Textes de la Messe |
Office |
Léon XIII, Annum Sacrum, 1899 |
En 1955, le Décret de simplification des rubriques a supprimé l’Octave du Sacré-Cœur. Depuis, au bréviaire, l’Office est réduit à la lecture de l’Écriture occurrente (ancien premier nocturne des Matines), la psalmodie est celle du jour de la semaine et non plus celle du Jour de la Fête.
Nous donnons ici l’Office des Matines avec les deux lectures propres à chaque jour (Merci à Alexandre du FC pour les traductions des lectures patristiques du 3ème Nocturne des Matines).
On trouvera une introduction à l’Octave au Samedi, et les commentaires généraux sur le jour même de la Fête ici.
Comme au jour de la Fête
A MATINES
Invitatorium | Invitatoire |
Cor Iesu amóre nostri vulnerátum * Veníte, adorémus. | Le Cœur de Jésus blessé par son amour pour nous, * Venez, adorons. |
Psaume 94 (Invitatoire) | |
Hymnus | Hymne |
Auctor beáte sǽculi,
Christe, Redémptor ómnium, Lumen patris de lúmine, Deúsque verus de Deo : | Bienheureux créateur du monde,
Christ, universel rédempteur, lumière jaillie de la lumière du Père, Dieu vrai sorti de Dieu : |
Amor coégit te tuus
Mortále corpus súmere, Ut, novus Adam, rédderes, Quod vetus ille abstúlerat. | C’est votre amour qui vous a contraint
à prendre un corps mortel, pour nous rendre, nouvel Adam, ce que l’ancien, nous avait pris. |
Ille amor almus ártifex
Terræ marísque et síderum, Erráta patrum míserans Et nostra rumpens víncula. | Cet amour, auguste artisan
de la terre, de la mer et des astres, prit en pitié les égarements de nos pères et rompit nos liens. |
Non Corde discédat tuo
Vis illa amóris íncliti : Hoc fonte gentes háuriant Remissiónis grátiam. | Que de votre Cœur ne se retire pas
la force de ce merveilleux amour ; qu’à cette source les nations puisent la grâce du pardon. |
Percússum ad hoc est láncea
Passúmque ad hoc est vúlnera, Ut nos laváret sórdibus, Unda fluénte et sánguine. | Si la lance le frappa,
s’il endura ses blessures, c’était pour nous laver de nos taches par l’eau et le sang répandu. |
Iesu tibi sit glória,
Qui Corde fundis grátiam, Cum Patre, et almo Spíritu, In sempitérna sǽcula. Amen. | Jésus, à Vous soit la gloire,
Vous dont le Cœur répand l’amour, ainsi qu’au Père et à l’Esprit nourricier, dans les siècles sempiternels. Amen. |
In I Nocturno | Au 1er Nocturne |
Ant. 1 Cogitatiónes * Cordis eius in generatióne et generatiónem. | Ant. 1 Les pensées * de son Cœur subsistent de génération en génération [1]. |
Psaume 32 | |
Ant. 2 Apud te * est fons vitæ ; torrénte voluptátis tuæ potábis nos, Dómine. | Ant. 2 En Vous * est la source de la vie ; Vous nous ferez boire au torrent de vos délices, Seigneur [2]. |
Psaume 35 | |
Ant. 3 Homo * pacis meæ, qui edébat panes meos, magnificávit super me supplantatiónem. | Ant. 3 L’homme * de ma paix, qui mangeait mes pains, a fait éclater sa trahison contre moi [3]. |
Psaume 40 | |
V/. Tóllite iugum meum super vos et díscite a me. | V/. Prenez sur vous mon jour et apprenez de moi [4]. |
R/. Quia mitis sum et húmilis Corde. | R/. Que je suis doux et humble de Cœur. |
Lectio i | 1ère leçon |
De libro primo Regum. | Du premier livre des Rois. |
Cap. 12, 1-5. | |
Dixit autem Sámuel ad univérsum Israël : Ecce audívi vocem vestram, iuxta ómnia quæ locúti estis ad me, et constítui super vos regem. Et nunc rex gráditur ante vos ; ego autem sénui et incánui : porro fílii mei vobíscum sunt. Itaque conversátus coram vobis ab adoloscéntia mea usque ad hanc diem, ecce præsto sum. Loquímini de me coram Dómino, et coram Christo eius, utrum bovem cuiúsquam túlerim aut ásinum, si quémpiam calumniátus sum, si oppréssi áliquem, si de manu cuiúsquam munus accépi ; et contémnam illud hódie restituámque vobis. Et dixérunt : Non es calumniátus nos, neque oppressísti, neque tulísti de manu alicúius quíppiam. Dixítque ad eos : Testis est Dóminus advérsum vos, et testis Christus eius in die hac, quia non invenéritis in manu mea quíppiam. Et dixérunt : Testis. | Or, Samuel dit à tout Israël : Voilà que j’ai entendu votre voix, selon tout ce que vous m’avez dit, et j’ai établi sur vous un roi. Et maintenant ce roi marche devant vous ; pour moi, j’ai vieilli, et j’ai blanchi ; mais mes fils sont avec vous. C’est pourquoi, ayant vécu devant vous depuis ma jeunesse jusqu’à ce jour, me voici en votre présence. Dites de moi devant le Seigneur et devant son Christ, si j’ai pris le bœuf ou l’âne de personne, si j’ai çalomnié qui que ce soit, si j’ai opprimé quelqu’un, si j’ai reçu un présent de la main de personne, je le dédaignerai aujourd’hui et je vous le rendrai. Et ils lui répondirent : Vous ne nous avez point calomniés, ni opprimés, et vous n’avez pris de la main de quelqu’un quoi que ce soit. Il leur dit encore : Le Seigneur est témoin contre vous, et son Christ aussi est témoin en ce jour, que vous n’avez trouvé dans ma main quoi que ce soit. Et ils répondirent : Témoin. |
R/. Fériam eis pactum sempitérnum et non désinam eis benefácere et timórem meum dabo in corde eórum * Ut non recédant a me. | R/. Je ferai avec eux une alliance éternelle, et Je ne cesserai pas de leur faire du bien, et Je mettrai ma crainte dans leur cœur, * Afin qu’ils ne se retirent pas de moi [5]. |
V/. Et lætábor super eis cum bene eis fécero in toto Corde meo. | V/. Et Je me réjouirai à leur sujet, lorsque Je leur aurai fait du bien de tout mon Cœur [6]. |
* Ut non recédant a me. | * Afin qu’ils ne se retirent pas de moi. |
Lectio ii | 2e leçon |
Cap. 12, 6-9. | |
Et ait Sámuel ad pópulum : Dóminus, qui fecit Móysen et Aaron et edúxit patres nostros de terra Ægýpti : nunc ergo state, ut iudício conténdam advérsum vos coram Dómino de ómnibus misericórdiis Dómini, quas fecit vobíscum et cum pátribus vestris ; quómodo Iacob ingréssus est in Ægýptum, et clamavérunt patres vestri ad Dóminum, et misit Dóminus Móysen et Aaron et edúxit patres vestros de Ægýpto et collocávit eos in loco hoc. Qui oblíti sunt Dómini Dei sui, et trádidit eos in manu Sísaræ magístri milítiæ Hasor et in manu Philisthinórum et in manu regis Moab, et pugnavérunt advérsum eos. | Alors Samuel dit au peuple : Le Seigneur qui a fait Moïse et Aaron, et qui a retiré nos pères de la terre d’Égypte. Maintenant donc comparaissez, que je vous attaque en jugement devant le Seigneur pour toutes les miséricordes du Seigneur, qu’il vous a faites à vous et à vos pères, par la manière dont Jacob entra en Égypte, dont vos pères crièrent vers le Seigneur, dont le Seigneur envoya Moïse et Aaron, et dont il retira vos pères de l’Égypte, et dont il les établit dans ce lieu-ci. Ils oublièrent le Seigneur leur Dieu, et il les livra à la main de Sisara, chef de la milice d’Hasor, à la main des Philistins, et à la main du roi Moab, qui combattirent contre eux. |
R/. Si inimícus meus maledixísset mihi, sustinuíssem útique * Tu vero homo unánimis qui simul mecum dulces capiébas cibos. | R/. Si mon ennemi m’avait maudit, je l’aurais supporté [7]. * Mais toi, qui ne faisais qu’un avec moi, qui avec moi partageais les doux mets de ma table [8]. |
V/. Et si is qui me óderat super me magna locútus fuísset, abscondíssem me fórsitan ab eo. | V/. Et si celui qui me haïssait avait parlé de moi avec insolence, peut-être me serais-je caché de lui [9]. |
* Tu vero homo unánimis qui simul mecum dulces capiébas cibos. | * Mais toi, qui ne faisais qu’un avec moi, qui avec moi partageais les doux mets de ma table. |
Lectio iii | 3e leçon |
Cap. 12, 10-14. | |
Póstea autem clamavérunt ad Dóminum et dixérunt : Peccávimus, quia derelíquimus Dóminum et servívimus Báalim et Astaroth, nunc ergo érue nos de manu inimicórum nostrórum, et serviémus tibi. Et misit Dóminus Ieróbaal et Badan et Iephte et Sámuel, et éruit vos de manu inimicórum vestrórum per circúitum, et habitástis confidénter. Vidéntes autem quod Naas rex filiórum Ammon venísset advérsum vos, dixístis mihi : Nequáquam, sed rex imperábit nobis, cum Dóminus Deus vester regnáret in vobis. Nunc ergo præsto est rex vester, quem elegístis et petístis : ecce dedit vobis Dóminus regem. Si timuéritis Dóminum et serviéritis ei, et audiéritis vocem eius et non exasperavéritis os Dómini, éritis et vos et rex, qui ímperat vobis, sequéntes Dóminum Deum vestrum. | Mais ensuite ils crièrent vers le Seigneur et dirent : Nous avons péché, parce que nous avons abandonné le Seigneur, et nous avons servi les Baalim et les Astaroth : mais maintenant délivrez-nous de la main de nos ennemis, et nous vous servirons. Et le Seigneur envoya Jérobaal, Badan, Jephté et Samuel, et il vous délivra de la main de vos ennemis d’alentour, et vous avez habité cette terre avec assurance. Cependant voyant que Naas, roi des enfants d’Ammon, était venu contre vous, vous m’avez dit : Point du tout ; mais un roi nous gouvernera, lorsque le Seigneur votre Dieu régnait sur vous. Maintenant donc il est là votre roi que vous avez choisi et demandé : voilà que le Seigneur vous a donné un roi. Si vous craignez le Seigneur, et que vous le serviez, si vous entendez sa voix, et que vous n’exaspériez point la bouche du Seigneur, vous suivrez, et vous et le roi qui vous gouverne, le Seigneur votre Dieu. |
R/. Cum essémus mórtui peccátis, convivificávit nos Deus in Christo * Propter nímiam caritátem suam qua diléxit nos. | R/. Lorsque nous étions morts par nos péchés, Dieu nous a rendu la vie dans le Christ [10] * A cause de l’amour extrême dont Il nous a aimés [11]. |
V/. Ut osténderet in sǽculis superveniéntibus abundántes divítias grátiæ suæ. | V/. Afin de montrer dans les siècles à venir les richesses surabondantes de sa grâce [12]. |
* Propter nímiam caritátem suam qua diléxit nos. Glória Patri. * Propter nímiam caritátem suam qua diléxit nos. | * A cause de l’amour extrême dont Il nous a aimés. Gloire au Père. * A cause de l’amour extrême dont Il nous a aimés. |
In II Nocturno | Au 2nd Nocturne |
Ant. 4 Rex omnis terræ * Deus ; regnábit super Gentes. | Ant. 4 Le Roi de toute la terre * c’est Dieu ; Il régnera sur les Nations [13]. |
Psaume 46 | |
Ant. 5 Dum anxiarétur * Cor meum, in petra exaltásti me. | Ant. 5 Lorsque s’angoissait * mon Cœur, Vous m’avez élevé sur la pierre. [14]. |
Psaume 60 | |
Ant. 6 Secúndum multitúdinem * dolórum meórum in Corde meo, consolatiónes tuæ lætificavérunt ánimam meam. | Ant. 6 Selon la multitude * des douleurs dans mon Cœur, Vos consolations ont rempli de joie mon âme [15]. |
Psaume 93 | |
V/. Ego dixi, Dómine, miserére mei. | V/. Moi, j’ai dit : Seigneur, ayez pitié de moi [16]. |
R/. Sana ánimam meam quia peccávi tibi. | R/. Guérissez mon âme, car j’ai péché contre Vous. |
Lectio iv | 4e leçon |
Ex lítteris Encýclicis Pii Papæ undécimi. | Des Encycliques du Pape Pie XI. |
Ex. Litt. Encycl. Miserentissimus Redemptor | |
Quo autem perféctius oblátio nostra nostrúmque sacrifícium sacrifício domínico respónderit, idest amórem nostri cupiditatésque nostras immolavérimus et carnem crucifixérimus crucifixióne ea mýstica, de qua lóquitur Apóstolus, eo uberióres propitiatiónis atque expiatiónis pro nobis aliúsque percipiémus fructus. Mirífica enim viget fidélium ómnium cum Christo necessitúdo, qualis inter caput et cétera córporis membra intercédit, itémque arcána illa, quam fide cathólica profitémur, Sanctórum communióne, cum sínguli hómines tum pópuli non modo coniungúntur inter se, sed étiam cum eódem qui est caput Christus, ex quo totum corpus compáctum et connéxum per omnem iunctúram subministratiónis, secúndum operatiónem in mensúram uniuscuiúsque membri augméntum córporis sui facit in ædificatiónem sui in caritáte. Quod quidem Mediátor ipse Dei et hóminum Christus Iesus, morti próximus, a Patre postulárat : Ego in eis et tu in me ut sint consummáti in unum. | Plus notre oblation et notre sacrifice ressembleront au sacrifice du Christ, autrement dit, plus parfaite sera l’immolation de notre amour-propre et de nos convoitises, plus la crucifixion de notre chair se rapprochera de cette crucifixion mystique dont parle l’Apôtre, plus abondants seront les fruits de propitiation et d’expiation que nous recueillerons pour nous et pour les autres. Car entre les fidèles et le Christ existe une admirable relation, semblable à celle qui relie la tête aux divers membres du corps ; mais de plus, par cette mystérieuse communion des saints, que professe notre foi catholique, les hommes et les peuples non seulement sont unis entre eux, mais encore avec Celui-là même « qui est la tête, le Christ. C’est de lui que tout le corps, coordonné et uni par le lien des membres qui se prêtent un mutuel secours et dont chacun opère selon sa mesure d’activité, grandit et se perfectionne dans la charité » [17]. C’est la prière qu’avant de mourir le Christ Jésus, Médiateur entre Dieu et les hommes, adressait lui-même à son Père : « Que je sois en eux et vous en moi, afin qu’ils soient parfaitement un » [18]. |
R/. Prope est Dóminus ómnibus invocántibus eum, * Omnibus invocántibus eum in veritáte. | R/. Le Seigneur est près de tous ceux qui L’invoquent, de * Tous ceux qui L’invoquent avec sincérité [19]. |
V/. Miserátor et miséricors Dóminus, pátiens et multum miséricors. | V/. Le Seigneur est clément et miséricordieux, patient et tout à fait miséricordieux [20]. |
* Omnibus invocántibus eum in veritáte. | * Tous ceux qui L’invoquent avec sincérité. |
Lectio v | 5e leçon |
Quemádmodum ígitur uniónem cum Christo profitétur ac firmat consecrátio, ita expiátio eámdem uniónem, et culpas detergéndo ínchoat, et Christi passiónes participándo pérficit, et víctimas pro frátribus offeréndo consúmmat. Atque id sane miseréntis Iesu consílium fuit, cum Cor nobis suum, insígnia passiónis prǽferens ac flammas amóris osténtans, patére vóluit, scílicet ut hinc infinítam peccáti malítiam coniectántes, illinc Reparatiónis caritátem infinítam admiráti, et peccátum veheméntius detestarémur et caritátis ardéntius vicem redderémus. Et vere expiatiónis potíssimum seu reparatiónis spíritus primas semper potiorésque partes hábuit in cultu Sacratíssimo Cordi Iesu exhibéndo, nihílque eo congruéntius orígini, índoli, virtúti, indústriis quæ huic religiónis formæ sunt própriæ, ut rerum memória et usus, sacra item litúrgia atque Summórum Pontíficum acta confírmant. | Par conséquent, de même que l’union avec le Christ trouve son expression et sa confirmation dans l’acte de consécration, de même l’expiation sert de prélude à cette union en effaçant les péchés ; elle la perfectionne en nous associant aux souffrances du Christ, elle la parachève enfin en offrant des victimes pour le prochain. Ce fut là bien certainement la miséricordieuse intention de Jésus quand il nous présenta son Cœur chargé des insignes de la Passion et débordant des flammes de l’amour ; en nous montrant ainsi, d’une part, la malice infinie du péché, et en nous faisant admirer, d’autre part, l’infinie charité du Rédempteur, il voulait nous inspirer une haine encore plus vive du péché, ainsi que plus d’ardeur à répondre à son amour. Du reste, l’esprit d’expiation ou de réparation a toujours tenu le premier et principal rôle dans le culte rendu au Sacré Cœur de Jésus ; rien n’est plus conforme à l’origine, à la nature, à la vertu et aux pratiques qui caractérisent cette dévotion ; d’ailleurs, l’histoire, les usages, la liturgie sacrée et les actes des Souverains Pontifes en portent témoignage. |
R/. Confíteor tibi, Pater, Dómine cæli et terræ, quia abscondísti hæc a sapiéntibus et prudéntibus * Et revelásti ea párvulis. | R/. Je Vous bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux habiles * Et de l’avoir révélé aux tous petits [21]. |
V/. Ita, Pater, quóniam sic fuit plácitum ante te. | V/. Oui, Père, car tel a été votre bon plaisir [22]. |
* Et revelásti ea párvulis. | * Et de l’avoir révélé aux tous petits. |
Lectio vi | 6e leçon |
Síquidem cum se conspiciéndum Margarítæ Maríæ exhibéret Christus, caritátis suæ infinitátem prǽdicans, simul, mæréntis instar, tot tantásque sibi inústas ab ingrátis homínibus iniúrias in hæc verba conquéstus est, quæ útinam in piórum ánimis insidérent nulláque unquam oblivióne deleréntur : « En Cor illud, inquit, quod tantópere hómines amávit beneficísque ómnibus cumulávit, quodque amóri suo infiníto non tantum rédditam grátiam nullam invénit, at contra, obliviónem, negléctum, contumélias, eásque ab iis étiam illátas nonnúnquam, qui amóris peculiáris débito officióque teneréntur ». | Dans ses apparitions à Marguerite-Marie, quand il lui dévoilait son infinie charité, le Christ laissait en même temps percevoir comme une sorte de tristesse, en se plaignant des outrages si nombreux et si graves que lui faisait subir l’ingratitude des hommes. Puissent les paroles qu’il employait alors ne jamais s’effacer de l’âme des fidèles : « Voici ce Cœur – disait-il – qui a tant aimé les hommes, qui les a comblés de tous les bienfaits, mais qui, en échange de son amour infini, recueille non des actions de grâces, mais l’indifférence, l’outrage, et parfois de ceux-là mêmes que les témoignages d’un amour spécial obligeaient à lui demeurer plus fidèles. » |
R/. Omnes gentes quascúmque fecísti vénient * Et adorábunt coram te, Dómine. | R/. Toutes les nations que Vous avez créées viendront * Et se prosterneront devant Vous, Seigneur [23]. |
V/. Et glorificábunt nomen tuum quóniam magnus es tu, et fáciens mirabília. | V/. Et elles rendront gloire à votre nom car Vous êtes grand, et Vous faites des prodiges. |
* Et adorábunt coram te, Dómine. Glória Patri. * Et adorábunt coram te, Dómine. | * Et se prosterneront devant Vous, Seigneur. Gloire au Père. * Et se prosterneront devant Vous, Seigneur. |
In III Nocturno | Au 2nd Nocturne |
Ant. 7 Qui dilígitis Dóminum, * confitémini memóriæ sanctificatiónis eius. | Ant. 7 Vous qui aimez le Seigneur, * célébrez la mémoire de sa sanctification [24]. |
Psaume 96 | |
Ant. 8 Vidérunt * omnes términi terræ salutáre Dei nostri. | Ant. 8 Tous les confins * de la terre ont vu le salut de notre Dieu [25]. |
Psaume 97 | |
Ant. 9 Psallam tibi * in natiónibus, quia magna est super cælos misericórdia tua. | Ant. 9 Je Vous chanterai * parmi les nations, car votre miséricorde s’est plus grande que les cieux [26]. |
Psaume 107 | |
V/. Memóriam fecit mirabílium suórum miserátor Dóminus. | V/. Il a institué un mémorial de ses merveilles, lui, le Seigneur miséricordieux [27]. |
R/. Escam dedit timéntibus se. | R/. Il a donné une nourriture à ceux qui le craignent. |
Lectio vii | 7e leçon |
Léctio sancti Evangélii secundum Ioánnem. | Lecture du saint Évangile selon saint Jean. |
Cap. 19, 31-37. | |
In illo témpore : Iudǽi, quóniam parascéve erat, ut non remanérent in cruce córpora sábbato (erat enim magnus dies ille sábbati) rogavérunt Pilátum, ut frangeréntur eórum crura et tolleréntur. Et réliqua. | En ce temps-là : Ce jour étant celui de la Préparation, afin que les corps ne demeurassent pas en croix durant le Sabbat (car ce Sabbat était un jour très solennel), les Juifs prièrent Pilate qu’on leur rompît les jambes, et qu’on les enlevât. Et le reste. |
Homilía sancti Bernardíni Senénsis. | Homélie de saint Bernardin de Sienne. |
Quadragesimale de Christiana Religione. Sermo 5 | |
Ioánnes subdit : Unus mílitum láncea latus eius apéruit et contínuo exívit sanguis et aqua. O amor qui ómnia liquas ! quómodo pro redemptióne nostra reliquísti dilectórem nostrum ? Nam, ut úndique inundáret amóris dilúvium, super nos ruptæ sunt abýssi magnæ ; scílicet, penetrália Cordis Iesu, quibus, ad íntima progrédiens, dira láncea non pepércit. Sanguis exívit et aqua. Sanguis in redemptiónem, sed étiam in ablutiónem aqua deflúxit ; unde formáta est Ecclésia ex látere Christi, ut ætérne únicam atque diléctam a Christo se discat, et ut recognóscat quam displícuit culpa pro qua sanguis divínus ex hómine Deo vivo et mórtuo ita deflúxit. Non enim parva quantitáte constámus, si pro nobis sanguis divínus effúnditur. | Jean poursuit : « Arrivés à Jésus et le voyant déjà mort, ils ne lui rompirent pas les jambes, mais de sa lance l’un des soldats lui ouvrit le côté, et il en sortit aussitôt du sang et de l’eau » [28]. O amour qui fonds tout ! Comment pour notre rédemption as-tu délaissé celui qui nous aime ? Car afin que de toutes parts nous inondât le déluge de l’amour, sur nous se sont déchirés les grands abîmes, c’est-à-dire les sources profondes de vie du Cœur de Jésus, que la lance cruelle, pénétrant jusqu’au plus intime, n’a pas épargnées. « Il sortit du sang et de l’eau. » Le sang coula pour la rédemption, mais aussi l’eau pour la purification : ainsi l’Église fut formée du côté du Christ, afin qu’elle se sache éternellement épousée et aimée du Christ, et qu’elle reconnaisse combien a déplu la faute pour laquelle le sang d’un Dieu a ainsi été répandu par l’Homme Dieu tant vivant que mort. Car nous ne sommes pas d’un vil prix, si le sang d’un Dieu est pour nous répandu. |
R/. Ego si exaltátus fúero a terra * Omnia traham ad meípsum. | R/. Moi, quand J’aurai été élevé de terre * J’attirerai tout à Moi [29]. |
V/. Hoc autem dicébat signíficans qua morte esset moritúrus. | V/. Il disait cela, pour marquer de quelle mort Il devait mourir [30]. |
* Omnia traham ad meípsum. | * J’attirerai tout à Moi. |
Lectio viii | 8e leçon |
Aqua ad lítteram non cum sánguine indistíncta deflúxit. Neque enim potuísset ab insipiéntibus comprehéndi, si mixta cum sánguine defluxísset. Et forte totus sanguis deflúxit ex illo divíno córpore in signum totíus amóris effúsi, post quem humor áqueus egréssus est. Quod quidem est alto mystério factum, ut prius egrederétur ex eódem córpore rédimens prétium, deínde aqua in qua multitúdo populórum redémpta significátur. Sunt enim aquæ multæ, pópuli multi ; tamen qui ad christiánam fidem pértinent unus fidélis pópulus sunt, ut non sint aquæ, sed aqua quæ manávit ex látere Christi, sicut prima Corinthiórum cápite décimo Apóstolus ait : Unus panis, et unum corpus multi sumus omnes, qui de uno pane et de uno cálice participámus. Et íterum ad Ephésios, cápite quarto, inquit : Unus Deus, una fides, unum baptísma. | Selon la lettre, l’eau ne coula pas confondue avec le sang. En effet les insensés n’auraient pas saisi, si elle avait coulé mêlée au sang. Et sans doute tout le sang s’est-il écoulé de ce divin corps en figure de l’amour répandu tout entier ; après quoi l’eau est sortie à son tour. Ce qui s’est accompli par un profond mystère : du même corps est d’abord sorti le prix du rachat, puis l’eau en qui est symbolisée la multitude des peuples rachetés. Les eaux abondantes, ce sont en effet des peuples nombreux [31]. Cependant ceux qui appartiennent à la foi chrétienne ne forment qu’un peuple fidèle, de sorte que ce ne sont pas des eaux, mais de l’eau qui est sortie du côté du Christ ; c’est ce que dit l’Apôtre dans la Première aux Corinthiens : « Il n’y a qu’un seul pain et nous sommes un seul corps, malgré notre nombre, car nous participons tous à un seul pain et à un seul calice » [32]. Et il dit encore aux Éphésiens : « Un seul Dieu, une seule foi, un seul baptême » [33]. |
R/. Simus ergo imitatóres Dei * Et ambulémus in diléctione. | R/. Soyons donc les imitateurs de Dieu * Et marchons dans l’amour [34]. |
V/. Sicut et Christus diléxit nos et trádidit semetípsum pro nobis. | V/. Comme le Christ, qui nous a aimés, et qui s’est livré Lui-même pour nous. |
* Et ambulémus in diléctione. Glória Patri. * Et ambulémus in diléctione. | * Et marchons dans l’amour. Gloire au Père. * Et marchons dans l’amour. |
Lectio ix | 9e leçon |
Notánter tamen adverténdum est quod latus Christi apértum dícitur, non vulnerátum ; quóniam próprie vulnus prætérquam in vivo córpore fíeri nequit. Ait enim Evangelísta Ioánnes : Unus mílitum láncea latus eius apéruit ; ut, áperto látere, cognoscámus dilectiónem Cordis sui usque ad mortem, et ad illum ineffábilem amórem eius ingrediámur quo ille ad nos procéssit. Accedámus ergo ad Cor eius, Cor altum, Cor secrétum, Cor ómnia cógitans, Cor ómnia sciens, Cor díligens, immo amóre ardens ; et apértam portam intelligámus saltem in amóris veheméntia ; cordifórmes ingrediámur ad secrétum ab ætérno abscónditum, nunc vero in morte quasi apérto látere revelátum ; quóniam apértio láteris ætérni templi apertiónem demónstrat, ubi ómnium exsisténtium consummáta est felícitas ætérna. | Il faut cependant noter avec soin qu’il est dit du côté du Christ qu’il est ouvert et non blessé : car on ne peut à proprement parler faire de blessure qu’à un corps vivant. L’évangéliste Jean dit en effet : « de sa lance l’un des soldats lui ouvrit le côté », afin que par le côté ouvert, nous apprenions l’amour de son Cœur, qui va jusqu’à la mort : et que nous accédions à son amour ineffable par le chemin qu’il fait pour venir à nous. Approchons donc de son Cœur, Cœur profond [35], Cœur mystérieux, Cœur qui pense tout, Cœur qui connaît tout, Cœur aimant, bien plus, embrasé d’amour ; comprenons que la porte est ouverte et du moins sous la violence de l’amour, devenons conformes à ce Cœur ; entrons dans le secret caché de toute éternité [36], et maintenant comme révélé dans la mort par l’ouverture du côté : car l’ouverture du côté prouve qu’est ouvert le temple éternel, où est consommée l’éternelle félicité de tous les vivants. |
Te Deum | |
A LAUDES.
Comme au jour de la Fête.
AUX DEUXIÈMES VÊPRES.
Comme au jour de la Fête.
Institué en 1929, l’Octave du Sacré-Cœur ne peut pas avoir été commenté dans l’Année Liturgique de Dom Guéranger ; le Bhx Cardinal Schuster, ne commentant que les textes du Missel, ne donne qu’un commentaire de la Messe qu’on retrouvera ici. Quand à Dom Pius Parsch, il n’en parle que pour le Dimanche dans l’Octave pour relier l’évangile de la brebis perdue et du bon Pasteur au thème du Sacré-Cœur.
C’est pourquoi nous donnons ici le premier grand texte du Magistère pontifical sur la dévotion au Sacré-Cœur.
Nous avons naguère, comme vous le savez, ordonné par lettres apostoliques qu’un jubilé serait célébré prochainement dans cette ville sainte, suivant la coutume et la règle établies par les anciens. Aujourd’hui, dans l’espoir et dans l’intention d’accroître la piété dont sera empreinte cette solennité religieuse, Nous avons projeté et nous conseillons une manifestation éclatante. Pourvu que tous les fidèles Nous obéissent de cœur et avec une bonne volonté unanime et généreuse, Nous attendons de cet acte, et non sans raison, des résultats précieux et durables, d’abord pour la religion chrétienne et ensuite pour le genre humain tout entier.
Maintes fois, Nous Nous sommes efforcé d’entretenir et de mettre de plus en plus en lumière cette forme excellente de piété, qui consiste à honorer le Très Sacré Cœur de Jésus. Nous suivions en cela l’exemple de nos prédécesseurs Innocent XII, Benoît XIII, Clément XIII, Pie VI, Pie VII et Pie IX. Tel était notamment le but de notre décret publié le 28 juin de l’année 1889, et par lequel Nous avons élevé au rite de première classe la fête du Sacré Cœur.
Mais maintenant Nous songeons à une forme de vénération plus imposante encore, qui puisse être en quelque sorte la plénitude et la perfection de tous les hommages que l’on a coutume de rendre au Cœur très sacré. Nous avons confiance que cette manifestation de piété sera très agréable à Jésus-Christ, rédempteur.
D’ailleurs, ce n’est pas pour la première fois que le projet dont nous parlons est mis en question. En effet, il y a environ vingt-cinq ans, à l’approche des solennités du deuxième centenaire du jour où la bienheureuse Marguerite-Marie Alacoque avait reçu de Dieu l’ordre de propager le culte du divin Cœur, des lettres pressantes émanant non seulement de particuliers, mais encore d’évêques, furent envoyées en grand nombre et de tous côtés à Pie IX. Elles tendaient à obtenir que le Souverain Pontife voulût bien consacrer au très saint Cœur de Jésus l’ensemble du genre humain. On jugea bon de différer, afin que la décision fût mûrie davantage. En attendant, les villes reçurent l’autorisation de se consacrer séparément si cela leur agréait, et une formule de consécration fut prescrite. Maintenant, de nouveaux motifs étant survenus, Nous pensons que l’heure est arrivée de mener à bien ce projet.
Ce témoignage général et solennel de respect et de piété est bien dû à Jésus-Christ, car Il est le Prince et le Maître suprême. En effet son empire ne s’étend pas seulement aux nations qui professent la foi catholique, ou aux hommes qui ayant reçu régulièrement le saint baptême se rattachent en droit à l’Église, quoiqu’ils en soient séparés par des opinions erronées ou par un dissentiment qui les arrache à sa tendresse.
Le règne du Christ embrasse aussi tous les hommes privés de la foi chrétienne de sorte que l’universalité du genre humain est réellement soumise au pouvoir de Jésus. Celui qui est le Fils unique de Dieu le Père, qui a la même substance que Lui et qui "est la splendeur de sa gloire et l’empreinte de sa substance" [37]. celui-là nécessairement possède tout en commun avec le Père ; il a donc aussi le souverain pouvoir sur toutes choses. C’est pourquoi le Fils de Dieu dit de lui-même par la bouche du prophète : "Pour moi, j’ai été établi roi sur Sion, sa sainte montagne ; le Seigneur m’a dit : "Tu es mon Fils, je t’ai engendré aujourd’hui. Demande-moi, je te donnerai les nations pour ton héritage et les limites de la terre pour ton patrimoine" [38].
Par ces paroles, Jésus-Christ déclare qu’il a reçu de Dieu la puissance, soit sur toute l’Église qui est figurée par la montagne de Sion, soit sur le reste du monde jusqu’à ses bornes les plus lointaines. Sur quelle base s’appuie ce souverain pouvoir, c’est ce que nous apprennent clairement ces paroles : "Tu es mon fils". Par cela même, en effet, que Jésus-Christ est le fils du Roi du monde, il hérite de toute sa puissance ; de là ces paroles : "Je te donnerai les nations pour ton héritage". A ces paroles sont semblables celles de l’apôtre saint Paul : "Son fils qu’il a établi héritier en toutes choses" [39].
Mais il faut surtout considérer ce que Jésus-Christ a affirmé concernant son empire, non plus par les Apôtres ou par les prophètes, mais de sa propre bouche. Au gouverneur romain qui lui demandait "Tu es donc roi" ? il répondit sans aucune hésitation : ’’Tu le dis, je suis roi" [40]. La grandeur de ce pouvoir et l’immensité infinie de ce royaume sont confirmées clairement par les paroles de Notre-Seigneur aux apôtres : "Toute puissance m’a été donnée dans le ciel et sur la terre" [41]. Si toute puissance a été donnée au Christ, il s’ensuit nécessairement que son empire doit être souverain, absolu, indépendant de la volonté de tout être, de sorte qu’aucun pouvoir ne soit égal ni semblable au sien. Et puisque cet empire lui a été donné dans le ciel et sur la terre, il faut qu’il voie le ciel et la terre lui obéir.
Effectivement, il a exercé ce droit extraordinaire et qui lui est propre, lorsqu’il a ordonné aux apôtres de répandre sa doctrine, de réunir les hommes en une seule Église par le Baptême du salut, enfin de leur imposer des lois que personne ne pût méconnaître, sans mettre en péril son salut éternel.
Mais ce n’est pas tout. Jésus-Christ commande non seulement en vertu d’un droit naturel et comme Fils de Dieu, mais encore en vertu d’un droit acquis. Car "il nous a arrachés de la puissance des ténèbres" [42] ; et en outre il "s’est livré lui-même pour la rédemption de tous" [43]. Non seulement les catholiques et ceux qui ont reçu régulièrement le baptême chrétien, mais tous les hommes et chacun d’eux sont devenus pour Lui "un peuple conquis" [44]. Aussi, saint Augustin a-t-il eu raison de dire à ce sujet : "Vous cherchez ce que Jésus-Christ a acheté ? voyez ce qu’Il a donné et vous saurez ce qu’Il a acheté. Le sang du Christ est le prix de l’achat. Quel objet peut avoir une telle valeur ? Lequel, si ce n’est le monde entier ? Lequel si ce n’est toutes les nations ? C’est pour l’univers entier que le Christ a payé un tel prix" [45].
Pourquoi les infidèles eux-mêmes sont-ils soumis au pouvoir de Jésus-Christ ? Saint Thomas nous en expose longuement la raison. En effet, après avoir demandé si le pouvoir judiciaire de Jésus-Christ s’étend à tous les hommes, et avoir affirmé que "l’autorité judiciaire découle de l’autorité royale", il conclut nettement : "Tout est soumis au Christ quant à la puissance, quoique tout ne lui soit pas soumis encore quant à l’exercice même de cette puissance" [46]. Ce pouvoir du Christ et cet empire sur les hommes s’exercent par la vérité, par la justice et surtout par la charité.
Mais à cette double base de sa puissance et de sa domination, Jésus-Christ nous permet dans sa bienveillance d’ajouter, si nous y consentons de notre côté, la consécration volontaire. Dieu et rédempteur à la fois, il possède pleinement, et d’une façon parfaite, tout ce qui existe. Nous, au contraire, nous sommes si pauvres et dénués, que nous n’avons rien qui nous appartienne et dont nous puissions lui faire présent. Cependant, dans sa bonté et sa charité souveraine, il ne refuse nullement que nous lui donnions et que nous lui consacrions ce qui lui appartient, comme si nous en étions les possesseurs. Non seulement il ne refuse pas cette offrande, mais il la désire et il la demande : "Mon fils, donne moi ton cœur". Nous pouvons donc lui être pleinement agréables par notre bonne volonté et l’affection de notre âme. En nous consacrant à lui, non seulement nous reconnaissons et nous acceptons son empire ouvertement et avec joie, mais encore nous témoignons réellement que si ce que nous donnons nous appartenait, nous l’offririons de tout notre cœur ; nous demandons ainsi à Dieu de vouloir bien recevoir de nous ces objets mêmes qui lui appartiennent absolument. Telle est l’efficacité de l’acte dont il s’agit, tel est le sens de nos paroles.
Puisque dans le Sacré Cœur réside le symbole et l’image sensible de la charité infinie de Jésus-Christ, charité qui nous pousse à l’aimer en retour, il est convenable de nous consacrer à son Cœur très auguste. Agir ainsi, c’est se donner et se lier à Jésus Christ ; car les hommages, les marques de soumission et de piété que l’on offre au divin Cœur se rapportent réellement et en propre au Christ lui même.
C’est pourquoi Nous engageons et Nous exhortons à accomplir avec ardeur cet acte de piété, tous les fidèles qui connaissent et aiment le divin Cœur. Nous désirerions vivement qu’ils se livrassent à cette manifestation le même jour, afin que les sentiments et les vœux communs de tant de milliers de fidèles fussent portés en même temps au temple céleste.
Mais oublierons-nous une quantité innombrable d’hommes, pour lesquels n’a pas encore brillé la vérité chrétienne ? Nous tenons la place de Celui qui est venu sauver ce qui était perdu et qui a donné son sang pour le salut du genre humain tout entier. Aussi, nous songeons avec assiduité à ramener vers la véritable vie ceux mêmes qui gisent dans les ténèbres de la mort. Nous avons envoyé de tous côtés pour les instruire des messagers du Christ ; et maintenant, déplorant leur sort, Nous les recommandons de toute notre âme et Nous les consacrons, autant qu’il est en Nous, au Cœur très sacré de Jésus.
De cette manière, l`acte de piété que Nous conseillons à tous sera profitable à tous. Après l’avoir accompli, ceux qui connaissent et aiment Jésus-Christ sentiront croître leur foi et leur amour. Ceux qui, connaissant le Christ, négligent cependant sa loi et ses préceptes, pourront puiser dans son Sacré-Cœur la flamme de la charité. Enfin, nous implorerons tous d’un élan unanime le secours céleste pour les infortunés qui souffrent dans les ténèbres de la superstition. Nous demanderons que Jésus-Christ, auquel ils sont soumis "quant à la puissance" les soumette un jour "quant à l’exercice de cette puissance". Et cela, non seulement "dans un siècle à venir, quand il accomplira sa volonté sur tous les êtres en récompensant les uns et en châtiant les autres" [47], mais encore dès cette vie mortelle, en leur donnant la foi et la sainteté. Puissent-ils honorer Dieu par la pratique de la vertu, comme il convient, et chercher à obtenir la félicité céleste et éternelle.
Une telle consécration apporte aussi aux États l’espoir d’une situation meilleure, car cet acte de piété peut établir ou raffermir les liens qui unissent naturellement les affaires publiques à Dieu. Dans ces derniers temps surtout, on a fait en sorte qu’un mur s’élevât, pour ainsi dire, entre l’Église et la société civile. Dans la constitution et l’administration des États, on compte pour rien l’autorité de la juridiction sacrée et divine, et l’on cherche à obtenir que la religion n’ait aucun rôle dans la vie publique. Cette attitude aboutit presque à enlever au peuple la foi chrétienne ; si c’était possible, on chasserait de la terre Dieu lui même. Les esprits étant en proie à un si insolent orgueil, est-il étonnant que la plus grande partie du genre humain soit livrée à des troubles profonds, et battue par des flots qui ne laissent personne à l’abri de la crainte et du péril ? Il arrive fatalement, que les fondements les plus solides du salut public s’écroulent lorsqu’on laisse de côté la religion. Dieu, pour faire subir à ses ennemis le châtiment qu’ils avaient mérité, les a livrés à leurs penchants, de sorte qu’ils s’abandonnent à leurs passions et s’épuisent dans une licence excessive.
De là, cette abondance de maux qui depuis longtemps sévissent sur le monde, et qui Nous obligent à demander le secours de Celui qui seul peut les écarter. Or, qui est celui-là, sinon Jésus-Christ, fils unique de Dieu ? "car nul autre nom n’a été donné sous le ciel aux hommes, par lequel nous devions être sauvés" [48]. Il faut donc recourir à Celui qui est "la voie, la vérité et la vie." L’homme a erré, qu’il revienne dans la route droite ; les ténèbres ont envahi les âmes, que cette obscurité soit dissipée par la lumière de la vérité ; la mort s’est emparée de nous, conquérons la vie. Il nous sera enfin permis de guérir tant de blessures, on verra renaître avec toute justice l’espoir en l’antique autorité, les splendeurs de la foi reparaîtront, les glaives tomberont et les armes s’échapperont des mains lorsque tous les hommes accepteront l’empire du Christ et s’y soumettront avec joie, et quand "toute langue confessera que le Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire de Dieu le Père" [49].
A l’époque où l’Église, toute proche encore de ses origines, était accablée sous le joug des Césars, un jeune empereur aperçut dans le ciel une croix qui annonçait et qui préparait une magnifique et prochaine victoire. Aujourd’hui, voici qu’un autre emblème béni et divin s’offre à nos yeux. C’est le cœur très sacré de Jésus, sur lequel se dresse la Croix et qui brille d’un magnifique éclat au milieu des flammes. En lui nous devons placer toutes nos espérances ; nous devons lui demander et attendre de lui le salut des hommes.
Enfin, Nous ne voulons point passer sous silence un motif particulier, il est vrai, mais légitime et sérieux, qui Nous pousse à entreprendre cette manifestation. C’est que Dieu, auteur de tous les biens, Nous a naguère sauvé d’une maladie dangereuse. Nous voulons évoquer le souvenir d’un tel bienfait et en témoigner publiquement Notre reconnaissance par l’accroissement des hommages rendus au très saint Cœur.
Nous décidons en conséquence que, le 9, le 10 et le 11 du mois de juin prochain, dans l’église de chaque localité et dans l’église principale de chaque ville, des prières déterminées seront dites. Chacun de ces jours-là, les litanies du Sacré-Cœur, approuvées par Notre autorité, seront jointes aux autres invocations. Le dernier jour, on récitera la formule de consécration que Nous vous envoyons, Vénérables Frères, en même temps que ces lettres.
Comme gage des faveurs divines et en témoignage de Notre bienveillance, Nous accordons très affectueusement dans le Seigneur la bénédiction apostolique à vous, à votre clergé et au peuple que vous dirigez.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 25 mai de l’année 1899, de notre pontificat la vingt-deuxième.
[1] Ps. 32, 11. Les desseins de bonté du Cœur du Christ sont immuables et fidèles comme ceux de Dieu. Tel est le sens de cette Antienne comprise d’après le sens du verset du Psaume dont elle est extraite.
[2] Ps. 35, 9-10.
[3] Ps. 40, 10.
[4] Matth. 11, 29.
[5] Jer. 32, 40.
[6] Jer. 32, 41.
[7] Ps. 54, 13.
[8] Ps. 54, 14-15.
[9] Ps. 54, 13.
[10] Eph. 2, 5.
[11] Eph. 2, 4.
[12] Eph. 2, 7.
[13] Ps. 46, 8-9.
[14] Ps. 60, 2. Vous m’avez rend fermeté et sécurité. Cela a été vrai du Sacré-Cœur vivant sur terre et c’est encore vrai du cœur de ses fidèles.
[15] Ps. 93, 19.
[16] Ps. 40, 4.
[17] Ephes. IV, 15-16.
[18] Jn. XVII, 23.
[19] Ps. 144, 18.
[20] Ps. 144, 8.
[21] Matth. 11, 25.
[22] Matth. 11, 26.
[23] Ps. 85, 9-10
[24] Ps. 96, 11 & 13.
[25] Ps. 97, 5.
[26] Ps. 107, 3-4.
[27] Ps. 110, 4.
[28] Jn. 19, 33-34.
[29] Jn. 12, 32.
[30] Jn. 12, 33.
[31] cf. Apoc. 17, 1 et 15.
[32] 1 Cor. 10, 17.
[33] Ephes. 4, 5.
[34] Ephes. 5, 1-2.
[35] cf. Ps. 63, 7.
[36] cf. Col. 1, 26.
[37] Heb. I, 3.
[38] Ps. II, 6-8.
[39] Heb. 1, 2.
[40] Joan. XVIII, 37.
[41] Matth. XVIII, 18.
[42] Coloss. I, 13.
[43] I Tim. II, 6.
[44] I Pet. II, 9.
[45] Tract. 20 in Joan.
[46] 3a P. Q. 59, art. 4.
[47] S. Thomas, loc. cit.
[48] Act. IV, 12.
[49] Phil. II, 2.