adiutórii in Azótum. Tulerúntque Philísthiim arcam Dei et intulérunt eam in templum Dagon et statuérunt eam iuxta Dagon. Cumque surrexíssent dilúculo Azótii áltera die, ecce Dagon iacébat pronus in terra ante arcam Dómini ; et tulérunt Dagon et restituérunt eum in locum suum. Rursúmque mane die áltera consurgéntes invenérunt Dagon iacéntem super fáciem suam in terra coram arca Dómini ; caput autem Dagon et duæ palmæ mánuum eius abscíssæ erant super limen ; porro Dagon solus truncus remánserat in loco suo.Or, les Philistins prirent l’arche de Dieu et la transportèrent de la pierre du Secours à Azot. Ainsi les Philistins prirent l’arche de Dieu, et ils la portèrent dans le temple de Dagon, et la placèrent auprès de Dagon. Et lorsque les Azotiens se furent levés le lendemain au point du jour, voilà que Dagon gisait renversé contre terre devant l’arche du Seigneur ; et ils prirent Dagon et le rétablirent à sa place. Et de nouveau se levant au matin le jour suivant, ils trouvèrent Dagon gisant sur sa face contre terre, devant l’arche du Seigneur ; mais la tête de Dagon et les deux paumes de ses mains coupées étaient sur le seuil de la porte, et le tronc seul de Dagon était demeuré à sa place.
R/. Immolábit hædum multitúdo filiórum Israël ad vésperam Paschæ : * Et edent carnes et ázymos panes.R/. La multitude des enfants d’Israël immolera un chevreau au soir delà Pâque [8] : * Et ils en mangeront les chairs avec des pains azymes.
V/. Pascha nostrum immolátus est Christus : ítaque epulémur in ázymis sinceritátis et veritátis.V/. Notre agneau pascal, le Christ, a été immolé : mangeons-le avec les azymes de la sincérité et de la vérité [9].
* Et edent carnes et ázymos panes. * Et ils en mangeront les chairs avec des pains azymes.
Lectio ii2e leçon
Cap. 5, 6-8.
Aggraváta est autem manus Dómini super Azótios, et demolítus est eos. Et ebulliérunt villæ et agri in médio regiónis illíus, et nati sunt mures, et facta est confúsio mortis magnæ in civitáte. Vidéntes autem viri Azótii huiuscémodi plagam dixérunt : Non máneat arca Dei Israël apud nos, quóniam dura est manus eius super nos et super Dagon deum nostrum. Et mitténtes congregavérunt omnes sátrapas Philisthinórum ad se et dixérunt : Quid faciémus de arca Dei Israël ? Responderúntque Gethǽi : Circumducátur arca Dei Israël.Or, la main du Seigneur s’appesantit sur les Azotiens, et il les désola. Et les villages et les champs au milieu de cette contrée fourmillèrent de rats qui naquirent, et la confusion causée par une grande mortalité régna dans la ville. Cependant les hommes d’Azot, voyant une plaie de cette sorte, dirent : Que l’arche du Dieu d’Israël ne demeure pas chez nous, parce que sa main pèse sur nous et sur Dagon notre Dieu. Et ils envoyèrent chercher, et rassemblèrent tous les satrapes des Philistins auprès d’eux, et dirent : Que ferons-nous de l’arche du Dieu d’Israël ? Et les Géthéens répondirent : que l’arche du Dieu d’Israël soit conduite autour du pays.
R/. Comedétis carnes, et saturabímini pánibus : * Iste est panis, quem dedit vobis Dóminus ad vescéndum.R/. Vous mangerez de la chair, et vous serez rassasiés de pain [10] : * Voici le pain que le Seigneur vous a donné à manger.
V/. Non Móyses dedit vobis panem de cælo, sed Pater meus dat vobis panem de cælo verum.V/. Moïse ne vous a point donné le pain du ciel, mais c’est mon Père qui vous donne le vrai pain du ciel [11].
* Iste est panis, quem dedit vobis Dóminus ad vescéndum. * Voici le pain que le Seigneur vous a donné à manger.
Lectio iii3e leçon
Cap. 5, 8-12.
Et circumduxérunt arcam Dei Israël. Illis autem circumducéntibus eam, fiébat manus Dómini per síngulas civitátes interfectiónis magnæ nimis ; et percutiébat viros uniuscuiúsque urbis a parvo usque ad maiórem. Misérunt ergo arcam Dei in Accaron. Cumque venísset arca Dei in Accaron, exclamavérunt Accaronítæ dicéntes : Adduxérunt ad nos arcam Dei Israël, ut interfíciat nos et pópulum nostrum. Misérunt ítaque et congregavérunt omnes sátrapas. Philisthinórum, qui dixérunt : Dimíttite arcam Dei Israël, et revertátur in locum suum et non interfíciat nos cum pópulo nostro. Fiébat enim pavor mortis in síngulis úrbibus et gravíssima valde manus Dei.Et ils conduisirent l’arche du Dieu d’Israël autour du pays. Or, eux la conduisant ainsi, la main du Seigneur faisait dans chaque cité un très grand carnage, et il frappait les hommes de chacune de ces villes, depuis le plus petit jusqu’au plus grand. Ils envoyèrent donc l’arche de Dieu à Accaron. Et lorsque l’arche de Dieu fut venue à Accaron, les Accaronites s’écrièrent, disant : Ils nous ont amené l’arche du Dieu d’Israël, pour qu’elle nous tue, nous et notre peuple. C’est pourquoi ils envoyèrent chercher et rassemblèrent tous les satrapes des Philistins, qui dirent : Renvoyez l’arche du Dieu d’Israël, et qu’elle retourne en son lieu, et qu’elle ne nous tue pas avec notre peuple. Car la frayeur de la mort se répandait dans chaque ville, et la main de Dieu devenait extrêmement pesante.
R/. Respéxit Elías ad caput suum subcinerícium panem : qui surgens comédit et bibit : * Et ambulávit in fortitúdine cibi illíus usque ad montem Dei.R/. Élie vit auprès de sa tête un pain cuit sous la cendre : se levant, il mangea et but [12] : * Et il marcha dans la force de cette nourriture jusqu’à la montagne de Dieu.
V/. Si quis manducáverit ex hoc pane, vivet in ætérnum.V/. Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement [13].
* Et ambulávit in fortitúdine cibi illíus usque ad montem Dei. Glória Patri. * Et ambulávit in fortitúdine cibi illíus usque ad montem Dei.* Et il marcha dans la force de cette nourriture jusqu’à la montagne de Dieu. Gloire au Père. * Et il marcha dans la force de cette nourriture jusqu’à la montagne de Dieu.
In II NocturnoAu 2nd Nocturne
Ant. 4 Memor sit Dóminus * sacrifícii nostri : et holocáustum nostrum pingue fiat.Ant. 4 Que le Seigneur se souvienne * de notre sacrifice, et que notre holocauste lui soit agréable [14].
Psaume 19
Ant. 5 Parátur * nobis mensa Dómini advérsus omnes, qui tríbulant nos.Ant. 5 Elle est dressée * pour nous, la table du Seigneur, contre tous ceux qui nous persécutent [15].
Psaume 22
Ant. 6 In voce exsultatiónis * résonent epulántes in mensa Dómini.Ant. 6 Que des accents d’allégresse * retentissent parmi les convives, à la table du Seigneur [16].
Psaume 41
V/. Cibávit illos ex ádipe fruménti, allelúia.V/. Il les a nourris de la fleur du froment [17], alléluia.
R/. Et de petra, melle saturávit eos, allelúia.R/. Et pour les rassasier, il a fait sortir le miel de la pierre [18], alléluia.
Lectio iv4e leçon
De Sermóne sancti Ioánnis Chrysóstomi.Du Sermon de saint Jean Chrysostome.
Eadem Homilia 60
Unicuíque fidélium Christus semetípsum per mystéria commíscet, et quos génuit, per semetípsum enútrit, nec álteri tradit ; per hoc tibi rursum persuádens, quod carnem tuam assúmpsit. Ne torpeámus ígitur tanta digni caritáte et honóre putáti. Nonne vidétis quanta promptitúdine párvuli papíllas cápiunt, et quanto ímpetu lábia ubéribus infígunt ? Accedámus cum tanta nos quoque alacritáte ad hanc mensam et ad úbera póculi spiritális : quinímmo cum longe maióri trahámus, tamquam infántes lacténtes, spíritus grátiam : et unus sit nobis dolor hac esca privári. Non sunt humánæ virtútis ópera, hæc quæ proponúntur : qui tunc ipsa fecit in illa cœna, idem ea nunc quoque facit. Nos ministrórum tenémus locum ; qui vero sanctíficat ea et immútat, ipse est. Nullus ítaque Iudas assístat, nullus avárus ; nam tales mensa non súscipit. Si quis est discípulus, adsit ; ait enim : Cum discípulis meis fácio Pascha. Hæc est illa mensa, et minus nihil habet. Non enim illam quidem Christus, hanc autem homo pérficit ; verum et hanc ipse quoque.Le Christ s’unit par ces mystères à chacun des fidèles ; ceux auxquels il a donné la vie, il les nourrit par lui-même ; il ne se repose pas de ce soin sur autrui ; vous convainquant ainsi de nouveau qu’il a pris notre chair. Ne nous laissons donc pas aller à la torpeur, après avoir été jugés dignes de tant de charité et d’honneur. N’avez-vous pas vu avec quel empressement les petits enfants se jettent au sein de leurs mères, et avec quelle avidité ils appliquent leurs lèvres à leurs mamelles ? Approchons-nous avec la même diligence de cette table sainte, de ces mamelles où nous puisons un breuvage spirituel ; que dis-je ? Plus avides encore que des enfants qui sucent le lait, aspirons la grâce de l’Esprit-Saint ; et que notre seule douleur soit d’être privés de cette nourriture céleste. Ce que nous avons sous les yeux n’est pas l’œuvre de la puissance humaine ; celui qui opéra autrefois ces merveilles dans la cène, est le même qui les opère encore maintenant. Nous ne sommes que ses ministres ; c’est lui qui sanctifie, c’est lui qui transforme. Qu’il n’y ait donc pas ici de Judas, ni d’avare ; car cette table n’admet pas ceux qui sont tels. Si quelqu’un est disciple de Jésus-Christ, que celui-là s’approche ; il a dit en effet : Je veux faire la Pâque avec mes disciples. Ce banquet est le même que celui de la dernière cène, il n’a rien de moins. L’un n’a pas été dû au Christ et l’autre à un homme, mais celui-ci pareillement est l’œuvre du Christ.
R/. Cœnántibus illis, accépit Iesus panem, et benedíxit, ac fregit, dedítque discípulis suis, et ait : * Accípite et comédite : hoc est corpus meum.R/. Pendant qu’ils soupaient, Jésus prit du pain, le bénit, le rompit, et le donna à ses disciples, disant [19] : * Prenez et mangez : ceci est mon corps.
V/. Dixérunt viri tabernáculi mei : Quis det de cárnibus eius, ut saturémur ?V/. Les hommes qui demeurent sous ma tente ont dit : Qui nous donnera de nous rassasier de sa chair [20] ?
* Accípite et comédite : hoc est corpus meum. * Prenez et mangez : ceci est mon corps.
Lectio v5e leçon
Inhumánus accédat nemo, nemo crudélis et immiséricors, nemo prorsus immúndus. Hæc ad communicántes dico, et ad vos, ministrántes. Nam et ad vos sermónem convértere necessárium est, ut multo cum stúdio hæc dona distribuátis. Non parva vobis ímminet últio, si quemquam, illíus culpæ cónscii, huius mensæ partícipem esse concedátis : sanguis eius de mánibus vestris exquirétur. Sive quis dux milítiæ sit, sive præféctus, sive princeps diadémate coronátus, indígne autem accédat, próhibe : maiórem illo potestátem habes. Proptérea vos Deus hoc insignívit honóre, ut tália discernátis. Hoc vestra dígnitas est, hoc secúritas, hoc omnis coróna ; non ut albam et splendéntem túnicam circumeátis indúti. Verum et tu, láice, cum sacerdótem víderis offeréntem, ne ut sacerdótem esse putes hoc faciéntem, sed Christi manum invisibíliter exténsam.Que personne ne s’approche avec des sentiments inhumains, personne de cruel et d’impitoyable, personne d’impur. En parlant ainsi, je m’adresse à vous qui recevez les saints mystères, et à vous qui les dispensez. Vous aussi, vous avez besoin d’entendre de telles instructions, afin que vous distribuiez ces dons avec autant de discernement que de zèle. Ce n’est pas un léger supplice qui vous menace, si vous permettez à une âme coupable de participer à ce banquet. Il vous sera demandé compte du sang du Christ. Serait-ce un chef d’armée, un puissant magistrat, un prince couronné du diadème, interdisez-lui l’accès de cette table, s’il s’en approche indignement : vous avez une autorité supérieure à la sienne. C’est pour que vous exerciez un tel discernement que Dieu vous a honorés du sacerdoce. En cela consiste votre dignité, en cela votre sécurité, en cela toute votre couronne ; et non à entourer l’autel revêtus de la tunique éclatante de blancheur. Quant à toi, laïque, lorsque tu vois le prêtre offrant le sacrifice, ne pense pas que ce soit le Prêtre qui fait cette action ; mais vois à l’autel la main du Christ, invisiblement étendue.
R/. Accépit Iesus cálicem, postquam cœnávit, dicens : Hic calix novum testaméntum est in meo sánguine : * Hoc fácite in meam commemoratiónem.R/. Jésus prit le calice après avoir soupe, disant : Ce calice est la nouvelle alliance en mon sang [21] : * Faites ceci en mémoire de moi.
V/. Memória memor ero, et tabéscet in me ánima mea.V/. J’en conserverai toujours la mémoire, et mon âme sera comme défaillante d’amour à ce souvenir [22].
* Hoc fácite in meam commemoratiónem. * Faites ceci en mémoire de moi.
Lectio vi6e leçon
Audiámus ígitur, et sacerdótes et súbditi, quali esca facti sumus digni : audiámus et horreámus. Sanctis cárnibus suis nos dedit impléri, semetípsum appósuit immolátum. Quænam ígitur erit nobis excusátio, cum tálibus pasti tália peccémus, cum lupi fiámus Agnum comedéntes, cum tamquam oves pasti more leónum diripiámus ? Hoc enim mystérium non a rapína tantum, verum et ab omni vel ténui inimicítia purum esse pénitus iubet ; est enim pacis mystérium. Iudǽis quidem annuátim propriórum monuménta beneficiórum solemnitátes Deus alligávit ; tibi vero síngulis diébus per hæc mystéria. Nullus ítaque Iudas hanc mensam petat, nullus Simon. Hi namque duo propter avarítiam periérunt : hoc ígitur bárathrum fugiámus.Écoutons encore une fois, nous Prêtres, et vous qui leur êtes soumis, de quel aliment nous avons été rendus dignes ; écoutons et tremblons. Il nous fait la grâce de nous nourrir de sa chair sacrée ; il se livre lui-même à nous, immolé. Quelle sera donc notre excuse si nous commettons de si grands péchés, après avoir été rassasiés d’une telle nourriture ; si nous devenons des loups, après avoir mangé l’Agneau ; si, nourris comme des brebis par notre pasteur, nous déchirons comme des lions ? Car ce mystère demande qu’on évite non seulement le vol, mais aussi toute inimitié, même la plus légère, puisque c’est un mystère de paix. Dieu ordonna aux Juifs de célébrer des fêtes chaque année en reconnaissance de ses bienfaits ; à vous, Chrétiens, de le recevoir chaque jour, au moyen de ces mystères. Que nul Judas, nul Simon ne s’approche de cette table ; l’avarice les a perdus l’un et l’autre, détournons-nous de cet abîme.
R/. Ego sum panis vitæ ; patres vestri manducavérunt manna in desérto, et mórtui sunt [23] : * Hic est panis de cælo descéndens, ut, si quis ex ipso mandúcet, non moriátur.R/. Je suis le pain de vie ; vos pères ont mangé la manne dans le désert et sont morts : * C’est ici le pain qui descend du ciel, afin que celui qui le mange ne meure pas.
V/. Ego sum panis vivus, qui de cælo descéndi : si quis manducáverit ex hoc pane, vivet in ætérnum.V/. Je suis le pain vivant, qui suis descendu du ciel, si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement.
* Hic est panis de cælo descéndens, ut, si quis ex ipso mandúcet, non moriátur. Glória Patri. * Hic est panis de cælo descéndens, ut, si quis ex ipso mandúcet, non moriátur.* C’est ici le pain qui descend du ciel, afin que celui qui le mange ne meure pas. Gloire au Père. * C’est ici le pain qui descend du ciel, afin que celui qui le mange ne meure pas.
In III NocturnoAu 2nd Nocturne
Ant. 7 Introíbo * ad altáre Dei : sumam Christum, qui rénovat iuventútem meam.Ant. 7 Je viendrai * à l’autel de Dieu, je recevrai le Christ qui renouvelle ma jeunesse [24].
Psaume 42
Ant. 8 Cibávit nos Dóminus * ex ádipe fruménti : et de petra, melle saturávit nos.Ant. 8 Le Seigneur nous a nourris * de la fleur du froment, et pour nous rassasier il a fait sortir le miel de la pierre [25].
Psaume 80
Ant. 9 Ex altári tuo, * Dómine, Christum súmimus : in quem cor et caro nostra exsúltant.Ant. 9 A votre autel, * Seigneur, nous recevons le Christ, en qui exultent notre cœur et notre chair [26].
Psaume 83
V/. Edúcas panem de terra, allelúia [27].V/. Faites sortir le pain de la terre, alléluia.
R/. Et vinum lætíficet cor hóminis, allelúia.R/. Et que le vin réjouisse le cœur de l’homme, alléluia.
Lectio vii7e leçon
Léctio sancti Evangélii secundum Ioánnem.Lecture du saint Évangile selon saint Jean.
Cap. 6, 56-59.
In illo témpore : Dixit Iesus turbis Iudæórum : Caro mea vere est cibus, et sanguis meus vere est potus. Et réliqua.En ce temps-là : Jésus, dit aux Juifs : Ma chair est vraiment une nourriture, et mon sang est vraiment un breuvage. Et le reste.
Homilía sancti Augustíni Epíscopi.Homélie de saint Augustin, Évêque..
Tract. 26 in Ioannem, post medium
Hic est panis, qui de cælo descéndit. Hunc panem significávit manna, hunc panem significávit altáre Dei. Sacraménta illa fuérunt : in signis divérsa sunt ; sed in re, quæ significátur, pária sunt. Apóstolum audi : Nolo enim vos, inquit, ignoráre, fratres, quia patres nostri omnes sub nube fuérunt, et omnes mare transiérunt, et omnes per Móysen baptizáti sunt in nube et in mari, et omnes eámdem escam spiritálem manducavérunt. Spiritálem útique eámdem ; nam corporálem álteram ; quia illi manna, nos áliud : spiritálem vero, quam nos, sed patres nostri, non patres illórum, quibus nos símiles sumus, non quibus illi símiles fuérunt. Et adiúngit : Et omnes eúmdem potum spiritálem bibérunt. Aliud illi, áliud nos, sed spécie visíbili quidem, tamen hoc idem significánte virtúte spiritáli. Quómodo enim eúmdem potum ? Bibébant, inquit, de spiritáli, sequénte petra : petra autem erat Christus. Inde panis, inde potus. Petra Christus in signo, verus Christus in verbo et in carne. Et quómodo bibérunt ? Percússa est petra de virga bis : gémina percússio, duo ligna crucis signíficat.« Voici le pain qui est descendu du ciel ». Ce pain, la manne l’a représenté ; ce pain, l’autel de Dieu l’a eu en figure. Ce furent là des sacrements. Entre eux et le nôtre, il y a diversité dans les signes, mais parité dans la chose signifiée. Écoutez l’Apôtre : « Je ne veux pas que vous ignoriez, mes frères, que nos pères ont tous été sous la nuée, qu’ils ont tous passé la mer, qu’ils ont tous été baptisés sous Moïse, dans la nuée et dans la mer, et qu’ils ont tous mangé la même nourriture spirituelle » [28]. Remarquez : la nourriture spirituelle est tout à fait la même ; car, différente est la nourriture corporelle ; eux, ils avaient la manne ; nous, nous avons autre chose. Comme nourriture spirituelle, ils avaient la même que nous et que nos pères aussi (je ne dis pas leurs pères, je dis nos pères, ceux auxquels nous ressemblons, et non ceux auxquels ils ont ressemblé). L’apôtre ajoute : « Ils ont tous bu le même breuvage spirituel » [29]. Si, à la vérité, le breuvage bu par eux était différent du nôtre, sous le rapport de l’apparence visible, c’était le même cependant, eu égard à la vertu spirituelle qu’il signifiait. Et comment était-il le même ? « Ils buvaient, continue l’Apôtre, de la pierre spirituelle qui les suivait, et cette pierre était le Christ » [30]. De là, le pain ; de là, le breuvage. Cette pierre était pour eux le Christ en figure ; pour nous, c’est le Christ en vérité dans la parole et dans sa chair. Et par quel moyen en ont-ils bu ? La pierre fut frappée de deux coups de verge : ces deux coups signifiaient les deux pièces du bois de la croix.
R/. Qui mandúcat meam carnem et bibit meum sánguinem, * In me manet, et ego in eo.R/. Celui qui mange ma chair et boit mon sang [31], * Demeure en moi et moi en lui.
V/. Non est ália nátio tam grandis, quæ hábeat deos appropinquántes sibi, sicut Deus noster adest nobis.V/. Il n’est point d’autre nation, si grande qu’elle soit, qui ait des dieux s’approchant d’elle, comme notre Dieu est présent pour nous [32].
* In me manet, et ego in eo. * Demeure en moi et moi en lui.
Lectio viii8e leçon
Norunt fidéles corpus Christi, si corpus Christi non négligant esse. Fiant corpus Christi, si volunt vívere de Spíritu Christi. De Spíritu Christi non vivit, nisi corpus Christi. Intellígite, fratres mei, quid díxerim. Homo es, et spíritum habes, et corpus habes. Spíritum dico, quæ ánima vocátur, qua constas quod homo es ; constas enim ex ánima et córpore. Habes enim spíritum invisíbilem, corpus visíbile. Dic mihi, quid ex quo vivat ? Spíritus tuus vivit ex córpore tuo, an corpus tuum ex spíritu tuo ? Respóndet omnis, qui vivit : qui autem hoc non potest respondére, néscio si vivit. Quid respóndet omnis, qui vivit ? Corpus útique meum vivit de spíritu meo. Vis ergo et tu vívere de Spíritu Chrísti ? In córpore esto Christi.Les fidèles connaissent le corps du Christ, si toutefois ils ont soin d’être eux-mêmes le corps du Christ. Qu’ils deviennent le corps du Christ, s’ils veulent vivre de l’Esprit du Christ. Il n’y a que le corps du Christ qui vive de l’Esprit du Christ. Comprenez, mes frères, ce que je dis. Tu es homme, tu as un esprit et tu as un corps. J’appelle esprit, cette âme par laquelle tu es un homme ; tu es, en effet, constitué d’une âme et d’un corps. Tu as un esprit invisible et un corps visible. Dis-moi lequel des deux fait vivre l’autre ? Est-ce ton corps qui communique la vie à ton esprit, ou ton esprit à ton corps ? Tout homme vivant peut répondre à cette question ; celui qui ne peut y répondre, je ne sais s’il vit réellement. Or, que répond celui qui vit ? Sans aucun doute, dit-il, mon corps reçoit la vie de mon esprit. Veux-tu donc aussi vivre de l’Esprit du Christ, fais partie du corps du Christ.
R/. Misit me vivens Pater, et ego vivo propter Patrem : * Et qui mandúcat me, vivet propter me.R/. Mon Père qui vit m’a envoyé, et je vis par mon Père [33] : * Et celui qui me mange vivra aussi par moi.
V/. Cibávit illum Dóminus pane vitæ et intelléctus.V/. Le Seigneur l’a nourri du pain de vie et d’intelligence [34].
* Et qui mandúcat me, vivet propter me. Glória Patri. * Et qui mandúcat me, vivet propter me.* Et celui qui me mange vivra aussi par moi. Gloire au Père. * Et celui qui me mange vivra aussi par moi.
Lectio ix9e leçon
Numquid enim corpus meum vivit de spíritu tuo ? Meum vivit de spíritu meo, et tuum de spíritu tuo. Non potest vívere corpus Christi, nisi de Spíritu Christi. Inde est quod expónens nobis Apóstolus Paulus hunc panem : Unus panis, inquit, unum corpus multi sumus. O sacraméntum pietátis, o signum unitátis, o vínculum caritátis ! Qui vult vívere, habet ubi vivat, habet unde vivat. Accédat, credat, incorporétur, ut vivificétur. Non abhórreat a compáge membrórum, non sit putre membrum quod resecári mereátur, non sit distórtium de quo erubescátur. Sit pulchrum, sit aptum, sit sanum : hǽreat córpori, vivat Deo de Deo. Nunc labóret in terra, ut póstea regnet in cælo.Serait-ce ton esprit qui ferait vivre mon corps ? Certainement non ; mon esprit fait vivre mon corps, ton esprit fait vivre le tien. De même le corps du Christ ne peut vivre que de l’Esprit du Christ. Voilà pourquoi, en nous parlant de ce pain, l’Apôtre saint Paul s’exprime ainsi : « Nous sommes tous un seul pain, un seul corps » [35]. O sacrement d’amour ! ô symbole d’unité ! ô lien de charité ! Celui qui veut vivre sait où il jouira de la vie, où il la puisera. Qu’il s’approche et qu’il croie, qu’il soit incorporé pour entrer en participation de la vie ; qu’il ne se détache point de l’étroite union avec les membres ; qu’il ne soit point un membre corrompu qui mérite d’être retranché, ni un membre difforme dont on ait à rougir : qu’il soit beau, qu’il soit bien proportionné, qu’il soit sain ; qu’il demeure uni au corps ; qu’il vive de Dieu et pour Dieu ; qu’il travaille maintenant sur la terre, afin de régner plus tard dans le ciel.
Te Deum

A LAUDES.

Comme au jour de la Fête, ici.

AUX VÊPRES.

Comme au jour de la Fête, ici.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

« Le Seigneur l’a juré, et son serment sera sans repentir : Vous êtes Prêtre pour jamais selon l’Ordre de Melchisédech » [36]. Ainsi chantaient au Messie attendu les fils de Lévi, dans le plus beau de leurs psaumes. Famille auguste et privilégiée, couronne de frères [37] rangée dans sa gloire autour de l’autel d’où s’élevait tout le jour la fumée des victimes, ils célébraient sur la harpe sacrée le sacerdoce des biens à venir, et proclamaient leur future déchéance. Ombre et figure, leur sacerdoce devait s’évanouir à la clarté des divines réalités du Calvaire. Ils avaient dû à l’égarement des nations d’être appelés à maintenir la religion du vrai Dieu dans son temple unique ; mais ce précaire honneur allait finir au temps de la réconciliation du monde. Fils de Juda par David, le Christ Pontife ne tient rien d’Aaron ; c’est par delà Moïse, avant la naissance des douze Patriarches et d’Israël leur père, que le chantre inspiré, remontant les âges, salue le type d’un sacerdoce que ne limiteront plus l’espace ou la durée. Melchisédech reçoit dans Abraham les hommages de Lévi son fils ; le dépositaire de la promesse est béni par ce chef de nations incirconcises ; et cette bénédiction puissante, qui s’étend à la race entière du patriarche, tire sa vertu d’un sacrifice mystérieux : l’offrande pacifique du pain et du vin au Dieu Très-Haut [38].

Le sacerdoce du Roi de justice et de paix, qui précède en dignité comme par le temps celui d’Aaron, doit aussi lui survivre. C’est à l’heure même où Dieu, faisant alliance avec une famille séparée, semblait abandonner les nations et se disposait à constituer l’Ordre lévitique en dehors d’elles, que le roi-pontife de Salem, sans commencement ni fin marqués dans l’Écriture [39], apparaît subitement comme la plus imposante image du Pontife éternel offrant le divin mémorial qui doit perpétuer sur terre le grand Sacrifice, et remplacer à jamais les immolations sanglantes du mosaïsme.

Le Sacrifice de la Croix domine les siècles et remplit l’éternité. Un seul jour néanmoins le vit offrir dans la série des âges, comme un seul lieu dans l’espace. Et toutefois en aucun lieu, en aucun temps, l’homme ne peut se passer du Sacrifice accompli sans cesse, renouvelé sans fin sous ses yeux ; car, nous l’avons vu, le Sacrifice est le centre nécessaire de toute religion, et l’homme ne peut se passer de la religion qui le rattache à Dieu comme Seigneur suprême, et forme le premier des liens sociaux. De même donc que, pour répondre à cette impérieuse nécessité dès l’origine, la Sagesse établit ces offrandes figuratives qui annonçaient l’unique Sacrifice et tiraient de lui leur valeur ; de même, l’oblation de la grande Victime une fois accomplie, doit-elle subvenir encore aux besoins des nations et pourvoir le monde d’un Sacrifice permanent : mémorial et non plus figure, vrai Sacrifice, qui, sans détruire l’unité de celui de la Croix, applique ses fruits chaque jour aux membres nouveaux des générations à venir.

Nous ne raconterons point ici la Cène du Seigneur et l’institution du nouveau sacerdoce, qui s’élève d’autant au-dessus de l’ancien que les promesses sur lesquelles il repose sont elles-mêmes plus élevées, et plus auguste l’alliance dont il forme la base [40]. Le Jeudi saint nous a dit les détails de cette histoire d’amour. C’est alors qu’au terme enfin de ses aspirations éternelles, quum facta esset hora [41], à cette heure tant différée, la Sagesse s’assied au banquet de l’alliance avec ces douze hommes représentants de l’humanité tout entière. Fermant le cycle des figures dans une dernière immolation de l’Agneau pascal : « J’ai désiré d’un immense désir manger cette Pâque avec vous » [42], s’écrie-t-elle en l’Homme-Dieu, comme soulageant son cœur en ce moment suprême des longues vicissitudes qu’a subies son amour. Et soudain, prévenant les Juifs, elle immole sa victime, l’Agneau divin signifié par Abel, prédit par Isaïe, montré par Jean le Précurseur [43]. Et, par une anticipation merveilleuse, déjà bouillonne dans la coupe sacrée le sang qui bientôt coulera sur le Calvaire ; déjà sa main divine présente aux disciples le pain changé au corps devenu la rançon du monde : « Mangez, buvez-en tous ; et, de même que pour vous en ce moment j’ai prévenu ma mort, quand j’aurai disparu de ce monde, faites ceci en mémoire de moi » [44].

L’alliance désormais est fondée. Scellé comme l’ancien dans le sang, le Testament nouveau se déclare ; et s’il ne vaut dès lors qu’en prévision de la mort réelle du testateur [45], c’est que le Christ, victime dévouée pour tous à la vengeance souveraine, est convenu, dans un pacte sublime avec le Père [46], de n’attacher la rédemption universelle qu’au drame terrible du lendemain. Chef de l’humanité coupable, et responsable à Dieu des crimes de sa race, il veut, pour détruire le péché, se conformer aux lois sévères de l’expiation, et manifester à la face du monde en ses tourments les droits de la justice éternelle [47]. Mais déjà la terre est en possession du calice qui doit proclamer la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne [48], en communiquant [49] à chaque membre du genre humain le vrai sang du Christ répandu pour ses péchés [50].

Et certes il convenait que de lui-même, et loin de tout cet appareil de violence extérieure qui devait bientôt donner le change aux disciples, notre Pontife adoré s’offrît au Père en un vrai Sacrifice, afin de manifester clairement la spontanéité de sa mort [51], et d’écarter la pensée que la trahison, la violence ou l’iniquité de quelques hommes pussent être le principe et la cause du salut commun [52].

C’est pourquoi, élevant les yeux vers son Père [53] et rendant grâces, il dit au présent, d’après la force du texte grec : « Ceci est mon corps livré pour vous ; ceci est mon sang versé pour vous » [54]. Ces paroles, qu’il lègue avec leur puissance aux dépositaires de son sacerdoce, opèrent en effet ce qu’elles signifient. Non seulement elles transforment le pain et le vin au corps et au sang du Christ ; mais encore, glaive redoutable, elles vont à isoler efficacement sous la double espèce le corps et le sang du Seigneur : d’elles-mêmes, elles divisent, elles livrent séparément à la justice du Père et dans un véritable état d’immolation ce corps et ce sang précieux, qui ne demeurent unis que par la toute-puissante volonté de la Majesté souveraine amplement et pour jamais satisfaite au Calvaire.

Chaque fois donc que sur le pain de froment et le vin de la vigne tomberont, d’une bouche autorisée, ces paroles comparables à celles qui tirèrent du néant l’univers, quelle que soit dans l’espace ou le temps la distance qui sépare le monde de la Croix, la terre se retrouvera en possession de l’auguste Victime. Une à la Cène et sur la Croix, elle demeure une dans l’oblation faite au Père, en tous lieux, par l’unique Pontife empruntant et faisant siennes les mains et la voix des prêtres choisis dans l’Esprit-Saint pour ce redoutable ministère

Qu’ils seront grands ces hommes tirés par l’imposition des mains du milieu de leurs frères ! Nouveaux Christs identifiés au Fils de la Vierge très pure, ils seront les privilégiés de la divine Sagesse, étroitement unis dans l’amour à sa puissance, associés comme Jésus lui-même au grand œuvre qu’elle poursuit dans les siècles : l’immolation de la grande Victime, et le mélange du calice [55] où l’humanité, fondue avec son Chef en un même sacrifice, vient en même temps puiser l’amont et s’unir intimement à sa divinité.

Louange et gloire à Jésus, le Pontife suprême, en ces nobles fils de la race humaine, étonnement du ciel, orgueil de la terre ! Entouré d’eux comme le palmier de ses palmes de victoire, comme le cèdre de son incorruptible ramure [56], il s’avance, pareil encore à l’olivier poussant ses rejetons d’où noblesse, force et sainteté découlent à l’envi [57]. La tige du cyprès élevant dans les airs la forêt de ses rameaux toujours verdoyants [58] disparaît sous leur épais ombrage : ainsi, voilant son action directe, et s’effaçant derrière les fils nombreux qui tirent de lui leur puissance et leur sève, le véritable Aaron les ramène tous à l’unité sur sa tige bénie.

Nuit fortunée, festin céleste, où, l’heure venue pour lui de glorifier son Père [59], et sur le point de franchir les degrés sanglants de cet autel de la Croix où doit se consommer la gloire souveraine [60], il fait dès maintenant briller aux yeux les rayons de son sacerdoce ! Sous les traits de Simon fils d’Onias posant les fondements du temple et délivrant son peuple de la mort [61], c’est Jésus que célébrait l’Esprit divin dans le chant sublime qui couronne le dernier des Livres consacrés à la Sagesse éternelle. Aux mains si débiles encore de ceux qu’il daigne appeler ses amis [62] et ses frères [63], le Christ confie l’oblation qui doit amplifier, en l’immortalisant, son Sacrifice au Roi des siècles. Sa noble main s’est étendue, offrant en libation du sang des raisins ; il le répand à la base de l’autel qui déjà s’élève, et l’odeur divine en est montée jusqu’au Prince Très-Haut. En ce moment, du Cénacle même, il a entendu dans l’avenir les chants de triomphe exaltant le divin mémorial, et la psalmodie sacrée remplissant la grande maison, l’Église, autour de lui d’une incessante et suave harmonie ; il a vu les peuples prosternés dans l’adoration du Seigneur leur Dieu en sa présence, et rendant au Tout-Puissant leur hommage devenu parfait désormais. Alors il s’est levé de la table du festin ; il est sorti dans sa force et dans son amour [64], pour étendre ses mains tout le jour en face de l’assemblée incrédule et ennemie des enfants d’Israël [65] ; il a renouvelé son oblation, consommé dans le sang son Sacrifice, voulant manifester par la Croix la vertu de Dieu [66].

« Sacrifice du soir, dit saint Augustin, la Passion du Christ est devenue dans la Résurrection l’offrande du matin » [67]. Déjà, sous la Loi, cette transformation du grand Sacrifice était mystérieusement annoncée par l’offrande solennelle de la gerbe des prémices, au troisième jour après l’immolation de l’Agneau pascal [68]. Mais le temps d’offrir le pain lui-même, le vrai froment des âmes, n’était pas venu encore, et la Loi ajoutait : « Vous compterez, depuis le jour où vous aurez offert la gerbe des prémices, sept semaines entières et le jour qui suivra, c’est-à-dire cinquante jours ; et alors vous offrirez au Seigneur un Sacrifice nouveau : des pains de froment de pure farine, qui seront les prémices du Seigneur » [69].

Cinquante jours en effet séparaient le monde de l’ouvrier divin qui pouvait seul transformer ces dons. Mais la glorieuse Pentecôte s’est levée enfin sous le souffle impétueux de l’Esprit créateur : la chair du Verbe, le sang divin qu’il a formés à l’origine, restés son domaine, attendaient, pour se reproduire dans les Mystères sacrés, l’opération incommunicable de celui dont ils sont le chef-d’œuvre glorieux. « C’est de l’Esprit, feu éternel, que Marie a conçu [70], dit Rupert ; c’est par lui que Jésus s’est offert, hostie vivante, au Dieu vivant [71] ; c’est du même feu qu’il brûle sur l’autel, car c’est par l’opération du Saint-Esprit que le pain se transforme en son corps » [72].

Aussi le disciple sublime du grand Apôtre, Denys l’Aréopagite, nous apprend-il [73] que Jésus, l’hiérarque suprême, lorsqu’il appela ses disciples en partage de son pontificat souverain, bien qu’étant Dieu il fût l’auteur de toute consécration, renvoya cependant à l’Esprit divin la consommation de leur sacerdoce. C’est pourquoi, montant au ciel, il leur recommande de ne point quitter Jérusalem, mais d’y attendre la promesse du Père, à savoir le baptême de l’Esprit qu’ils devaient recevoir sous peu de jours [74].

« Le Prêtre paraît, dit saint Jean Chrysostome, portant, non plus le feu comme sous la Loi, mais l’Esprit-Saint [75]. C’est un homme qui parle, mais Dieu qui opère » [76].

« Comment cela se fera t-il ? » demande à l’Ange la Vierge-Mère ; « car je ne connais point d’homme. » Et Gabriel répond : « L’Esprit-Saint surviendra en vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre » [77]. — « Et maintenant tu me demandes, dit saint Jean Damascène : Comment le pain, comment le vin et l’eau deviennent-ils le corps et le sang du Christ ? Je te réponds moi aussi : L’Esprit-Saint couvre de son ombre l’Église et ses dons, et il opère ce Mystère au-dessus de la parole et de toute pensée » [78].

C’est pourquoi l’Église, conclut saint Fulgence, ne saurait mieux implorer la venue de l’Esprit divin qu’au temps de la célébration des Mystères. Car, explique-t-il, « de même que, sous l’ombre de l’Esprit, dans le sein virginal, la Sagesse du Père s’unit à l’homme choisi par elle en un divin mariage, l’Église, dans le Sacrifice, adhère elle-même au Christ par l’Esprit-Saint comme l’épouse à son époux et le corps à son chef » [79]. Aussi l’heure de Tierce, heure de l’arrivée en ce monde du divin Paraclet, est-elle désignée par l’Église, en chacune de ses fêtes, pour l’oblation solennelle du grand Sacrifice auquel il préside dans la toute-puissance de son opération.

Heure bénie du Sacrifice, où l’exil paraît moins lourd à l’Épouse du Christ ! Sur terre encore, elle honore Dieu d’un digne hommage, et voit affluer en son sein les trésors du ciel. Car la Messe en ce sens est son bien, sa dot d’Épouse ; c’est à elle qu’il appartient d’en régler l’oblation, d’en préciser les formules et les rites, d’en percevoir les fruits. Le Prêtre est son ministre : elle prie ; il immole la Victime, et donne à sa prière une puissance infinie. Le caractère éternel du sacerdoce, imprimé par Dieu même au front du Prêtre, le rend seul dépositaire du pouvoir divin et place au-dessus de toute force humaine la validité du Sacrifice offert par ses mains ; mais il ne peut accomplir légitimement cette oblation que dans l’Église et avec elle.

Cette mutuelle dépendance, union sans confusion du Prêtre et de l’Église dans les sacrés Mystères, avait frappé les premiers chrétiens. Le cimetière de Calliste, point central des catacombes romaines au IIIe siècle de notre ère, en garde encore sur ses parois la démonstration touchante. Près des tombes consacrées à la sépulture des Évêques de l’Église-mère, un ensemble de peintures, remontant à l’origine de la catacombe, rappelait symboliquement aux initiés le dogme eucharistique établi par Jésus comme base de la religion dont ses Pontifes avaient été, pendant leur vie, les gardiens fidèles. Le repas des sept disciples, auxquels Jésus lui-même a préparé pendant la pèche mystérieuse le pain et le poisson rôtis sur les charbons [80], occupe dans une des salles le milieu de la muraille faisant face à la porte d’entrée. Deux sujets moins étendus accompagnent de chaque côté cette peinture centrale : c’est, d’une part, le Sacrifice d’Abraham à la signification bien connue ; de l’autre, on voit une scène qui ne rappelle rien d’historique, mais dont la composition, en relation évidente avec le sujet en regard, représente le Sacrifice des chrétiens dans un symbolisme d’autant plus profond, qu’il dérobe plus soigneusement aux profanes le secret des Mystères. Sur une table est un pain dont le poisson, l’ichthus eucharistique, placé tout auprès, indique la vraie nature ; à droite du spectateur, une femme, debout et les bras étendus en orante, adresse au ciel de ferventes supplications : tandis qu’à gauche, couvert du simple pallium, vêtement habituel du clergé chrétien au second siècle, un homme plus jeune étend les mains avec autorité sur la table et ses dons. Qui ne reconnaîtrait l’Église, unie, dans la consécration, au Prêtre son minisire et son fils [81] ?

Avec quelle fidélité cette reine en deuil de l’Époux observe le Testament qui lui légua dans le Sacrifice l’éternelle et vivante mémoire de sa mort, à la dernière Cène ! S’il se donne à elle tout entier dans le Mystère d’amour, l’état d’immolation où il se présente à ses yeux l’avertit qu’elle doit moins songer à jouir de sa douce présence, qu’à parfaire et continuer son œuvre en s’immolant avec lui. Sous l’autel, son lit nuptial, la femme forte [82] a placé les Martyrs : elle sait que la Passion du Christ appelle un complément dans ses membres [83]. Née sur la Croix de son côté ouvert, elle l’a épousé dans la mort ; et cette première étreinte qui, dès sa naissance, mit dans ses bras le corps sanglant de son Époux, a fait passer dans l’âme de la nouvelle Ève l’ivresse de dévouement et d’amour au sein de laquelle l’Adam céleste s’endormit au Calvaire.

Mère des vivants, l’immense famille humaine afflue vers elle avec ses misères de tout genre et ses besoins sans nombre. L’Église saura faire valoir le talent qui lui a été confié : la Messe répond à tous les besoins ; l’Église suffit par elle à ses devoirs d’Épouse et de Mère. S’identifiant toujours plus chaque jour à la Victime universelle qui la revêt de son infinie dignité, elle adore la Majesté souveraine et lui rend grâces, implore le pardon des fautes anciennes et nouvelles de ses enfants, et demande pour eux les biens du temps et de l’éternité.

De son autel, le sang divin rejaillit sur les âmes souffrantes, tempère la flamme expiatrice, et les conduit au lieu de rafraîchissement, de lumière et de paix [84].

Telle est la vertu merveilleuse du Sacrifice offert dans l’Église, que ces quatre fins dont la poursuite résume la religion entière : adoration, action de grâces, propitiation, impétration ; il les atteint de lui-même et, quant à l’effet principal, indépendamment des dispositions du Prêtre ou de ceux qui l’entourent. Car c’est l’hostie qui en fait la valeur ;et l’hostie sur l’autel est la même qu’au Calvaire, hostie divine égale au Père, s’offrant elle-même comme sur la Croix à ces mêmes fins dans une seule oblation.

Le Créateur de l’espace et du temps n’est point leur esclave, et il le montre en ce mystère : « De même qu’offert en plusieurs lieux, c’est un même corps et non plusieurs, dit saint Jean Chrysostome ; ainsi en est-il de l’unité du Sacrifice aux divers âges » [85]. De l’autel à la Croix le mode seul est distinct. Sanglante sur la Croix, non sanglante à l’autel, l’oblation demeure une [86] en face de cette diversité dans l’application. L’immolation de l’auguste Victime apparut sur la Croix dans sa sublime horreur ; mais la violence des bourreaux voilait aux regards le Sacrifice offert à Dieu par le Verbe incarné dans la spontanéité de son amour. L’immolation se dérobe aux yeux à l’autel ; mais la religion du Sacrifice s’y révèle au grand jour, et s’y déploie dans sa splendeur. Le sang divin laissa sur la terre qui but ses flots au grand Vendredi la malédiction du déicide ; le calice de salut que l’Église tient en ses mains porte avec lui la bénédiction du monde.

O glorieuse condition de notre terre, d’où l’Agneau immolé, qui déjà reçoit sur le trône de Dieu les hommages dus à son triomphe [87], présente chaque jour au Père, en ses abaissements infinis, satisfaction entière pour les crimes du monde et gloire égale à sa Majesté sainte ! Les Anges admirent l’honneur de cet humble globe perdu dans l’espace au milieu des sphères brillantes des cieux, et tant aimé dès le commencement par l’éternelle Sagesse ; ils entourent tremblants cet autel de la terre en relation si intime avec celui du ciel, qu’un même Pontife y rend hommage au même Dieu dans une même offrande infinie. L’Enfer en frémit dans ses abîmes ; et sa rage contre Dieu, sa vengeance contre l’homme n’a pas d’objet plus en horreur. Combien d’efforts jamais lassés, combien d’essais toujours plus habiles, pour faire cesser sur terre ce Sacrifice odieux ! Jusqu’à ce qu’enfin, au cœur même de la chrétienté, l’hérésie protestante renversât tant d’autels ; jusqu’à cette révolution, gagnant toujours plus chaque jour, et dont le but avoué est de fermer les temples et de disperser les sacrificateurs !

Mais aussi le monde, qui autrefois se relevait après les tempêtes, se plaint d’une décadence universelle, où la force n’est plus qu’aux fléaux de Dieu. Il s’agite en vain sur lui même, sentant céder sous lui, à chaque pas, les bras de chair qui s’offrent à porter sa décrépitude. Le sang de l’Agneau, sa force antique, ne coule plus sur terre avec la même abondance. Et cependant le monde tient encore ; il tient par ce même Sacrifice qui, bien que méconnu et diminué, s’offre toujours en un grand nombre de lieux ; il tiendra jusqu’à ce qu’enfin, dans un dernier accès de démence furieuse, il ait égorgé le dernier des Prêtres et fait cesser ici-bas le Sacrifice éternel [88].

La formule mozarabe que voici résume admirablement quelques-unes des considérations oui précèdent.

POST NOMINA. (In Nativitate D. N. J.-Christi.)
Famuli tui indigni et exigui sacerdotes tremendæ majestati tuæ spirituales victimas immolantes : offerimus tibi, Deus, hostiam immaculatam, quam maternus uterus impolluta virginitate produxit, pudor edidit, sanctificatio genuit, integritas fudit. Hostiaque immolata vivit : et vivens jugiter immolatur. Hostia quæ sola Deo placere prævalet : quia Dominus est. Hanc tibi, summe Pater, offerimus pro sancta Ecclesia tua : pro satisfactione sæculi delinquentis : pro emundatione animarum nostrarum : pro sanitate omnium infirmorum : ac requie vel indulgentia fidelium defunctorum, ut mutata sorte tristium mansionum, felici perfruantur societate justorum.Dans notre faiblesse et dignité, nous, vos prêtres et serviteurs, immolons à votre redoutable Majesté des victimes spirituelles ; nous vous offrons, ô Dieu, l’hostie immaculée que le sein d’une mère a produite dans sa virginité inviolée, que la pudeur a conçue, la sainteté engendrée, l’intégrité mise au monde. Immolée, cette hostie vit toujours ; et vivante, elle est continuellement immolée : hostie qui seule peut plaire à Dieu, car elle est le Seigneur. Nous vous l’offrons, Père souverain, pour votre sainte Église, pour l’expiation des crimes du monde, pour la purification de nos âmes, pour la santé de tous les malades, pour le repos et le pardon des fidèles défunts : échangeant pour mieux leurs tristes demeures, qu’ils jouissent de la bienheureuse société des justes.

L’incommensurable portée du Sacrifice eucharistique, sa puissance universelle, apparaîtront dans ces belles prières, qui font suite à celles que nous avons déjà empruntées des Constitutions apostoliques.

CONSTITUTIO JACOBI.

Nous vous prions de regarder ces dons favorablement, ô Dieu qui n’avez besoin d’aucune chose ; complaisez-vous en eux pour lhonneur de votre Christ ; envoyez sur ce Sacrifice votre Saint-Esprit, le témoin des souffrances du Seigneur Jésus : afin que ceux qui participeront à la victime soient affermis dans l’amour, absous des péchés, délivrés du diable et de ses mensonges, remplis du Saint-Esprit, rendus dignes de votre Christ, et qu’ils obtiennent la vie éternelle parleur réconciliation avec vous, Seigneur tout-puissant.

Nous vous prions encore, Seigneur, pour votre sainte Église qui s’étend d’un pôle à l’autre, que vous avez acquise par le sang précieux de votre Christ : gardez-la inébranlable et sans orage jusqu’à la consommation du siècle ; de même pour tout l’épiscopat administrant et distribuant comme il convient la parole de vérité, pour tout le presbyterium, pour les diacres et tous les clercs : afin que vous leur donniez à tous la Sagesse, et les remplissiez du Saint-Esprit.

Nous vous prions encore, Seigneur, pour le roi et ceux qui sont en dignité, pour toute l’armée, pour que soit dans la paix ce qui nous concerne : afin que passant notre vie entière dans le calme et la concorde, nous vous rendions gloire par Jésus-Christ notre espérance.

Nous vous offrons encore le Sacrifice au nom de tous les saints qui depuis le commencement vous furent agréables : patriarches, prophètes, justes, apôtres, martyrs, confesseurs, évoques, prêtres, diacres, sous-diacres, lecteurs, chantres, vierges, veuves, laïques ; et de tous ceux dont vous savez les noms.

Nous vous l’offrons aussi pour ce peuple : afin que vous en fassiez le sacerdoce royal, la nation sainte, à la gloire de votre Christ : pour ceux qui vivent en virginité et chasteté, pour les veuves de l’Église, pour ceux qui vivent en un chaste mariage, pour les enfants de votre peuple : afin que vous n’ayez à rejeter personne d entre nous.

Nous vous supplions aussi pour cette ville et ses habitants ; pour les malades, les esclaves, les exilés, les proscrits, les navigateurs et voyageurs : soyez leur secours, aide et défense.

Nous vous prions encore pour ceux qui nous haïssent et nous persécutent à cause de votre Nom, pour ceux du dehors et de l’erreur : amenez-les au bien, calmez leurs fureurs.

Nous vous prions encore pour les catéchumènes de l’Église, les possédés, les pénitents nos frères : rendez les premiers parfaits dans la foi, délivrez les seconds des attaques du mauvais, recevez la pénitence des troisièmes, et donnez à nous tous le pardon des péchés.

Nous vous offrons aussi pour l’équilibre des saisons et l’abondance des fruits de la terre : afin que, recevant constamment les dons de votre libéralité, nous vous louions sans cesse, vous qui donnez à toute chair sa nourriture.

Nous vous prions aussi pour les absents retenus par une cause légitime : afin que, gardés par vous dans la religion, vous nous rassembliez tous, fermes, sans reproche et sans faute, dans le royaume de votre Christ, le Dieu de toute nature tombant sous l’intelligence ou les sens, et notre roi.

A vous toute gloire, vénération, action de grâces, honneur, adoration : Père, Eils et Saint-Esprit, maintenant, et toujours, et dans les siècles des siècles éternels et sans fin.

Et tout le peuple doit répondre : Amen.

Nous emprunterons la Séquence qu’on va lire au Thesaurus Hymnologicus de Daniel. A la différence d’un assez grand nombre de pièces liturgiques composées comme elle sur le divin Sacrement, dans les XIVe et XVe siècles, on y retrouve encore quelque reste de l’inspiration des grands lyriques chrétiens des temps antérieurs.

DE S. SACRAMENTO. (Infra Septuagesimam et Quadragesimam.)
De superna Hierarchia,
Vera descendit Sophia
In uterum Virginis :
Optatus Dux in hac via,
Venit natus de Maria,
Esse portans hominis.
Des divins sommets,
l’éternelle Sophia descend
au sein de la Vierge :
le guide désiré du voyageur apparaît sur la terre ;
il naît de Marie,
revêtant l’être humain.
Magnæ Matris magnus Natus,
Modo miro mundo natus,
Mundi tollit crimina :
Aufert morbos, dat salutem,
Ante suos fert virtutem,
Hostis fugans agmina.
Noble Fils d’une noble Mère,
venu au monde par un mode admirable,
il ôte les crimes du monde,
chasse la souffrance, donne la santé,
marche en tête des siens dans sa puissance
et met en fuite les bataillons ennemis.
Zelator mirabilis,
Effectus passibilis,
In cruce damnatur :
Legislator veteris
Legis plagis asperis
Pro nobis plagatur.
Devenu passible
en son merveilleux amour,
on le condamne à la croix ;
le souverain auteur
de l’ancienne Loi reçoit
pour nous des blessures cruelles.
Agnus in Cruce levatus,
Et pro nobis immolatus,
Fit salutis hostia :
Vitæ nostræ reparator,
Et virtutum restaurator,
Cœli pandit ostia.
Agneau élevé sur la croix
et pour nous immolé,
il devient l’hostie du salut :
réparateur de notre vie,
restaurateur des vertus,
il ouvre les portes du ciel.
Sacramenta dictat prius,
Cœna magna, bene scius
Quæ jam erant obvia :
Præbens panem benedicit ;
Hoc est corpus meum, dicit ;
Sit mei memoria.
Il dicte d’abord, au grand souper,
ses volontés sacrées,
connaissant bien les prochains événements ;
offrant du pain, il le bénit :
« Ceci est mon corps, dit-il ;
que ce soit mon souvenir. »
Data benedictio
Fit a Dei Filio
Vini propinati ;
Et cum benedicitur,
Tunc sanguis efficitur
Verbi incarnati.
Le vin de la coupe
qu’il présente
est béni par le Fils de Dieu ;
et cette bénédiction
en fait à l’heure même le Sang
du Verbe incarné.
Deo nota sunt hæc soli :
Credi debent atque coli,
Amoto scrutinio :
Justus tantum expers doli
Sumat illa : — sed tu noli
Involute vitio.
Dieu seul pénètre ces mystères ;
il faut les croire, les vénérer,
sans chercher à comprendre.
Que seul, dans sa simplicité,
le juste s’en approche : — mais toi,
n’aie garde, homme faussé par le vice.
Cave, Juda, ne damneris :
Petre, sume ut salveris :
Cibus est fidelium :
Ad cujus mensam armatur
Justus, reus et nudatur,
Præda factus hostium.
Crains, Judas, ta condamnation ;
approche, Pierre, pour ton salut :
c’est le mets des fidèles.
A cette table s’arme le juste,
tandis que, mis à nu, le coupable
devient la proie des ennemis.
Tua, Christe, sunt hæc mira ;
Serva sumentes ab ira Judicii :
Orna nos veste gratiæ,
Defende nos a facie Supplicii.
Reparator salvifice,
Dignos cibo nos effice
Medicine cœlice.
Ce sont là, Christ, vos merveilles :
de la colère du jugement gardez qui s’en approche ;
parez-nous de la robe de grâce,
défendez nous du supplice.
Réparateur du salut,
rendez-nous dignes de cette nourriture,
remède des cieux.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

L’Octave reprenant la Messe de la Fête, le Bhx Schuster ne donne pas de commentaire propre. On trouvera ses commentaires sur la Messe ici

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Les dons de l’unité et de la paix.

1. La prière des Heures. — Nous entendons encore une prédication de la « Bouche d’or » de l’Église. « Apprenons donc, prêtres et laïcs, de quelle nourriture nous avons été jugés dignes ; apprenons et tremblons. C’est de sa sainte chair qu’il nous a permis de nous rassasier ; c’est lui-même, le Christ immolé, qu’il sert à notre table. Quelle excuse aurons-nous si, après nous être nourris d’un tel aliment, nous commettons de tels péchés ; si nous devenons des loups, nous qui mangeons l’Agneau ; si, nourris comme des brebis, nous nous déchirons à la manière des lions ? En effet, ce mystère nous ordonne d’être entièrement purs, non seulement de la rapine, mais encore de la plus légère inimitié. C’est le mystère de la paix. Les Juifs ont reçu de Dieu l’ordre de célébrer par des solennités annuelles les bienfaits qu’ils ont reçus ; toi, tu dois les célébrer chaque jour, au moyen de ces mystères ».

2. Lecture d’Écriture (1 Rois, V, 1-12). — Les Philistins s’emparèrent de l’arche d’alliance et la transportèrent à Azot. Ils la placèrent dans le temple de Dagon (leur dieu national, qui était représenté avec un buste en forme de poisson), à côté de l’idole. Mais ils trouvèrent deux fois l’idole renversée devant l’arche ; la tête et les deux mains gisaient, détachées sur le seuil du temple. L’arche leur apportait le malheur. Le Seigneur frappa les habitants et leurs champs de diverses plaies. Alors, les chefs des Philistins promenèrent l’arche dans le pays, mais partout où elle arrivait elle causait la mort, et ceux qui ne mouraient pas étaient frappés de tumeurs. Alors, les chefs des Philistins résolurent de renvoyer l’arche dans le pays d’Israël.

Il n’est certainement pas nécessaire, et ce n’est pas l’intention de l’Église, d’établir une relation entre la fête et la lecture d’Écriture. Cependant, il ne nous est pas défendu de trouver une relation entre les deux pourvu que cette liaison apparaisse facilement. L’arche d’alliance est le symbole de l’Eucharistie. On peut citer ici les vers de la séquence : « Aux méchants, elle apporte la mort ; pour les bons, elle est une source de vie. »

[1] St Thomas d’Aquin.

[2] de l’ancienne alliance.

[3] Puisque les voies que vous avez choisies pour venir et fixer votre séjour au milieu de nous sont celles de l’amour, du sacrifice et de l’anéantissement, que nous n’en suivions pas d’autres pour arriver, sous votre conduite, au but auquel nous tendons, à la lumière que vous habitez. (L’abbé Pimont.)

[4] Ps. 1, 3.

[5] Ps. 4, 8.

[6] Heb. 9, 12.

[7] Ps. 77, 24.

[8] Ex. 12, 6.

[9] I Cor. 5, 7.

[10] Ex. 16, 12.

[11] Jn. 6, 32.

[12] III Reg. 19, 6.

[13] Jn. 6, 52.

[14] Ps. 19, 4.

[15] Ps. 22, 5.

[16] Ps. 41, 5.

[17] Ps. 80, 17.

[18] De miel sauvage déposé par les abeilles dans le creux des rochers.

[19] Matth. 26, 26.

[20] Job. 31, 31.

[21] Luc. 22, 20.

[22] Lament. 3, 20.

[23] Jn. 6, 48.

[24] Ps. 42, 4.

[25] Ps. 80, 17.

[26] Ps. 83, 3.

[27] Ps. 103, 4.

[28] I Cor X, 10, 1.

[29] I Cor. 10, 4.

[30] I Cor. 10, 4.

[31] Jn. 6, 57.

[32] Deut. 4, 7.

[33] Jn. 6, 58.

[34] Eccli. 15, 3.

[35] I Cor. 10, 17.

[36] Psalm. CIX, 4.

[37] Eccli. L., 13.

[38] Gen. XIV, 18-20.

[39] Heb. VII, 3.

[40] Heb. VII, 19-22 ; VIII 6.

[41] Luc. XXII, 14.

[42] Ibid. 15.

[43] Greg. Moral, XXIX, 31.

[44] I Cor. XI, 24, 25.

[45] Heb. IX, 16-18.

[46] Ibid. XII, 2.

[47] Rom. III, 25, 26.

[48] I Cor. XI, 26.

[49] Ibid. X, 16.

[50] Luc. XXII, 20.

[51] Johan. X, 18.

[52] Greg. Nyss. Orat. I, in Chr. resurr.

[53] Canon. Miss.

[54] Luc. XXII, 19, 20.

[55] Prov. IX, 2.

[56] Eccli. L, 13, 14.

[57] Ibid. 11.

[58] Ibid.

[59] Johan. XVII, 1.

[60] Eccli L, 11, 12.

[61] Ibid. 1-5.

[62] Johan. XV, 15.

[63] Ibid. XX, 17.

[64] Ibid. XIV, 31.

[65] Isai. LXV, 2.

[66] Eccli. L, 15-23.

[67] In Psalm. CXL.

[68] Levit. XXIII, 10, 11.

[69] Levit. XXIII, 15-17.

[70] Matth. I, 18, 20.

[71] Heb. IX, 14.

[72] Rup. in Exod. Lib. II, c. 10.

[73] De Eccl. hier. C. V, 3, § V.

[74] Act. I, 4.

[75] De Sacerd. Lib. III, c. 4.

[76] Homil. de proditione Judæ, 6.

[77] Luc. I, 34, 35.

[78] De fid. orthod. Lib. IV, c. 13.

[79] Ad Monim. Lib. II, c. 9, 10, 11.

[80] Johan. XXI, 9.

[81] De Rossi, Rom. sott. II.

[82] Prov. XXXI, 10.

[83] Col. I, 24.

[84] Can. Miss.

[85] In ep. ad Heb. Hom. 17.

[86] Heb. X, 14.

[87] Apoc. V, 6, 12.

[88] Dan. X, 311.