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09/07 Ste Véronique Giuliani, vierge

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Sommaire

  Biographie  
  Textes de la Messe, supplément du Missel Pro aliquibus locis   
  Benoît XVI, Catéchèses, 15 décembre 2010  

Ste Véronique est la gloire féminine de l’Ordre des Capucins, comme son pendant, St Laurent de Brindes, Docteur de l’Église.

Sainte Véronique Giuliani (en italien Veronica Giuliani ou Veronica de Julianis ou Orsola Giuliani) est née le 27 décembre 1660 à Mercatello sul Metauro, dans la province de Pesaro et Urbino, dans les Marches, rentre chez les Capucines à 17 ans. Stigmatisée, elle meurt le 9 juillet 1727 à Città di Castello, dans la province de Pérouse, en Ombrie). Béatifiée le 17 juin 1804, et canonisée le 26 mars 1839.

Biographie

Source

L’exemple que nous a donné sainte Véronique Giuliani nous pousse à réfléchir sur la façon dont le bon Dieu se manifeste dans toute son omnipotence aux humbles, aux simples….

Que de saints même les plus proches de nous, en sont le témoignage… La question qui se pose est la suivante : comment peut-on nommer « Docteur de l’Église » quelqu’un qui ne sait rien de théologie ? C’est le cas de Véronique. La réponse est simple : Elle a eu le meilleur maître que l’on puisse désirer : Jésus. Il lui a fait vivre Sa Passion, a été son époux et, après la vie terrestre si difficile, l’a amenée avec Lui, au ciel. Pour Sainte Thérèse de Lisieux il s’est passé la même chose, en 1997 elle a été proclamée Docteur de l’Église, par Jean Paul II.

Véronique Giuliani montre l’importance de la souffrance si on l’offre à Dieu… si on la « joint » aux souffrances du Christ…. Cette souffrance, que nous fuyons toujours, a été le cœur de la vie de cette âme mystique qui a choisi de s’immoler comme victime pour le salut des âmes. Et nous, comment pourrions-nous nous comparer à ce personnage qui nous bouleverse et épouvante en même temps…. ? Nous devrions, peut-être, remettre en cause notre façon de penser, trop liée aux biens de ce monde, et, surtout, notre façon d’agir qui ne suit pas toujours la volonté divine….

Qui était Véronique… ?

Dans un paysage si ample de personnages extraordinaires, de saints doués de qualités exceptionnelles, non seulement à cause de leurs miracles (et qu’on vénère pour obtenir des grâces…), mais surtout à cause de leur grand amour pour Dieu qui les pousse à l’anéantissement total d’eux-mêmes Orsola Giuliani, appelée après avoir prononcé ses vœux, Véronique, , représente l’un des exemples les plus éclatants d’élévation spirituelle mais surtout de lutte épuisante contre sa corporéité, « la partie humaine » comme elle l’appelle, en vertu des visions et des inspirations que Jésus lui envoie pour qu’elle comprenne quels sont Ses desseins.

Elle n’a reculé devant aucun obstacle : même devant les peines corporelles les plus atroces que ses confesseurs, la croyant une créature du démon, lui infligeaient. Mais outre à désirer de souffrir toujours davantage, pour vivre dans son corps la passion envers son céleste époux et pour sauver les âmes du purgatoire, elle eut toujours une attitude de totale humilité et, surtout, d’obéissance envers ses pères spirituelles. C’est à cette obéissance qu’on doit la rédaction de son journal, que l’on peut trouver à la bibliothèque de Città di Castello où elle passa la plus grande partie de sa vie de religieuse au couvent des capucines ; il s’agit de 22.000 pages recueillies en dix tomes

Son confesseur, père Ubaldo Cappelletti, un oratorien, lui imposa, le premier, d’écrire son autobiographie, sans relire ni méditer sur ce qu’elle écrivait. Les confesseurs qui remplacèrent père Cappelletti ne cessèrent jamais de lui imposer de continuer à écrire. Elle ne leur désobéit jamais, malgré les nombreuses difficultés qu’elle rencontra au cours de la rédaction. Comme elle travaillait sans arrêt pendant toute la journée il lui arrivait souvent, en pleine nuit, de devoir écrire à nouveau des chapitres entiers.

Le journal fut publié dans les années 1895-1905, et monseigneur Annibale Maria di Francia (1851-1927) choisit le titre : Trésor caché. Pour les huit premiers tomes collabora un jésuite, père Pietro Pizzicarla ( 1895-1905 )pour les deux derniers le Prof. Umberto Bucchioni ( 1881-1946 ).

Le titre de cet ouvrage a une signification cachée : oui, un trésor caché, parce que c’est dans les endroits les plus cachés que se réfugient les huîtres qui contiennent les perles les plus rares … trésor caché, comme la vie de Véronique… renfermée dans un couvent, mais non pour cela détachée de la vie extérieure ; elle a fait siennes les fautes du monde entier et s’est soumise aux peines les plus rudes pour la conversion des pécheurs… et pourtant elle voulait être à l’écart, cachée…

Quant à ses stigmates qui déchiraient son corps et la faisaient souffrir énormément elle n’avait qu’une seule pensée dictée par sa grande humilité : pas de marques visibles sur son corps puisqu’elle jugeait être indigne de les avoir reçues. Tout à fait différents étaient les projets de Dieu à son égard : elle devait être l’image vivante de la passion du Christ, de la vraie âme qui brûle d’amour pour Lui…

Véronique a toujours « brûlé » d’amour pour son Époux. A sa Première Communion, le 2 février 1670, à l’âge de dix ans, un feu intense s’empara d’elle, et la sensation fut si belle et douce qu’en rentrant à la maison elle demanda à sa mère et à ses sœurs, combien de temps durerait cet « état ». C’est qu’elle ne se rendait pas compte, étant donné son jeune âge et sa simplicité innée, que le don qu’elle avait reçu n’était pas pour tous… c’était Jésus qui voulait qu’elle mène une vie hors du commun, à côté de Lui. Il l’avait déjà décidé quand elle était dans ses langes. Mais pour répondre à cet appel elle aurait dû être prête à souffrir énormément pendant toute sa vie.

On se demande l’influence que peut avoir sur nous Véronique, une Sainte douée d’une spiritualité immense. Comme il est dans nos habitudes de nous plaindre à tout moment pour n’importe quoi, nous oublions qu’il faut toujours remercier notre Seigneur pour tout ce qu’il nous a donné. Nous L’implorons pour obtenir ce qui nous plaît, sans songer que le but principal de notre existence c’est d’obéir à sa volonté et non pas d’exiger qu’Il se conforme à la nôtre…

Pour les croyants Véronique devrait représenter un exemple à émuler pour les nombreuses mortifications corporelles qu’elle s’est infligées et pour la grande valeur qu’elle donnait à la souffrance ; n’oublions pas que les savants du siècle passé la classèrent comme une folle et que son procès de canonisation fut très compliqué : comment aborderions-nous les épreuves douloureuses de notre vie si nous pensions non seulement de les offrir à Dieu, mais de participer par notre souffrance à la passion du Christ… ? Peut-être affronterions-nous plus paisiblement les adversités de la vie en nous unissant spirituellement à Jésus qui dans l’Évangile nous invite à porter le joug avec Lui…

Cette argumentation peut-être acceptée par ceux qui croient en Dieu, mais, il faut se rappeler que, outre à notre volonté , la véritable foi, pour exister, a besoin de la grâce divine qui n’est pas donnée à tous… quel message peut donner la vie de Sainte Véronique aux gens qui ne croient même pas dans une force surnaturelle… ?

Peut- être nous mènera-t-il vers une plus grande conscience de nous-mêmes, nous fera-t-il comprendre que nous ne sommes que de simples créatures douées d’une intelligence limitée, nous poussera-t-il vers une meilleure capacité d’introspection, en ne rien tenant pour acquis, en désignant, comme on l’a absurdement fait, Véronique comme un excellent sujet à étudier en psychiatrie. On l’a jugée une femme atteinte par des troubles du comportement, peut-être même par des psychoses réactives, et non comme un exemple d’altruisme et de vertu, exemple essentiel pour ceux qui sont convaincus que la vie ne se base pas sur la nourriture, sur l’achat de biens matériels et, surtout qu’elle ne cesse pas avec la mort.

Quelques aperçus sur sa biographie et sur sa spiritualité

Toute la vie de Sainte Véronique, depuis le giron maternel, est pleine de prodiges : pendant la grossesse sa mère Thérèse Mancini, femme très pieuse qui avait enfanté sept filles (deux mortes à la naissance), éprouvait une sensation inexplicable de « feu » dans son ventre. C’était comme si elle pressentait que l’enfant qui allait naître serait un être spécial… jamais un pareil instinct maternel n’a été plus digne de foi…

Orsola naquit le 27 décembre 1660 à Mercatello. Âgée de moins d’un an elle fut tellement frappée par une image de la Sainte Trinité qu’elle commença à marcher pour s’approcher d’elle et là elle demeura en sa contemplation pendant des heures, en pleine extase mystique. Sa mère et ses sœurs en furent témoins.

Si on voulait décrire tous les dons extraordinaires de cet enfant « prodige » il faudrait plusieurs tomes… C’est pourquoi on se bornera à indiquer les événements les plus éclatants qui nous aideront à comprendre la nature de notre sainte et sa capacité de cardioknosie, un don qu’elle avait eu du bon Dieu à sa naissance. En effet, un jour, âgée de moins d’un an, sa nourrice la tenait entre ses bras lorsqu’elle comprit qu’un vendeur allait les arnaquer en leur vendant de l’huile à un faux poids ; Véronique lui ordonna de peser juste et de faire bien attention parce que Dieu le regardait… Vous imaginez la tête du commerçant et des gens qui étaient là… ? À cet âge là… à cette époque là, (mais de nos jours aussi on serait fortement étonnés), les gens songèrent à un phénomène inexplicable, mais cela servit à faire réveiller la conscience endormie du vendeur malhonnête. D’ailleurs, n’oublions pas ce que nous disait Sainte Catherine de Syène, notre conscience est comparable à un chien qui ne cesse jamais d’aboyer : c’est la voix du bon Dieu, et tôt ou tard on va forcément l’écouter.

La petite grandissait à l’écoute des biographies des saints lues par sa mère. Elle fut particulièrement frappée par la vie de Sainte Rose de Lima, par son désir de s’immoler pour expier les péchés du monde ; par « sa folie d’amour » pour Jésus dont Orsola avait déjà vu l’image dans l’Hostie Consacrée… et ce n’est pas tout : son lien avec le Christ et l’Eucharistie était si singulier que, avant sa Première Communion, la petite comprenait à l’odeur qu’émanaient sa mère et ses sœurs, qu’elles venaient d’avoir reçu la Communion… et une folie s’emparait d’elle, elle courait dans l’appartement toute joyeuse poussée par l’espoir que bientôt elle aussi elle recevrait Jésus.

Âgée de moins de quatre ans un jour où le prêtre vint apporter l’Eucharistie à sa mère malade, elle exprima son désir de recevoir la Communion. Quand le prêtre lui répondit que c’était impossible car il n’avait qu’une seule hostie la petite riposta, en éblouissant tout le monde, que dans un « petit morceau », dans une moindre particule Jésus était toujours présent…

Qui pouvait lui avoir fait comprendre cette grande vérité sinon le Saint Esprit… ?!

Même si les enseignements de sa mère ont contribué à coup sûr à son éducation dans l’amour de Dieu et de son prochain (d’ailleurs deux de ses sœurs aussi se firent religieuses), sa façon d’aimer le Seigneur était fort étrange : elle désirait toujours davantage d’anéantir son ego, choisissait le chemin de la souffrance, surtout parce qu’elle était poussée par une grande envie de prendre sur elle les souffrances du Christ, jusqu’au point d’enlever, d’une manière fort naïve, étant donné son jeune âge, les clous des mains d’un grand Crucifix placé très haut, au risque de se faire vraiment mal… C’est qu’elle voulait s’habituer à la souffrance physique : un jour où une de ses sœurs coinça, sans le vouloir, ses doigts dans une porte, elle en fut heureuse, ne pleura pas, ne se désespéra pas puisque son seul but était d’offrir cette souffrance au bon Dieu.

Pendant son enfance elle aimait à construire de petits autels pour Jésus et la Sainte Trinité qu’elle vénérait et poussait tous ceux qui étaient autour d’elle, y compris les pauvres gens à qui elle donnait toujours de l’aumône, à en faire autant. Fort beau : elle aimait beaucoup les souliers que sa maman lui avait achetés mais un jour à la vue d’un pauvre et n’ayant rien à lui donner, voilà qu’elle enlève un de ses souliers et le lui donne. L’homme se plaint et lui dit qu’il ne sait que l’esprit de charité était si ardent chez elle qu’elle était capable d’en assujettir la partie « humaine » d’enfant attirée par les biens matériels aussi. Un témoignage nous est donné par un épisode fort beau : elle aimait beaucoup les souliers que sa maman lui avait achetés, un jour à la vue d’un pauvre et n’ayant rien à lui donner, voilà qu’elle enlève un de ses souliers et le lui donne. L’homme se plaint et lui dit qu’il ne sait que faire d’un seul soulier, sans trop y penser, elle resta nu-pieds…

Quelques années plus tard elle prit l’habitude de se confesser publiquement devant ses consœurs puisque, selon elle, ses défauts étaient nombreux et qu’elle se sentait coupable à cause de ses péchés. Mais un jour la Vierge Marie lui apparut pour lui dire de ne pas se sentir coupable puisque, depuis son enfance, elle avait été une fillette généreuse. Elle lui rappela l’affaire des souliers et lui avoua que c’était à son Fils qu’elle les avait donnés…

Malgré cela le chemin que la Vierge et Jésus lui avaient frayé était plein de douleurs et de souffrances, elle aurait dû les accepter avec patience, toujours dans le but d’être plus près de Celui qui, depuis son enfance, avait désiré être son Époux.

Les difficultés et les obstacles qu’elle eut à surmonter furent innombrables, soit à cause de sa nature humaine source de doutes qui lui faisaient apprécier les biens matériels, soit à cause de la forte opposition de la part de son père, Francesco, qui ne voulait pas qu’elle entre au couvent.

Sa mère mourut quand elle avait quatre ans et avant d’exhaler son dernier souffle, elle confia spirituellement ses cinq petites filles aux cinq plaies de Jésus, plaies que la petite Orsola « sentait » plus que tout autre puisqu’elle avait déjà eu une apparition de Jésus souffrant.

Resté veuf, son père s’établit à Plaisance où Orsola reçut sa Première Communion et commença à s’adonner toujours davantage à la prière, même si les gens qui l’entouraient la poussaient à mener une existence plus mondaine. Vers ses treize ans elle revint à Mercatello et là aussi elle ne cessa jamais de dire qu’elle voulait servir Dieu ; en tout cela elle était soutenue par les apparitions de Jésus qui lui imposait de rester « tranquille » parce qu’elle deviendrait son épouse.

Deux de ses sœurs étaient religieuses et l’une d’entre elles chercha à lui faire changer d’avis, en lui conseillant de s’ouvrir une famille, elle lui répondit promptement en disant que Sainte Chiara, ne fit pas d’obstacle, mais aida de toutes ses forces sa sœur Sant’Agnese qui voulait se dédier totalement à Dieu…

A 17 ans grâce à une lettre chargée de tristesse et de supplications, elle réussit à convaincre son père : le 17 juillet 1677, elle franchit le seuil du couvent des Capucines de Città del Castello, le 28 octobre endossa l’habit de l’ordre et le Ier novembre elle fit sa profession de foi.

A la cérémonie participèrent, dans l’espoir de la voir changer d’avis, beaucoup de jeunes hommes qui avaient demandé sa main et avaient reçu un ferme refus ; quelquefois elle avait même rendu de façon assez brusque les cadeaux qu’on lui avait apportés...

Elle ne fut pas capable de décrire même pas par de simples mots la joie qu’elle éprouva au moment de prononcer ses vœux : son rêve se réalisait : elle devenait enfin l’épouse du Christ. Dans cette occasion aussi une de ses consœurs la vit tomber en extase au moment de l’oraison.

Nous avons déjà dit que son prénom, Orsola, fut changé en celui de Véronique non seulement en l’honneur de la Véronique qui essuya le visage du Christ, mais aussi pour l’étymologie du mot qui signifie : « Vraie image » (dans son cas, « porteuse de vérité »…) et qui pouvait choisir le bon Dieu pour accomplir une pareille mission ?... mais Orsola naturellement … ?

Véronique a été une sainte extraordinaire : elle ne reculait devant aucune difficulté au nom de la vérité, même quand il était question de réalités qu’elle jugeait « brûlantes », comme, par exemple, les marques de la passion de Jésus sur son corps. Non seulement elle pensait être indigne de les avoir reçues, mais ce qu’elle craignait c’était que le démon pouvait en être la cause. Il est sous entendu que le fait d’en parler avec ses confesseurs lui créait beaucoup de soucis ;…

L’obéissance, la soumission la guidèrent pendant toute sa vie l’emportant sur tous les soucis de nature humaine ; elle eut à surmonter un grand obstacle : sa pudeur quand elle dut montrer sa blessure au flanc aux prêtres qui comprirent enfin que ces phénomènes n’étaient pas de nature diabolique mais divine. Tout au début, croyant à l’intervention du démon, on la renferma dans sa cellule sans lui donner l’Eucharistie.

C’était sa façon d’agir qui aurait dû faire comprendre qu’elle n’était pas possédée par des esprits malins : elle était toujours humble, toujours prête à accomplir sans hésitation les services les plus humbles et les plus épuisants ; elle ne sentait pas la fatigue tout en étant assez maladive. Quand elle fut élue maîtresse des novices en 1694, et plus tard abbesse, elle pensait être indigne de recevoir une charge pareille (d’ailleurs elle-même se définissait une âme « ingrate » à qui le bon Dieu avait élargi tant de grâces…). Elle passa trente-trois ans avec les novices ; en 1716 on la nomma abbesse et cela dura onze ans, jusqu’au 7 juin 1727 où elle fut atteinte par un coup d’apoplexie. Elle revint à la vie simple de religieuse mais son boulot fut toujours des plus fatigants…

Pendant la période où elle fut abbesse au couvent, Véronique ne fit rien manquer à ses consœurs, ni du point de vue matériel, ni du point de vue spirituel. Les gens qui travaillaient au couvent étaient payés au juste. Elle voulait suivre l’exemple de celui qu’elle appelait le « père » Saint François, et dans ce but elle demanda à son Évêque d’administrer lui même l’argent du couvent pour lui permettre de vivre en toute pauvreté. Au nom de la pauvreté elle endossait des vêtements très usés et se servait de couvertures encore plus abîmées. Naturellement elle n’imposait pas à ses consœurs son style de vie.

Véronique renonçait très souvent à se nourrir pour expier les péchés du monde entier et pour le salut des âmes du purgatoire, c’était Dieu qui le voulait et quand ses confesseurs le comprirent, ils la laissèrent enfin libre de jeûner tant qu’elle le voulait.

Ses confesseurs eurent encore une autre preuve qu’elle ne faisait que ce que notre Seigneur lui demandait quand ils se rendirent compte de l’effet bénéfique d’une liqueur miraculeuse que Jésus lui avait donnée pour qu’elle s’alimente, sans parler de sa mine qui masquait fort bien ses souffrances corporelles…

Quand ses confesseurs s’étaient enfin convaincus que le bon Dieu lui avait envoyé les stigmates, voilà qu’après sa mort ils découvrent des marques sur son corps, et c’est à ce moment-là qu’ils comprennent qu’elle s’infligeait des peines corporelles très douloureuses. Elle souffrait, oui, et même énormément, mais son visage exprimait toujours une grande sérénité et sa façon de parler aux autres était toujours joviale. Une lumière particulière enveloppait sa personne comme sa « sainte mère » Claire dont le visage s’illuminait, très souvent, quand elle priait. Et que dire alors de l’exemple qu’elle donnait à ses consœurs ? : grâce à son caractère très doux elles l’admiraient de plus en plus, , sans parler de son humilité et de sa façon de supporter les souffrances : tout était dicté par son grand amour envers Dieu.

Qu’on se souvienne du morceau de l’Évangile où Jésus dit : « Et quand vous jeûnez ne prenez pas un air mélancolique comme le font les hypocrites qui changent de mine pour que les autres remarquent qu’ils jeûnent. En vérité je vous dis : ils ont déjà reçu leur récompense. Toi, par contre, quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage afin que les gens ne se rendent pas compte que tu jeûnes, ton père seulement connaît ton secret ; et ton Père qui voit dans ton secret va te récompenser » [1].

Au cours de sa vie Véronique nous a donné un témoignage extraordinaire de l’acceptation de la souffrance : elle souffrait énormément, mais les autres ne devaient voir aucune marque de cette souffrance sur son visage, ni ne devaient la féliciter s’ils s’en apercevaient. Malgré son état de santé des plus maladifs, elle soignait constamment ses consœurs infirmes et supportait, non seulement, les malaises causés par leur état de santé, mais leur mauvaise humeur aussi… Il y en avait une, en particulier, qui, toutes les fois où Véronique allait la voir et donc la soigner, ne faisait que l’insulter, mais l’attitude de la sainte, toujours calme et tendre, lui fit comprendre l’absurdité de son comportement. En effet, avant de mourir elle la pria de la pardonner. Mais que pouvaient représenter des phrases méchantes, des plaies à l’odeur nauséabonde et le travail incessant si l’on songeait au sacrifice sur la croix du Christ… ?!

Voilà la pensée qui l’a accompagnée pendant toute sa vie : le désir de se conformer en tout au Christ, sachant être une créature humaine et donc finie face à l’Être infini. Son journal, qui est un testament spirituel extraordinaire, montre sa recherche non de la souffrance en elle-même, mais d’une souffrance qui doit compléter la passion du Christ. En outre elle était bien convaincue d’être une « pécheresse » tandis que, d’après ce que disaient ses pères spirituels, elle n’avait que de tous petits défauts... Un autre exemple de simplicité et d’humilité est représenté par les nombreuses confessions publiques où elle demandait pardon à ses consœurs d’avoir été un mauvais exemple pour elles et se définissait la plus « misérable » d’entre elles…

Les miracles qu’elle fit de son vivant ne servirent pas à lui faire comprendre qu’elle n’était pas si « misérable » que ça. Quand elle fut abbesse elle fit d’autres miracles : la multiplication des fruits, des œufs et du fromage. Nombreuses furent les preuves que ses confesseurs et ses consœurs eurent de sa façon de lire dans leurs cœurs, en effet il lui arrivait de devancer leurs pensées et de leur parler d’évènements qui concernaient leur avenir. Tous ces dons, y compris celui de la prophétie ne faisaient que lui faire louer le bon Dieu, puisqu’elle comprenait que c’était Lui l’auteur de tant de prodiges et qu’elle n’avait qu’à faire Ses volontés.

Que de choses nous pourrions apprendre de son attitude si humble… Il est dans notre naturel de vouloir toujours être au premier rang, mais quelquefois nous oublions que c’est au bon Dieu que nous devons tous nos dons et que s’Il ne l’avait pas voulu nous ne serions même pas sur cette terre… Nous savons fort bien que le mal est contagieux mais, heureusement il en est de même pour le bien. En effet dans le monastère où vécut Véronique beaucoup de ses disciples, parmi lesquelles Maria Maddalena Boscaini (1704-1765) et Florida Cevoli (1685-1767) sont mortes en odeur de sainteté.

Véronique avait un don inné pour préparer ses filles spirituelles à leur rencontre avec le bon Dieu : sévérité et austérité dominaient chez elle mais quand il était question des autres elle était d’une tendresse extrême, et avec la même tendresse elle soignait leur âme et leur corps. C’est pourquoi ses filles spirituelles avaient une confiance extrême en Véronique et lui confiaient leurs pensées les plus secrètes, ce qui lui permettait de leur donner de bons conseils.

Véronique aimait ceux qui étaient à côté d’elle, son prochain et même les « infidèles » et au nom de cet amour elle priait notre Seigneur de lui permettre de prendre sur soi tous les maux de ce monde dans le but de voir guérir les malades, de sauver les âmes du purgatoire et pour la conversion du monde entier.

Comme elle avait eu la vision de l’enfer et du purgatoire et en avait été bouleversée, elle demanda au bon Dieu d’être placée juste « au seuil de l’enfer » prête à supporter n’importe quel supplice dans le but de sauver les âmes. Il ne faut pourtant pas croire, et l’on se tromperait fortement, que pour songer à la spiritualité, elle délaissait les aspects matériels : elle guida fort bien le monastère, en agrandit le dortoir, fit passer l’eau par la cuisine, l’infirmerie et songea à l’irrigation du verger ; en outre elle fit ériger une chapelle dédiée à la Vierge du Rosaire.

Ses écrits et les « attaques » du démon

Le démon ne pouvait pas rester indifférent à tout ce qu’elle faisait contre lui et la persécutait de mille manières dans l’espoir de lui faire abandonner ses saintes intentions. Puisque les épreuves qu’elle avait à affronter tous les jours étaient bien pénibles il espérait toujours dans une défaillance de sa part. Comme il avait fait avec tant d’autres saints, qui avaient laissé bien des témoignages, il lui rendait la vie impossible et souvent prenait l’aspect de son ange gardien ou du Christ.

Mais il suffisait d’un seul mot à Véronique pour comprendre que c’était lui. Elle en parlait toujours à ses confesseurs dans la crainte de confondre les apparitions divines avec des signes diaboliques. Dans toutes ses vicissitudes elle fut aidée par ses pères spirituels et par la Sainte Vierge qui ne cessa jamais, pendant toute sa vie, de lui faire ressentir son amour maternel. Elle l’a même aidée contre les attaques du démon qui avait l’habitude de détruire ses écrits, mais elle était toujours prête à le combattre et, pendant la nuit, elle recommençait à écrire ce qu’il lui avait détruit.

La Vierge ne l’abandonna jamais, dans une vision Elle lui promit de l’aider à rédiger son journal et à diriger le couvent. En 1700 et en 1714, le Saint-Office la sépara de la communauté, mais la ségrégation n’était rien en comparaison du fait qu’on lui interdit de recevoir la Communion : mais… Miracle… La Sainte Eucharistie lui fut apportée par les Anges et par le Christ lui-même.

On l’avait condamnée parce que même si on savait que chez elle il se passait quelque chose de prodigieux on était poussé à croire qu’elle simulait ou, encore pire, qu’elle était possédée par le démon. Mais cela ne dura pas pour longtemps. Ceux qui lui avaient infligé les supplices les plus atroces comprirent enfin que devant eux il n’y avait pas une créature possédée par le démon mais une sainte.

A la lecture des poésies de Sainte Véronique ce n’est sûrement pas l’ars poetandi, qui frappe le lecteur mais une grande simplicité, on se rend vite compte qu’on a à faire à une créature extraordinaire et l’on songe très vite à ce que disait Jésus : « En vérité je vous dis : si vous ne vous convertissez pas et ne redevenez pas des enfants, vous n’entrerez pas au royaume des cieux : Donc quiconque se fera petit comme cet enfant, sera le plus grand au royaume des cieux » [2].

Sainte Véronique est un exemple éclatant de l’action du Saint Esprit : quand elle supplia le prélat de lui permettre de faire partie de l’ordre des capucines, celui-ci lui demanda de lire un morceau de l’Écriture Sainte en latin, langue que Véronique ne connaissait pas. L’étonnement des gens qui étaient là, y compris son oncle, fut immense : c’était comme si elle avait, depuis toujours, connu le latin, sa prononciation fut parfaite … C’est que Jésus, dans une apparition, lui avait ordonné de ne lire qu’en lui-même…

C’est ce qu’on remarque à la lecture de ses écrits chargés de spiritualité et caractérisés par son grand amour pour le Christ qui est décrit avec une tendresse extrême. En lisant ces poésies on a l’impression d’assister à l’épanouissement du premier amour d’un adolescent qui, pourtant, n’a rien à voir avec ce qu’éprouvait Véronique : c’est tout autre chose, c’est un sentiment qui a la profondeur du véritable « feu » de l’amour immortel. Au couvent les religieuses prirent la belle habitude de chanter ou de réciter ses écrits avant le carême ou pendant les périodes de pénitence ; il y en a qui sont sous forme de dialogue entre plusieurs personnages, cela pour permettre à beaucoup de religieuses de prendre partie aux représentations.

Pendant toute la période de sa vie de religieuse Sainte Véronique suivit avec tendresse et amour la croissance spirituelle de ses consœurs. Elle ne les obligea pas à subir ses mêmes épreuves, mais cherchait, par sa parole, et surtout sa conduite, à les inciter à aimer Dieu par-dessus tout. Elle était très jeune quand elle entra au couvent et confia à la mère abbesse que, pendant la nuit, elle ne pouvait s’empêcher de pleurer à la pensée qu’il pouvait y avoir quelqu’un qui la dépassait dans son amour pour le Seigneur…

Et sur cela il faudrait s’arrêter un instant pour essayer de comprendre ce contresens : étant donné son grand amour pour notre Seigneur pourquoi souffrait-elle à la pensée qu’on pouvait L’aimer plus qu’elle ?! La réponse nous est fournie par la lecture de son journal où elle souhaite que tout le monde aime Dieu ; sa souffrance venait du fait qu’elle se sentait toujours « coupable » d’être loin de Lui à cause de ses péchés.…

Sainte Véronique a écrit beaucoup de poésies dont le sujet est représenté par le conflit éternel entre la « chair » et l’esprit,, ce qui a été amplement traité par Saint Paul : « La chair a des envies contraires à l’Esprit, et L’Esprit a des envies contraires a la chair. Ces deux choses s’opposent réciproquement, de sorte que vous ne faites pas ce que vous auriez envie de faire » [3] et encore : « Je trouve donc en moi cette loi : quand je veux faire du bien, le mal est à côté de moi… » [4].

Le journal de Sainte Véronique est plein d’écrits qui concernent ce thème et surtout ces combats intimes qui aboutissent à la victoire de sa sainteté, fruit de l’action du Saint Esprit. Elle a écrit le poème qui suit toute jeune, pendant qu’elle s’occupait du ménage et l’a déclamé, pendant la période qui précède le carême, en compagnie de sa consœur mère Chiara Felice.

Pendant le procès de canonisation ses confesseurs qui lui avaient infligé tant de tourments furent les défenseurs les plus acharnés de ses vertus. Ils témoignèrent de la véridicité des marques miraculeuses que Véronique avait sur son corps : la blessure au flanc, la couronne d’épines, les Stigmates ; il est à remarquer que les marques de la Passion étaient imprimées dans son cœur (elle avait demandé à une de ses consœurs de les dessiner) et qu’au moment de l’autopsie on les découvrit.

Malgré les marques « extérieures » qui contribuaient à faire d’elle un être spécial, ce qui a influé sur sa figure de médiatrice et, surtout, de victime immolée pour le salut des autres, c’était son désir de faire éprouver à toutes les âmes un amour envers Dieu si fort au point de les pousser à Le servir et à s’éloigner du péché.

Tout ce qu’elle faisait était au nom de « la gloire de Dieu ». Quant à ses fautes, même les plus petites, elle cherchait toujours, tout en les reconnaissant, à les corriger ; ainsi faisant elle poussait ses consœurs à suivre son exemple, jamais elle ne les reprochait ni ne les vexait mais tendrement et humblement elle veillait à ce que leur esprit s’élève.

On pourrait parler longtemps de cette Sainte qui, pendant 57 ans a donné l’exemple de comment il faut aimer Dieu et notre prochain jusqu’au point de s’anéantir totalement. Mais il y a plein de livres sur elle, on se bornera donc à étudier quelques-uns de ses écrits et le jour de sa mort où elle s’est enfin réunie à son Divin Époux.

Comme on l’a déjà dit son journal est le témoignage le plus important de toute son existence. Il comprend des lettres (dont quelques-unes ne sont pas repérables puisqu’on en a fait des reliques) et plusieurs poésies religieuses où il est toujours question de « son amour pour Dieu, fou, brûlant et ardent ».

A la lecture de ses poésies on reste charmé, fasciné : tout est écrit de manière simple, loin d’elle le désir d’écrire un traité philosophique. Quant à sa valeur spirituelle elle mériterait d’être élue Docteur de l’Église, tout comme Sainte Catherine de Syène

Véronique mourut le 9 juillet 1727, son agonie fut terrible et dura 33 jours : c’était ce que Jésus lui avait prophétisé. Même avant de mourir son comportement fut des meilleurs : elle demanda même la permission de mourir à son confesseur et ainsi faisant elle se montra obéissante jusqu’au dernier moment de sa vie.…

Le Pape Pie VII la béatifia le 8 juin 1804, Grégoire XVI la canonisa le 26 mai 1839 au bout d’un long procès où l’on examina minutieusement tous les innombrables phénomènes mystiques qui la concernaient ; tout cela pour que les illuministes du siècle n’accusent pas l’église d’une excessive crédulité.

A la lecture de ses écrits il résulte toujours son immense amour pour Jésus joint à l’acceptation des souffrances qui l’unissaient à Lui ; on remarque encore le lien indissoluble qui l’avait liée à son Époux tant aimé depuis son enfance. Dans son journal il y a beaucoup de témoignages de ses visions où Jésus lui parle pendant qu’elle Le contemple extasiée et étonnée en même temps.

Pour pouvoir en comprendre sa véritable signification il faut la rattacher à son journal tout entier, à toute sa vie de mystique qui s’offrit comme victime pour l’expiation des péchés de l’humanité tout entière.

Ce sentiment d’altruisme n’a rien à voir avec le pur masochisme ou avec le fait d’être des malades mentaux. Ici, il n’est pas question d’un cas de psychiatrie comme l’ont cru ceux qui, d’après leurs convictions ne croient pas aux phénomènes surnaturels. Il s’agit de la réalité d’une créature humaine qui s’est élevée en dessus des autres et a choisi de vivre dans l’amour de Dieu et de son prochain. Et dans le but de servir le Seigneur et d’obtenir tant de bienfaits pour les autres, elle a accepté toutes les souffrances le sourire aux lèvres.

La vie acquiert sa vraie signification si l’on comprend qu’il faut servir Dieu…c’est ce que nous tous, nous devrions comprendre…

C’est ce que font les membres de l’l’Apostolat de la Prière, ils offrent tous les jours leurs actions, leurs souffrances et leurs joies au Seigneur et, sans jamais oublier la présence du Saint Esprit, ils font en sorte que leur existence acquière une valeur divine. C’est ce que prêchait le Pape Paul VI, il disait qu’on ne peut rien faire sans la grâce divine : c’est elle qui engendre de véritables transformations.

On ne peut pas se passer, après avoir parlé un peu de l’« univers spirituel » de Sainte Véronique, d’examiner le mot : « Per crucem ad lucem », où l’accent n’est pas seulement posé sur les « croix » qu’il faut porter pour atteindre à la lumière éternelle, mais sur la grandeur du bien où l’on aboutit au bout de ce parcours.

Comme exemple il suffit de rappeler que lorsque Véronique reçut les Stigmates, le 5 avril 1697, le Seigneur lui apparut dans toute Sa gloire : de Ses plaies sortirent des rayons lumineux qui frappèrent son corps, d’où les saintes blessures. C’était comme si le bon Dieu avait voulu graver à son âme la certitude qu’après tant de souffrances il y aurait eu une une grande récompense.

D’ailleurs il est à remarquer qu’à plusieurs reprises quand Jésus lui demandait quel était son plus grand désir, Sainte Véronique Lui répondait toujours : « Je ne voudrais jamais me séparer de Vous » ; Nous pouvons être sûrs que son « rêve » s’est réalisé le 9 juillet 1727 quand son âme a quitté la terre.

Pour conclure…

De nos jours, où l’on se plaint d’avoir égaré « les vraies valeurs » pour poursuivre de faux dieux, Sainte Véronique en offrant ses énormes souffrances à Dieu nous fait comprendre l’importance de la vie si nous sommes capables d’offrir chagrins et joies à Notre Seigneur.

Mais ce qu’il ne faut absolument pas faire c’est d’accuser « l’époque contemporaine » de nos insatisfactions : de tout temps il y a toujours eu des ennuis, des souffrances et de tout ce qui, de nos jours aussi, nous chagrine…mais, malgré cela, il y a toujours eu des personnages extraordinaires comme Sainte Véronique. Des murs de son couvent elle a contribué a diffuser un grand message de salut : l’importance de la souffrance et du véritable amour pour notre Seigneur.

Les derniers mots qu’elle prononça, à la pointe du jour du 9 juillet 1727, en s’adressant à un groupe de religieuses, furent les suivants : « L’amour s’est fait retrouver ! Voilà la cause de ma souffrance : dites-le à toutes vos consœurs ! » [5]

On oublie souvent, étant donné notre vie frénétique, ce que Dieu doit être pour nous : Dieu est amour, un amour immense… il ne s’agit pas d’un Dieu juge et punisseur, comme on le remarque à la lecture de l’Ancien testament, et encore moins d’un Dieu instigateur ou provocateur de guerres, comme le pensent encore certains fanatiques…

Dans l’Encyclique : « Deus caritas est », notre Pape Benoît XVI a justement voulu réaffirmer le concept que Dieu est amour et que dans son immense amour il nous laisse libres d’accepter ou de refuser le grand don qu’Il nous fait. Il ne nous oblige pas à L’aimer, c’est à nous de choisir ! …mais qui pourrait refuser d’être dans les bras d’un Père si tendre… ?!

Peut-être ceux qui Le croient responsable de tous leurs malheurs ? Mais voilà l’importance qu’il faut donner à l’étude de personnages tels que celui de Sainte Véronique Giuliani : ne pas songer à la souffrance en elle-même, mais pour ce qu’elle est, c’est-à-dire projetée vers un autre univers spirituel qui est, en définitive, réel. Nous aimons à penser qu’aujourd’hui aussi, peut-être dans les lieux les plus impensables, tant d’autres personnes, en vivant avec grande humilité, contribuent au dessin de Dieu, et s’efforcent d’entreprendre un véritable chemin vers la sainteté dont Sainte Véronique, comme tant d’autres saints, a été un véritable témoin.

Textes de la Messe, supplément du Missel Pro aliquibus locis

Textes de la messe ‘Pro aliquibus Locis’ que tout prêtre peut prendre en ce jour selon le code des rubriques de 1962 [*].

die 9 iulii
le 9 juillet
SANCTÆ VERONICÆ DE IULIANIS
SAINTE VÉRONIQUE GIULIANI
Virg.
Vierge
Missa Dilexísti, de Communi Virginum 3 loco, cum orationibus ut infra :Messe Dilexísti, du Commun des Vierges 3, avec les oraisons ci-dessous :
Ant. ad Introitum. Ps. 44, 8.Introït
Dilexísti iustítiam, et odísti iniquitátem : proptérea unxit te Deus, Deus tuus, óleo lætítiae præ consórtibus tuis. (T.P. Allelúia, allelúia.)Vous avez aimé la justice et haï l’iniquité : c’est pourquoi, Dieu, votre Dieu, vous a oint d’une huile d’allégresse d’une manière plus excellente que toutes vos compagnes. (T.P. Alléluia, alléluia.)
Ps. Ibid., 2.
Eructávit cor meum verbum bonum : dico ego ópera mea Regi.De mon cœur a jailli une excellente parole : c’est que j’adresse mes œuvres à un roi.
V/.Glória Patri.
Oratio.Collecte
Dómine Iesu Christe, qui beátam Verónicam Vírginem passiónis tuæ signis mirábilem effecísti : concéde propítius ; ut, carnem crucifigéntes, ad gáudia ætérna perveníre mereámur : Qui vivis et regnas. Seigneur Jésus-Christ, vous avez rendu admirable la bienheureuse Vierge Véronique par les signes de votre passion : accordez-nous favorablement de mériter de parvenir aux joies éternelles en crucifiant notre chair.
Léctio Epístolæ beáti Pauli Apóstoli ad Corínthios.Lecture de l’Épître de saint Paul Apôtre aux Corinthiens.
2. Cor. 10, 17-18 ; 11, 1-2.©AEL 1964 [6]
Fratres : Qui gloriátur, in Dómino gloriétur. Non enim, qui seípsum comméndat, ille probátus est ; sed quem Deus comméndat. Utinam sustinerétis módicum quid insipiéntiæ meæ, sed et supportáte me : ǽmulor enim vos Dei æmulatióne. Despóndi enim vos uni viro vírginem castam exhibére Christo.Frères, « Celui qui se glorifie, qu’il se glorifie dans le Seigneur » [7]. Ce n’est pas celui qui se recommande lui-même qui a de la valeur, c’est celui que le Seigneur recommande. Si vous pouviez supporter de ma part un peu de folie ! Eh bien oui, supportez-moi ! J’ai pour vous en effet une jalousie divine. Car je vous ai fiancés à un époux unique, pour vous présenter au Christ comme une vierge pure.
Graduale. Ps. 44, 5.Graduel
Spécie tua et pulchritúdine tua inténde, próspere procéde et regna.Avec votre gloire et votre majesté, avancez, marchez victorieusement et régnez.
V/. Propter veritátem et mansuetúdinem et iustítiam : et dedúcet te mirabíliter déxtera tua.V/. Pour la vérité, la douceur et la justice : et votre droite vous conduira merveilleusement.
Allelúia, allelúia. V/. Ibid., 15 et 16. Adducéntur Regi Vírgines post eam : próximæ eius afferéntur tibi in lætítia. Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. Des vierges seront amenées au roi après vous : vos compagnes seront présentées au milieu de la joie et de l’allégresse. Alléluia.
Post Septuagesimam, ommissis Allelúia et versu sequenti, diciturAprès la Septuagésime, on omet l’Alléluia et son verset et on dit :
Tractus. Ps. 44, 11 et 12.Trait
Audi, fília, et vide, et inclína aurem tuam : quia concupívit Rex spéciem tuam.Écoutez, ma fille, et prêtez l’oreille : car le roi s’est épris de votre beauté.
V/. Ibid. 13 et 10. Vultum tuum deprecabúntur omnes dívites plebis : fíliæ regum in honóre tuo.V/. Tous les riches d’entre le peuple prieront devant votre visage : les filles des rois dans votre gloire.
V/. Ibid., 15 et 16. Adducéntur Regi Vírgines post eam : próximæ eius afferéntur tibi.V/. Des vierges seront amenées au roi après vous : vos compagnes seront présentées au roi.
V/. Afferéntur in lætítia et exsultatióne : adducántur in templum Regis.V/. Elles seront présentées dans la joie et l’allégresse : elles seront conduites au temple du roi.
Tempore paschali omittitur graduale, et eius loco dicitur :Au Temps pascal, on omet le graduel et à sa place on dit :
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 44, 15 et 16. Adducéntur Regi Vírgines post eam : próximæ eius afferéntur tibi in lætítia.Allelúia, allelúia. V/. Des vierges seront amenées au roi après vous : vos compagnes seront présentées dans la joie et l’allégresse.
Allelúia. V/. Ibid., 5. Spécie tua et pulchritúdine tua inténde, próspere procéde et regna. Allelúia.Allelúia. V/. Avec votre gloire et votre majesté, avancez, marchez victorieusement et régnez. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Matthǽum.Suite du Saint Évangile selon saint Mathieu.
Matth. 25, 1-13.©AEL 1964 [8]
In illo témpore : Dixit Iesus discípulis suis parábolam hanc : Simile erit regnum cælórum decem virgínibus : quæ, accipiéntes lámpades suas, exiérunt óbviam sponso et sponsæ. Quinque autem ex eis erant fátuæ, et quinque prudéntes : sed quinque fátuæ, accéptis lampádibus, non sumpsérunt óleum secum : prudéntes vero accepérunt óleum in vasis suis cum lampádibus. Moram autem faciénte sponso, dormitavérunt omnes et dormiérunt. Média autem nocte clamor factus est : Ecce, sponsus venit, exíte óbviam ei. Tunc surrexérunt omnes vírgines illæ, et ornavérunt lámpades suas. Fátuæ autem sapiéntibus dixérunt : Date nobis de óleo vestro : quia lámpades nostræ exstinguúntur. Respondérunt prudéntes, dicéntes : Ne forte non suffíciat nobis et vobis, ite pótius ad vendéntes, et émite vobis. Dum autem irent émere, venit sponsus : et quæ parátæ erant, intravérunt cum eo ad núptias, et clausa est iánua. Novíssime vero véniunt et réliquæ vírgines, dicéntes : Dómine, Dómine, áperi nobis. At ille respóndens, ait : Amen, dico vobis, néscio vos. Vigiláte ítaque, quia nescítis diem neque horam.En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples cette parabole : « Le royaume des cieux sera comparable à dix vierges qui prirent leurs lampes et sortirent à la rencontre de l’époux. Cinq d’entre elles étaient étourdies et cinq étaient prudentes. Les étourdies, en prenant leurs lampes, n’emportèrent pas d’huile ; tandis que les prudentes prirent de l’huile dans des récipients avec leurs lampes. Comme l’époux tardait à venir, elles s’assoupirent toutes, et s’endormirent. Au milieu de la nuit, il y eut un cri : « Voici l’époux qui vient ! Allez à sa rencontre ! » Alors toutes ces vierges s’éveillèrent et apprêtèrent leurs lampes. Les étourdies s’adressèrent aux prudentes : « Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s’éteignent ». Mais les prudentes répondirent : « Il n’y en aura jamais assez pour nous et pour vous. Allez plutôt chez les marchands, et achetez-en pour vous ». Or, pendant qu’elles allaient en acheter, l’époux arriva. Celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et on ferma la porte. Plus tard, les autres vierges arrivèrent aussi et dirent : « Seigneur, Seigneur, ouvre-nous ! » Mais il répondit : « En vérité, je vous le dis, je ne vous connais pas ». Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure ».
Ant. ad Offertorium. Ps. 44, 10.Offertoire
Fíliæ regum in honóre tuo, ástitit regína a dextris tuis in vestítu deauráto, circúmdata varietate. (T.P. Allelúia.)Les filles des rois sont dans votre gloire, la reine se tient à votre droite en vêtements tissés d’or, couverte de broderies. (T.P. Alléluia.)
SecretaSecrète
Súscipe, miséricors Deus, quas tibi humíliter offérimus, laudis hóstias : et, interveniénte beáta Verónica Vírgine tua, fac eas nobis ad perpétuum proveníre subsídium. Per Dóminum.Dieu miséricordieux, recevez ces hosties de louange que nous vous offrons humblement : et par l’intercession de la bienheureuse Véronique votre Vierge, faites qu’elles nous soient un secours pour l’éternité.
Ant. ad Communionem. Matth. 25, 4 et 6.Communion
Quinque prudéntes vírgines accepérunt óleum in vasis suis cum lampádibus : média autem nocte clamor factus est : Ecce, sponsus venit : exite óbviam Christo Dómino. (T.P. Allelúia.)Cinq vierges sages prirent de l’huile dans leurs vases avec leurs lampes : et au milieu de la nuit, un cri se fit entendre : Voici l’époux qui vient : allez au-devant du Christ Seigneur. (T.P. Alléluia.)
PostcommunioPostcommunion
Cælésti múnere roborátos fac nos, quǽsumus, Dómine, Deus noster : beátæ Verónicæ Vírginis tuæ et exémplis ínstrui, et patrocíniis adiuvári. Per Dóminum.Fortifiés par le don céleste, accordez-nous, nous vous en prions, Seigneur notre Dieu, d’être enseignés par les exemple de la bienheureuse Véronique votre Vierge et d’être secourus par son patronage.

Benoît XVI, Catéchèses, 15 décembre 2010

Chers frères et sœurs,

Je voudrais présenter aujourd’hui une mystique qui n’est pas de l’époque médiévale ; il s’agit de sainte Véronique Giuliani, une moniale clarisse capucine. La raison en est que le 27 décembre prochain nous fêterons le 350ème anniversaire de sa naissance. Città di Castello (Italie), le lieu où elle vécut la majeure partie de sa vie et où elle mourut, tout comme Mercatello — son village natal — et le diocèse d’Urbin, vivent avec joie cet événement.

Véronique naît donc le 27 décembre 1660 à Mercatello, dans la vallée du Metauro, de Francesco Giuliani et Benedetta Mancini ; elle est la dernière de sept sœurs, dont trois autres embrasseront la vie monastique ; elle reçoit le nom d’Ursule. A l’âge de sept ans, elle perd sa mère, et son père part s’installer à Piacenza comme surintendant des douanes du duché de Parme. Dans cette ville, Ursule sent grandir en elle le désir de consacrer sa vie au Christ.

L’appel se fait de plus en plus pressant, si bien qu’à 17 ans, elle entre dans la stricte clôture du monastère des clarisses capucines de Città di Castello, où elle demeurera toute sa vie. Elle y reçoit le nom de Véronique, qui signifie « image véritable » et, en effet, elle devient l’image véritable du Christ crucifié. Un an plus tard elle prononce sa profession religieuse solennelle : pour elle commence le chemin de configuration au Christ à travers beaucoup de pénitences, de grandes souffrances et plusieurs expériences mystiques liées à la Passion de Jésus : le couronnement d’épines, le mariage mystique, la blessure au cœur et les stigmates. En 1716, à 56 ans, elle devient abbesse du monastère et sera reconfirmée dans ce rôle jusqu’à sa mort, en 1727, après une terrible agonie de 33 jours, qui culmine dans une joie profonde, si bien que ses dernières paroles furent : « J’ai trouvé l’Amour, l’Amour s’est laissé voir ! C’est la cause de ma souffrance. Dites-le à toutes, dites-le à toutes ! » [9]. Le 9 juillet, elle quitte sa demeure terrestre pour la rencontre avec Dieu. Elle a 67 ans, cinquante desquels passés dans le monastère de Città di Castello. Elle est proclamée sainte le 26 mai 1839 par le Pape Grégoire XVI.

Véronique Giuliani a beaucoup écrit : des lettres, des textes autobiographiques, des poésies. La source principale pour reconstruire sa pensée est toutefois son Journal, commencé en 1693 : vingt-deux mille pages manuscrites, qui couvrent une période de trente-quatre ans de vie de clôture. L’écriture coule avec spontanéité et régularité, on n’y trouve pas de ratures ou de corrections, ni de signes de ponctuation ou de division en chapitres ou parties selon un dessein préalable. Véronique ne voulait pas composer une œuvre littéraire : elle fut obligée par le Père Girolamo Bastianelli, religieux de Saint-Philippe, en accord avec l’évêque diocésain Antonio Eustachi, de mettre ses expériences par écrit.

Sainte Véronique a une spiritualité fortement christologique et sponsale : c’est l’expérience d’être aimée par le Christ, Époux fidèle et sincère, et de vouloir y répondre avec un amour toujours plus intense et passionné. En elle, tout est interprété dans une perspective d’amour, et cela lui donne une profonde sérénité. Toute chose est vécue en union avec le Christ, par amour pour lui et avec la joie de pouvoir Lui démontrer tout l’amour dont est capable une créature.

Le Christ auquel Véronique est profondément uni est le Christ souffrant de la passion, la mort et la résurrection ; c’est Jésus dans l’acte de s’offrir au Père pour nous sauver. De cette expérience dérive aussi l’amour intense et souffrant pour l’Église, sous la double forme de la prière et de l’offrande. La sainte vit dans cette optique : elle prie, elle souffre, elle cherche la « pauvreté sainte », comme une « expropriation », une perte de soi [10], pour être précisément comme le Christ qui a tout donné de lui-même.

A chaque page de ses écrits, Véronique recommande quelqu’un au Seigneur, dans des prières d’intercession et par l’offrande d’elle-même dans toute souffrance. Son cœur s’ouvre à tous « les besoins de la Sainte Église », en vivant avec anxiété le désir de salut de « tout l’univers et du monde » [11]. Véronique s’écrie : « O hommes et femmes pécheurs... tous et toutes venez au cœur de Jésus ; venez au bain de son précieux sang... Il vous attend les bras ouverts pour vous embrasser » [12]. Animée d’une ardente charité, elle apporte à ses sœurs du monastère attention, compréhension, pardon ; elle offre ses prières et ses sacrifices pour le Pape, son évêque, les prêtres, et pour toutes les personnes dans le besoin, y compris les âmes du purgatoire. Elle résume sa mission contemplative par ces mots : « Nous ne pouvons pas aller prêcher par le monde et convertir les âmes, mais nous sommes obligées de prier sans cesse pour toutes les âmes qui offensent Dieu... en particulier par nos souffrances, c’est-à-dire par un principe de vie crucifiée » [13]. Notre sainte conçoit cette mission comme « être au milieu » entre les hommes et Dieu, entre les pécheurs et le Christ crucifié.

Véronique vit en profondeur la participation à l’amour souffrant de Jésus, certaine que « souffrir avec joie » est la « clé de l’amour » [14]. Elle souligne que Jésus souffre pour les péchés des hommes, mais aussi pour les souffrances que ses fidèles serviteurs allaient devoir supporter au cours des siècles, au temps de l’Église, précisément pour leur foi solide et cohérente. Elle écrit : « Son Père éternel lui fit voir et entendre à ce moment-là toutes les souffrances que devaient endurer ses élus, les âmes qui lui étaient le plus chères, celles qui profiteraient de Son Sang et de toutes ses souffrances » [15]. Comme le dit de lui-même l’apôtre Paul : « Je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous, car ce qu’il reste à souffrir des épreuves du Christ, je l’accomplis dans ma propre chair, pour son corps qui est l’Église » [16]. Véronique en arrive à demander à Jésus d’être crucifié avec Lui : « En un instant — écrit-elle —, je vis sortir de ses très saintes plaies cinq rayons resplendissants ; et tous vinrent vers moi. Et je voyais ces rayons devenir comme de petites flammes. Dans quatre d’entre elles, il y avait les clous ; et dans l’une il y avait la lance, comme d’or, toute enflammée : et elle me transperça le cœur, de part en part... et les clous traversèrent mes mains et mes pieds. Je ressentis une grande douleur ; mais, dans la douleur elle-même, je me voyais, je me sentais toute transformée en Dieu » [17].

La sainte est convaincue qu’elle participe déjà au Royaume de Dieu, mais dans le même temps elle invoque tous les saints de la patrie bienheureuse pour qu’ils viennent à son aide sur le chemin terrestre de sa donation, dans l’attente de la béatitude éternelle ; telle est l’aspiration constante de sa vie [18]. Par rapport à la prédication de l’époque, souvent axée sur le « salut de l’âme » en termes individuels, Véronique fait preuve d’un profond sens de « solidarité », de communion avec tous ses frères et sœurs en marche vers le Ciel, et elle vit, elle prie et elle souffre pour tous. En revanche, les choses qui ne sont pas ultimes, terrestres, bien qu’appréciées au sens franciscain comme un don du Créateur, apparaissent toujours relatives, entièrement subordonnées au « goût » de Dieu et sous le signe d’une pauvreté radicale. Dans la communio sanctorum, elle éclaircit son don ecclésial, ainsi que la relation entre l’Église en pèlerinage et l’Église céleste. « Tous les saints — écrit-elle — sont là-haut grâce aux mérites et à la passion de Jésus ; mais ils ont coopéré à tout ce qu’a fait notre Seigneur, si bien que leur vie a été entièrement ordonnée, réglée par ses œuvres elles-mêmes » [19].

Dans les écrits de Véronique, nous trouvons de nombreuses citations bibliques, parfois de manière indirecte, mais toujours ponctuelle : elle fait preuve d’une familiarité avec le Texte sacré, dont se nourrit son expérience spirituelle. Il faut en outre noter que les moments forts de l’expérience mystique de Véronique ne sont jamais séparés des événements salvifiques célébrés dans la liturgie, où trouvent une place particulière la proclamation et l’écoute de la Parole de Dieu. Les Saintes Écritures illuminent, purifient, confirment donc l’expérience de Véronique, la rendant ecclésiale. D’autre part, cependant, c’est précisément son expérience, ancrée dans les Saintes Écritures avec une intensité sans égale, qui conduit à une lecture plus approfondie et « spirituelle » du Texte sacré lui-même, entre dans la profondeur cachée du texte. Non seulement elle s’exprime avec les paroles des Saintes Écritures, mais réellement, elle vit aussi de ces paroles, elles se font vie en elle.

Par exemple, notre sainte cite souvent l’expression de l’apôtre Paul : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » [20]. En elle, l’assimilation de ce texte paulinien, cette grande confiance et cette joie profonde, devient un fait accompli dans sa personne elle-même : « Mon âme — écrit-elle — a été liée par la volonté divine et je me suis vraiment établie et arrêtée pour toujours dans la volonté de Dieu. Il me semblait que je n’aurais plus jamais à me séparer de cette volonté de Dieu et je revins en moi avec ces paroles précises : rien ne pourra me séparer de la volonté de Dieu, ni les angoisses, ni les peines, ni les tourments, ni le mépris, ni les tentations, ni les créatures, ni les démons, ni l’obscurité, et pas même la mort, car, dans la vie et dans la mort, je veux entièrement, et en tout, la volonté de Dieu » [21]. Ainsi avons-nous, nous aussi, la certitude que la mort n’a pas le dernier mot, nous sommes enracinés dans la volonté de Dieu et ainsi réellement dans la vie, à jamais.

Véronique se révèle, en particulier, un témoin courageux de la beauté et de la puissance de l’Amour divin, qui l’attire, l’envahit, l’embrase. C’est l’amour crucifié qui s’est imprimé dans sa chair, comme dans celle de saint François d’Assise, avec les stigmates de Jésus. « Mon épouse — me murmure le Christ crucifié — les pénitences que tu accomplis pour ceux que j’ai en disgrâce me sont chères... Ensuite, détachant un bras de la croix, il me fit signe de m’approcher de son côté... Et je me retrouvais entre les bras du Crucifié. Je ne peux pas raconter ce que j’éprouvais à ce moment : j’aurais voulu être toujours dans son très saint côté » [22]. Il s’agit également de son chemin spirituel, de sa vie intérieure : être dans les bras du crucifié et être aimé dans l’amour du Christ pour les autres. Avec la Vierge Marie également, Véronique vit une relation de profonde intimité, témoignée par les paroles qu’elle entend un jour la Vierge lui adresser et qu’elle rapporte dans son Journal : « Je te fis reposer en mon sein, tu connus l’union avec mon âme, et par celle-ci tu fus, comme en vol, conduite devant Dieu » [23].

Sainte Véronique Giuliani nous invite à faire croître, dans notre vie chrétienne, l’union avec le Seigneur dans notre proximité avec les autres, en nous abandonnant à sa volonté avec une confiance complète et totale, et l’union avec l’Église, Épouse du Christ ; elle nous invite à participer à l’amour souffrant de Jésus Crucifié pour le salut de tous les pécheurs ; elle nous invite à garder le regard fixé vers le Paradis, but de notre chemin terrestre où nous vivrons avec un grand nombre de nos frères et sœurs la joie de la pleine communion avec Dieu ; elle nous invite à nous nourrir quotidiennement de la Parole de Dieu pour réchauffer notre cœur et orienter notre vie. Les dernières paroles de la sainte peuvent être considérées comme la synthèse de son expérience mystique passionnée : « J’ai trouvé l’Amour, l’Amour s’est laissé voir ! ». Merci.

© Copyright 2010 - Libreria Editrice Vaticana

[1] Matth. 6, 16, 18.

[2] Matth. 18, 3-5.

[3] Gal. 5, 17-18.

[4] Rom. 7, 21-22

[5] Summarium p.114.

[*]

PROPRIUM SANCTORUM PRO ALIQUIBUS LOCISPROPRE DES SAINTS POUR CERTAINS LIEUX
Infrascriptae Missae de Mysterio vel Sancto elogium in Martyrologio eo die habente, dici possunt ut festivae ubicumque, ad libitum sacerdotis, iuxta rubricas. Similiter huiusmodi Missae dici possunt etiam ut votivae, nisi aliqua expresse excipiatur. Les Messes données ici d’un Mystère ou d’un saint qui a le jour-même une mention au Martyrologe, peuvent être dites comme festives partout, selon la volonté du prêtre et les rubriques. De la même manière, les Messes peuvent être dites comme votives sauf si c’est indiqué expressément.

[6] Cf. Motu proprio Summorum Pontificum : Art. 6. Dans les Messes selon le Missel du B. Jean XXIII célébrées avec le peuple, les lectures peuvent aussi être proclamées en langue vernaculaire, utilisant des éditions reconnues par le Siège apostolique.

[7] Cf. Jer. 9, 24 ; I Cor. 1, 31.

[8] Cf. la note à l’Épître.

[9] Summarium Beatificationis, 115-120.

[10] Cf. ibid., III, 523.

[11] Ibid., III-IV, passim.

[12] Ibid., II, 16-17.

[13] Ibid., IV, 877.

[14] Cf. ibid., I, 299.417 ; III, 330.303.871 ; IV, 192.

[15] Ibid., II, 170.

[16] Col. 1, 24.

[17] Journal, I, 897.

[18] Cf. ibid. II, 909 ; V. 246.

[19] Ibid., III, 203.

[20] Rom. 8, 31, cf. Journal, 1, 714 ; II, 116.1021 ; III, 48.

[21] Journal, IV, 272.

[22] Ibid., I, 37.

[23] IV, 901.