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23/04 St Georges, martyr

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Le Hiéronymien annonce sa passion le 25 avril, et les coptes célèbrent la fête le 18 aril. Les Byzantins le commémorent le 23.

C’est ce jour là que St Georges est fêté à Rome depuis que Léon II (682-683) lui dédia une basilique au Vélabre. Sa fête est attestée dans les livres liturgiques du VIIIe siècle.

Textes de la Messe

die 23 aprilis
le 23 avril
SANCTI GEORGII
SAINT GEORGES
Martyris
Martyr
Commemoratio (ante CR 1960 : semiduplex)
Commémoraison (avant 1960 : semidouble)
Ant. ad Introitum. Ps. 63, 3.Introït
Protexísti me, Deus, a convéntu malignántium, allelúia : a multitúdine operántium iniquitátem, allelúia, allelúia.Vous m’avez protégé, ô Dieu, contre l’assemblée des méchants, contre la multitude de ceux qui commettent l’iniquité, alléluia, alléluia.
Ps. Ibid., 2.
Exáudi, Deus, oratiónem meam, cum déprecor : a timóre inimíci éripe ánimam meam.Exaucez, ô Dieu, ma prière lorsque je vous implore ; délivrez mon âme de la crainte de l’ennemi.
V/. Glória Patri.
Oratio.Collecte
Deus, qui nos beáti Geórgii Mártyri tui méritis et intercessióne lætíficas : concéde propítius ; ut, qui tua per eum benefícia póscimus, dono tuæ grátiæ consequámur. Per Dóminum.O Dieu, qui nous donnez un motif de joie dans les mérites et l’intercession du bienheureux Georges, votre Martyr, accordez-nous, avec bonté, qu’en recourant à cette intercession pour solliciter vos bienfaits, nous les obtenions au moyen de votre grâce.
Léctio Epístolæ beáti Pauli Apóstoli ad Timótheum.Lecture de l’Épître de saint Paul apôtre à Timothée.
2. Tim. 2, 8-10 ; 3, 10-12.
Caríssime : Memor esto, Dóminum Iesum Christum resurrexísse a mórtuis ex sémine David, secúndum Evangélium meum, in quo labóro usque ad víncula, quasi male óperans : sed verbum Dei non est alligátum. Ideo ómnia sustíneo propter eléctos, ut et ipsi salútem consequántur, quæ est in Christo Iesu, cum glória cælésti. Tu autem assecútus es meam doctrínam, institutiónem, propósitum, fidem, longanimitátem, dilectiónem, patiéntiam, persecutiónes, passiónes : quália mihi facta sunt Antiochíæ, Icónii et Lystris : quales perseditiónes sustínui, et ex ómnibus erípuit me Dóminus. Et omnes, qui pie volunt vívere in Christo Iesu, persecutiónem patiéntur.Mon bien-aimé : Souviens-toi que le Seigneur Jésus-Christ, de la race de David, est ressuscité d’entre les morts, selon mon évangile, pour lequel je souffre, jusqu’à porter les chaînes comme un malfaiteur ; mais la parole de Dieu n’est pas enchaînée. C’est pourquoi je supporte tout pour les élus, afin qu’ils obtiennent aussi eux-mêmes le salut qui est dans le Christ Jésus, avec la gloire du Ciel. Mais toi, tu as suivi mon enseignement, ma conduite, ma résolution, ma foi, ma douceur, ma charité, ma patience, mes persécutions, mes souffrances : celles qui me sont arrivées à Antioche, à Iconium et à Lystres ; tu sais quelles persécutions j’ai endurées, et le Seigneur m’a délivré de toutes. Aussi tous ceux qui veulent vivre pieusement dans le Christ Jésus subiront la persécution.
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 88, 6. Confitebúntur cæli mirabília tua, Dómine : étenim veritátem tuam in ecclésia sanctórum.Allelúia, allelúia. V/. Les cieux publieront vos merveilles, Seigneur, et votre vérité dans l’assemblée des saints.
Allelúia. V/. Ps. 20, 4. Posuísti, Dómine, super caput eius corónam de lápide pretióso. Allelúia.Allelúia. V/. Vous avez mis sur sa tête, Seigneur, une couronne de pierres précieuses. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Ioánnem.Lecture du Saint Evangile selon saint Jean.
Ioann. 15, 1-7.
In illo témpore : Dixit Iesus discípulis suis : Ego sum vitis vera : et Pater meus agrícola est. Omnem pálmitem in me non feréntem fructum, tollet eum : et omnem, qui fert fructum, purgábit eum, ut fructum plus áfferat. Iam vos mundi estis propter sermónem, quem locútus sum vobis. Mane te in me : et ego in vobis. Sicut palmes non potest ferre fructum a semetípso, nisi mánserit in vite : sic nec vos, nisi in me manséritis. Ego sum vitis, vos pálmites : qui manet in me, et ego in eo, hic fert fructum multum : quia sine me nihil potéstis fácere. Si quis in me non mánserit, mittétur foras sicut palmes, et aréscet, et cólligent eum, et in ignem mittent, et ardet. Si manséritis in me, et verba mea in vobis mánserint : quodcúmque voluéritis, petétis, et fiet vobis.En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : Je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron. Tout sarment qui ne porte pas de fruit en moi, il le retranchera ; et tout sarment qui porte du fruit, il l’émondera, afin qu’il porte plus de fruit. Vous êtes déjà purs, à cause de la parole que je vous ai annoncée. Demeurez en moi, et je demeurerai en vous. Comme le sarment ne peut de lui-même porter du fruit, s’il ne demeure attaché au cep, ainsi vous ne le pouvez pas non plus, si vous ne demeurez en moi. Je suis la vigne, vous êtes les sarments. Celui qui demeure en moi, et moi en lui, porte beaucoup de fruit ; car, sans moi, vous ne pouvez rien faire. Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il sera jeté dehors comme le sarment, et il séchera ; puis on le ramassera, et on le jettera au feu, et il brûlera. Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez tout ce que vous voudrez, et cela vous sera accordé.
Ant. ad Offertorium. Ps. 88, 6.Offertoire
Confitebúntur cæli mirabília tua, Dómine : et veritátem tuam in ecclésia sanctórum, allelúia, allelúia.Les cieux publieront vos merveilles, Seigneur, et votre vérité dans l’assemblée des saints, alléluia, alléluia.
SecretaSecrète
Múnera, Dómine, obláta sanctífica, et, intercedénte beáto Geórgio Mártyre tuo, nos per hæc a peccatórum nostrórum máculis emúnda. Per Dóminum.Rendez saints, Seigneur, ces dons qui vous sont offerts ; à leur occasion, et comme le bienheureux Georges, votre Martyr, intercède pour nous, purifiez-nous des souillures de nos péchés.
Ant. ad Communionem. Ps. 63, 11.Communion
Lætábitur iustus in Dómino, et sperábit in eo : et laudabúntur omnes recti corde, allelúia, allelúia.Le juste se réjouira dans le Seigneur, et espérera en lui ; et tous ceux qui ont le cœur droit se réjouiront, alléluia, alléluia.
PostcommunioPostcommunion
Súpplices te rogámus, omnípotens Deus : ut, quos tuis réficis sacraméntis, intercedénte beáto Geórgio Mártyre tuo, tibi étiam plácitis móribus dignánter tríbuas deservíre. Per Dóminum.Nous vous le demandons instamment, Dieu tout-puissant, par l’intercession du bienheureux Georges, votre Martyr, faites, dans votre bonté, que ceux que vous nourrissez de votre sacrement vous servent en se conduisant d’une manière qui vous plaise.
Pro votiva extra Tempus Paschale Missa In virtúte, de Communi unius Martyris 3 loco, cum Orationibus, ut supra.Aux Messes votives en dehors du Temps pascal, Messe In virtúte, du commun d’un Martyr 3, avec les oraisons ci-dessus.

Office

Il n’y a pas de lecture propre à l’office de St Georges, voir la raison qu’en donne Dom Guéranger plus bas, on prend les leçons du commun.

Leçons des Matines avant 1960

De l’Épître de saint Cyprien, Évêque et Martyr, aux Martyrs et aux Confesseurs.

Quatrième leçon. Comment célébrer, dignement vos louanges, ô très courageux Martyrs ? Quels accents d’éloquence donner à ma voix, pour relever la force de votre cœur et la persévérance de votre foi ? Vous avez supporté les plus cruelles tortures, jusqu’à la consommation de votre gloire. Vous n’avez pas cédé aux supplices ; mais les supplices plutôt vous ont cédé. La fin de vos douleurs, ce ne sont pas les tortures qui vous l’ont donnée : ce sont vos couronnes. Si le carnage des persécuteurs a duré longtemps, il n’a pu néanmoins renverser une foi toujours debout ; il n’a fait qu’envoyer plus rapidement à Dieu les hommes de Dieu.

Cinquième leçon. La multitude des spectateurs a contemplé avec admiration ce combat céleste, combat divin, combat spirituel, lutte pour le Christ ! On a vu les serviteurs de Jésus-Christ demeurer fermes, la parole libre, l’esprit pur, forts d’une vertu divine, livrés sans défense aux traits de ce monde ; mais revêtus des armes d’une foi ardente. Les victimes torturées se sont montrées plus fortes que les bourreaux qui les torturaient, leurs membres frappés et déchirés triomphaient des ongles de fer qui les frappaient et les déchiraient. Les coups redoublés n’ont pu surmonter la constance invincible de leur foi ; cependant, leur chair était tellement en lambeaux que, dans ces serviteurs de Dieu, il ne restait plus de membres à tourmenter, le bourreau n’atteignait que des plaies. Un sang glorieux ruisselait pour éteindre l’incendie de la persécution, en même temps qu’il calmait les ardeurs de la flamme consumant les Martyrs.

Sixième leçon. Oh ! Quel spectacle aux yeux du Seigneur ! Qu’il fut sublime, qu’il fut grand, qu’il fut agréable à Dieu, par la constance des soldats enrôlés dans sa milice et dévoués à le servir. Comme le Saint-Esprit nous le dit et nous l’enseigne lui-même dans les psaumes : « Précieuse en la présence du Seigneur est la mort des justes ». Vraiment précieuse cette mort, qui achète l’immortalité au prix du sang répandu, qui acquiert la couronne par la perfection de la vertu. Oh ! que Jésus-Christ en a reçu de joie, combien volontiers dans de tels hommes, ses serviteurs, il a Lui-même combattu et triomphé ; Lui, le Protecteur ^de la foi, Lui qui donne à ceux qui croient en Lui en proportion de leur confiance. Il a assisté à leur combat. Il a soutenu, fortifié, encouragé ses guerriers et ceux qui revendiquaient ainsi l’honneur de confesser son Nom. Celui qui pour nous a une fois vaincu la mort, c’est Celui qui en est toujours victorieux en nous.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Couvert de sa brillante armure, monté sur son coursier rapide, et perçant de sa lance le dragon, George se montre aujourd’hui sur le Cycle, comme le valeureux champion du Christ ressuscité. L’Église d’Orient, qui ne l’appelle que le grand Martyr, a transmis de bonne heure son culte à l’Église d’Occident, et la chevalerie chrétienne l’a aimé et honoré comme l’un de ses plus chers patrons. Son martyre eut lieu en ces jours de la Pâque, afin qu’il apparût aux fidèles comme le gardien du glorieux sépulcre, de même qu’Etienne, le Protomartyr, veille auprès du berceau de l’Enfant-Dieu.

L’Église Romaine n’a pas de Légende sur saint George dans son Office. La raison de cette dérogation à l’usage ordinaire est fondée sur une particularité qui remonte jusqu’au Ve siècle. En 496, dans un célèbre concile tenu à Rome, le pape saint Gélase donnant le catalogue des livres que les fidèles pouvaient lire sans danger et avec profit, et de ceux qu’ils devaient éviter, signale parmi ces derniers certains Actes de saint George, comme rédigés par un écrivain hérétique et inepte, et défend d’en faire usage. Il existait cependant d’autres Actes du saint Martyr en Orient, totalement différents de ceux qui avaient eu cours à Rome, mais on ne les connaissait pas dans cette ville. Le culte de saint George ne souffrit en rien dans la ville sainte de ce manque d’une Légende véridique. Une Église stationnale, Titre cardinalice, s’y éleva dès les premiers siècles, et subsiste encore sous le vocable de Saint-George-au-Voile-d’or ; mais la Liturgie a continué de porter la trace de la sainte sévérité du canon de Gélase, par l’omission du récit de la vie du Martyr dans son Office.

Les Bollandistes ont eu entre les mains plusieurs copies des Actes proscrits, qu’ils ont trouvés en effet remplis de détails absurdes ; mais ils se sont gardés de les reproduire. Le P. Papebrock a donné en place les véritables Actes, écrits en grec, cités par saint André de Crète, et dans lesquels se développe l’admirable caractère de saint George, qui exerça un haut emploi militaire dans les armées romaines, sous l’empire de Dioclétien. Il fut une des premières victimes de la grande persécution, et souffrit à Nicomédie. Son courage fit une telle impression sur Alexandra, femme de Dioclétien, que cette princesse se déclara chrétienne, et mérita départager la couronne du saint guerrier.

Le culte de saint George s’introduisit de bonne heure dans les Gaules. On en trouve les traces dans Grégoire de Tours, en divers endroits de ses écrits. Sainte Clotilde avait une dévotion spéciale au saint Martyr, et lui dédia l’église de sa chère abbaye de Chelles. Mais ce culte prit son plus grand essor à l’époque des Croisades, lorsque nos chevaliers furent témoins de la vénération des peuples de l’Orient envers saint George, et qu’ils entendirent raconter les merveilles de sa protection dans les combats. Les historiens byzantins en rapportent plus d’un trait remarquable, et les croisés à leur tour ne tardèrent pas à éprouver les effets de la confiance qu’ils avaient placée dans le secours de ce puissant conducteur des armées chrétiennes. La république de Gênes se mit sous son patronage, et celle de Venise l’honora, après saint Marc, comme son protecteur spécial. Mais aucune province du monde catholique ne surpassa l’Angleterre dans les hommages rendus à saint George. Non seulement un concile national, tenu à Oxford, en 1222, ordonna que la fête du grand Martyr serait célébrée comme de précepte dans toute l’Angleterre ; non seulement le culte du vaillant soldat du Christ fut professé dans la grande île britannique par les premiers rois normands ; mais on est en mesure de soutenir, d’après les monuments antérieurs à l’invasion de Guillaume le Conquérant, que la vénération particulière delà nation anglaise envers saint George lui était déférée, dès les IXe et Xe siècles, comme à un protecteur particulier. Édouard III ne fit qu’exprimer le sentiment pieux de sa nation envers le céleste guerrier, lorsqu’il plaça sous son patronage révéré l’Ordre insigne de la Jarretière qu’il institua en 1330. Nous devons aussi mentionner l’Ordre militaire de Saint-George que Frédéric III établit pour l’Allemagne en 1468.

Saint George est représenté terrassant un dragon, et délivrant par cet acte de bravoure une princesse que le monstre allait dévorer. Cette scène, dont l’art catholique a su tirer un grand parti, est purement symbolique, et dérive des monuments de l’iconographie byzantine. Elle signifie la victoire que saint George a remportée sur le démon par sa généreuse confession ; la princesse figure Alexandre, que la constance du Martyr conquit à la loi. Ni les Actes de saint George, ni les Hymnes de la liturgie grecque, ne disent un mot du dragon qu’aurait eu à combattre le saint Martyr, ni de la princesse qu’il aurait eu à délivrer d’un péril temporel. Cette fable n’a eu cours que dans l’Occident, à partir du XIVe siècle, et sa source est dans l’interprétation trop matérielle des types consacrés à saint George par les Grecs, et qui s’introduisirent dans nos églises à l’issue des Croisades.

Honorons le sublime athlète du Christ, en répétant à sa gloire quelques-unes des strophes que l’Église grecque lui consacre dans ses Menées.

(DIE XXIII APRILIS.)

Fidèle ami du Christ, prince de ses athlètes, splendide flambeau de la terre, astre brillant entre tous, protecteur vigilant de ceux qui t’honorent, ô George, ô Martyr, aie-nous sous ta garde.

Nous célébrons aujourd’hui les combats dans lesquels tu as détruit les vaines idoles, et réduit à néant l’erreur propagée par les démons, o George, glorieux Martyr du Christ !

Tu es entré dans les rangs de l’armée céleste, bienheureux George ! tu contemples maintenant la divine essence, autant qu’il est possible à la créature : daigne nous protéger, nous tous qui te vénérons avec foi.

George, le grand guerrier, a aimé avec ardeur le Christ-Roi qui a donné sa vie pour le salut du monde : il s’est empressé de mourir pour lui ; enflammé d’un zèle divin, il s’est livré lui-même. Célébrons-le donc avec foi dans nos cantiques comme notre ardent défenseur, comme le glorieux serviteur du Christ, le fidèle imitateur de son Maître, le constant intercesseur auprès de Dieu, afin qu’il obtienne à tous la rémission et le pardon des péchés.

L’armée des Anges elle-même admire tes exploits, ô prince de la milice, le Roi des Anges, satisfait de ton courage, a désiré embellir son palais de ta présence, ô Martyr ! et il est allé jusqu’à t’associer pour jamais à son royaume.

Imitateur de ton Seigneur, tu t’es élance spontanément dans les combats, ô Martyr ! A ton retour victorieux, tu as mérité d’être proclamé le champion de l’Église du Christ ; garde-la et défends-la toujours par ta protection.

Comme un invincible martyr, comme un soldat couronne, comme un vaillant défenseur de la foi, sois maintenant comme une citadelle inébranlable pour tous ceux qui célèbrent tes louanges, ô George plein de sagesse ; protège-les en tous lieux de ton intercession.

Le front ceint d’une brillante couronne, honoré du diadème royal et du sceptre, couvert de la pourpre éclatante de ton sang, heureux Martyr, tu règnes maintenant dans les cieux avec le Roi des armées angéliques.

Accourez tous, ô fidèles, pour célébrer par vos cantiques la splendide et glorieuse résurrection du Seigneur ; fêtons en même temps la mémoire solennelle de George le Martyr ; couronnons-le des fleurs du printemps comme un athlète insurmontable, et méritons d’être, par ses prières, affranchis de nos tribulations et de nos péchés.

Le printemps est venu, livrons-nous aux transports de la joie ; la résurrection du Christ a lui sur nous, tressaillons d’allégresse ; la fête du martyr George couronné pour sa bravoure apparaît aujourd’hui pour réjouir les fidèles ; nous tous qui aimons cette solennité, célébrons-la par des chants mystiques. Comme un vaillant soldat, George a déployé contre les tyrans un mâle courage, et ils ont été couverts de confusion. Imitateur des souffrances de Jésus-Christ notre Sauveur, il n’a pas eu pitié du vase d’argile de son corps, et le livrant aux tortures, comme s’il était d’airain, il l’a transformé. Chantons donc à sa gloire : O Martyr entré en possession de la récompense, supplie le Seigneur de sauver nos âmes.

O George ! Vous êtes l’honneur de la milice chrétienne. Le service du prince temporel ne vous a pas fait oublier ce que vous deviez au Roi du ciel. Votre sang généreux a coulé pour la foi du Christ, et en retour le Christ vous a établi chef et conducteur des armées chrétiennes. Soyez leur appui devant les bataillons ennemis, et assurez la victoire aux défenseurs de la cause juste. Protégez-les sous les plis de votre étendard, couvrez-les de votre bouclier, et répandez la terreur devant eux. Le Seigneur est le Dieu des armées, et la guerre entre souvent dans les plans de sa Providence, tantôt dans un but de justice, tantôt dans des vues de miséricorde. Chefs et soldats ont besoin de l’appui céleste. En faisant la guerre, ils semblent souvent faire l’œuvre de l’homme, tandis qu’ils font en réalité l’œuvre de Dieu. C’est pour cette raison qu’ils sont plus accessibles que les autres hommes aux sentiments généreux, que leur cœur est plus religieux. Le sacrifice, le péril, les élèvent au-dessus d’eux-mêmes : aussi les soldats occupent-ils une large place dans les fastes des Martyrs. Veillez en particulier sur la milice française, ô George ! Rendez-la aussi chrétienne qu’elle est valeureuse ; nous savons que ce n’est pas en vainque les hommes de guerre ont espéré en vous.

Mais, ô puissant guerrier, la milice temporelle n’est pas la seule qui s’exerce ici-bas : il en est une autre dans laquelle sont enrôlés tous les fidèles du Christ ! Le grand Paul, parlant de nous tous, a dit « qu’il n’y aura de couronnés que ceux qui auront légitimement combattu [1] ». Nous avons donc à compter sur la lutte en ce monde, si nous écoutons les exhortations que nous adresse le même Apôtre : « Couvrez-vous, » nous dit-il, « de l’armure de Dieu, afin de pouvoir tenir contre les embûches du diable. Ayez pour ceinture la vérité, pour cuirasse la justice, pour chaussure la résolution de marcher dans la voie de l’Évangile, pour bouclier la foi, pour casque l’espérance du salut, pour glaive enfin la parole de Dieu [2]. » Nous sommes donc des guerrier ! comme vous, ô George ! Notre divin Chef ressuscité veut, avant de monter au ciel, passer en revue son armée ; présentez-nous à lui. Il nous a admis dans les rangs de sa garde malgré nos infidélités passées ; c’est à nous maintenant de nous rendre dignes d’un tel honneur. Nous possédons le gagé de la victoire dans le divin aliment pascal : comment pourrions-nous nous laisser vaincre ? Veillez sur nous, vaillant guerrier ! Que vos prières nous aident, pendant que vos exemples nous encourageront à marcher comme vous contre le dragon infernal Chaque pièce de notre armure lui est redoutable ; c’est Jésus lui-même qui l’a préparée pour nous, et qui l’a trempée dans son sang : tortillez notre courage, afin que nous puissions, comme vous, la lui présenter entière, au jour où il nous invitera à son repos éternel.

La chrétienté tout entière a besoin, ô George ! Que vous vous souveniez des hommages qu’elle vous prodiguait autrefois L’antique piété envers vous s’est, hélas refroidie, et pour beaucoup de chrétiens votre fête passe inaperçue. Ne vous irritez pas, ô saint Martyr ; imitez votre Maine qui fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants ; ayez pitié de ce monde au sein duquel l’erreur a été semée, et qui s’agite en ce moment dans des convulsions si terribles. Considérez avec compassion votre Angleterre que le dragon infernal a séduite, et qu’il fait servir à ses noirs desseins contre le Seigneur et contre son Christ. Armé de la lance avec laquelle vous l’avez autrefois terrassé, courez sur le monstre et affranchissez enfin l’Ile des Saints de son joug ignominieux. Au ciel, les ancêtres vous le demandent, ô puissant guerrier ! Sur la terre, leurs derniers et rares neveux vous en supplient. C’est au nom de Jésus ressuscité que nous vous conjurons tous d’aider a la résurrection d’un peuple qui fut le vôtre.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Station au titre « de Belabru ».
Aujourd’hui, ce n’est pas un Saint romain, mais un martyr oriental qui, avec sa palme et sa couronne, vient rendre plus splendide le triomphe du Rédempteur ressuscité des morts. Le culte de saint Georges a l’Orient pour patrie, mais il fut importé à Rome durant la première période byzantine.

La légende a entouré de ses voiles l’histoire du Mégalomartyr, qui aurait appartenu, croit-on, à la cité de Lydda ou Diospolis de Palestine, où, en 303, il aurait trouvé la mort pour avoir lacéré les édits de persécution contre les chrétiens. Dès que Constantin eut vaincu le païen Licinius, saint Georges fut partout célébré en Orient comme le défenseur armé de l’Église, son tropaiophóros, c’est-à-dire celui qui porte le trophée de la victoire remportée contre l’ennemi, comme saint Laurent et saint Sébastien à Rome. Non seulement le culte de saint Georges remplit cette immense région qui aujourd’hui encore prend de lui son nom, la Géorgie, mais il pénétra dans les liturgies éthiopiques, coptes, syriaques et latines. En Europe, saint Georges devint l’un des saints les plus populaires au moyen âge, et l’Angleterre le vénère encore comme son céleste patron.

A Rome, dès le haut moyen âge, on éleva des églises et des autels en l’honneur de saint Georges, au Vatican, près du mausolée d’Auguste, au Vélabre et ailleurs.

Quand, au VIe siècle, Bélisaire restaura les murs de Rome, il plaça sur la porte Saint-Sébastien une inscription où la protection de ce lieu était confiée aux martyrs orientaux Conon et Georges : Toutefois le sanctuaire le plus fameux, où le peuple de Rome venait plus volontiers implorer le patronage du Mégalomartyr, fut toujours, durant tout le moyen âge, la basilica Sancti Georgii in Velabro ; c’est pourquoi Grégoire II y institua la messe stationnale le jeudi de la Quinquagésime. Les origines de cette basilique semblent antérieures au Ve siècle, car, dans une inscription de 482, il est déjà question d’un lector de Belabru. Toutefois, sa dédicace définitive aux martyrs soldats, Georges et Sébastien, date seulement du temps de Léon II (682-683).

La messe est celle des Martyrs au temps pascal, à l’exception des collectes et de l’épître ; celle-ci est empruntée à la messe Laetabitur.

Le Sacramentaire Léonien contient lui aussi la messe de saint Georges avec les collectes et la préface propres.

La prière suivante est intéressante, parce qu’elle nous atteste qu’au moins dès le Ve siècle, à Rome, la fête de saint Georges comportait la « station » : Adspice nos, Domine, precibus exoratus venerandi Martyris tui Georgii ; tua miseratione concedens, ut sicut nobis eius passio contulit hodiernum in tua virtute conventum, ita suffragetur et meritum.

Durant la période byzantine, où, à Rome, les lectures se succédaient en grec et en latin, le passage de l’Évangile lu en ce jour — semblable à celui du 14 avril — où Jésus se compare lui-même à une vigne et son Père à l’agriculteur (geôrgós), rappelait fort gracieusement le nom du martyr éponyme de la fête.

Dans quelques textes du Grégorien, nous trouvons cette autre collecte : Beati Georgii martyris tui, Domine, suffragiis exoratus, perctepta Sacramenti tui virtute defende. Per Dominum.

Aucun état, aucune condition, n’est loin de Dieu et du paradis. Aussi, à l’école de la perfection chrétienne, peut-on fort bien passer de la caserne au martyre, du service des armes aux honneurs des autels, car la vertu est indépendante des circonstances extérieures de la vie sociale. Celui-là est saint, qui sert Dieu avec perfection dans l’état où la Providence divine l’a placé.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Soyons des chevaliers comme Saint Georges dans le combat contre le Dragon.

Saint Georges, le beau chevalier à l’armure éclatante, monté sur son cheval de guerre et transperçant le dragon, est une figure populaire entourée de légendes. Ce qu’il y a d’historique dans la vie de ce saint est ce qui suit : Le Cappadocien Georges, officier de haut grade, subit le martyre avec d’autres chrétiens pendant la persécution de Dioclétien, vers 303. Il mourut en Palestine, probablement à Diospolis. L’Église d’Orient l’appelle le grand martyr. De très bonne heure, son culte fut transporté dans l’Église d’Occident. La chevalerie chrétienne l’a honoré comme un de ses plus grands patrons. L’Église romaine lui dédia, dès les premiers siècles, une station sous le titre « Saint Georges in Velabro » (jeudi après le mercredi des Cendres). Le bréviaire romain ne contient pas de biographie du saint car le pape saint Gélase défendit, en 496, de lire ses Actes apocryphes. Le martyrologe dit : « La naissance (céleste) de saint Georges, dont l’Église honore le triomphe particulièrement glorieux parmi ceux de tous les martyrs.

La messe (Protexisti). — La messe est du commun des martyrs pendant le temps pascal. Seule, l’Épître est prise d’un autre commun. Dans cette Épître, le saint héros nous parle de ses efforts pour prêcher l’Évangile du Seigneur ressuscité pour lequel il a souffert « jusqu’aux chaînes » (c’est une véritable Épître pascale). Il nous dit qu’il a aussi enduré son martyre à cause de nous « afin que nous recevions le salut dans le Christ Jésus ». Cette pensée nous montre le culte des saints dans une autre lumière. Les saints souffrent aussi pour nous. Saint Georges conclut en nous exhortant à l’imiter : « Tous ceux qui veulent vivre pieusement dans le Christ souffriront la persécution ». L’Évangile nous rapporte la parabole de la vigne. Pourquoi cela ? Il peut se faire que ce choix ait été dû d’abord à un motif extérieur. Dans l’antiquité, on prenait, pendant le temps pascal, la dernière partie de l’Évangile de saint Jean dont on faisait la lecture à la suite. C’est ce qui explique sans doute la présence de cette péricope dans notre messe (cf. les Évangiles des dimanches après Pâques, celui de la fête de saint Philippe et saint Jacques). Cependant, un œil exercé trouvera une relation intime entre le martyre et l’image de la vigne : Le Christ, le Roi des martyrs, est le cep de vigne élevé sur la Croix ; les martyrs sont les raisins mûrs de cette vigne qui pendent de la Croix. Le vin eucharistique a jailli sous le pressoir de la souffrance et ce vin fut la boisson enivrante qui donna force et courage aux martyrs. Ces trois notions : Croix, Eucharistie et martyre, sont tellement unies dans l’esprit de la primitive Église que l’une d’entre elles évoque immédiatement les autres. C’est pourquoi, depuis les temps les plus reculés, on nomme deux fois les martyrs au Canon de la messe. Notre Évangile est en quelque sorte une illustration du Canon : le Christ, la vigne divine qui s’appuie à la Croix, le Christ qui est en même temps l’arbre de vie du Paradis ; les martyrs qui sont les raisins suspendus à cette vigne. Les martyrs ont réalisé la parabole. Ils sont « demeurés dans le Christ et ont porté beaucoup de fruit » en méritant a couronne du martyre. Nous aussi, nous sommes les sarments de la vigne divine qui est le Christ et, justement maintenant, à la messe, la sève vitale de la vigne doit couler dans les sarments afin qu’ils portent « beaucoup de fruit ». C’est par la vigne divine que nous sommes unis avec le saint martyr ; c’est précisément à la messe que doit se réaliser la communion des saints qui est une « communauté de souffrance et de consolation ». C’est ainsi que nous comprenons, à la lumière de la primitive Église, la parabole de la vigne. Le cardinal Schuster fait remarquer que le mot qui veut dire vigneron en grec est Géorgos et que, par conséquent, à la période byzantine, quand les lectures étaient faites dans les deux langues, on entendait le nom de Georges dans l’Évangile. De nouveau, le royaume de Dieu au ciel et sur la terre loue et « confesse » les merveilles de la vigne divine (Off.). A la communion, nous voyons le saint s’asseoir avec joie au banquet céleste et, sur la terre, nous prenons part à sa joie à la table eucharistique. Le psaume 63 a commencé la messe et il l’achève. Remarquons encore que la plupart des chants nomment le saint au singulier.

Le martyre. — Les matines contiennent un beau passage d’une lettre de saint Cyprien sur les martyrs : « Par quelles louanges dois-je vous célébrer, valeureux martyrs ? Par quel éloge exalter la force de votre cœur et la persévérance de votre foi ? Jusqu’à la consommation glorieuse vous avez subi de très durs tourments. Vous n’avez pas reculé devant les supplices, ce sont plutôt les supplices qui ont reculé devant vous. Les instruments de supplice ne pouvaient mettre fin à vos douleurs ; les couronnes célestes y ont mis fin. Les tortures du chevalet ont duré longtemps, non pas pour ébranler votre foi, mais pour conduire plus tôt à Dieu les hommes de Dieu. La foule des assistants vit avec admiration le combat céleste, le combat de Dieu, le combat spirituel, le combat pour le Christ. Elle vit les serviteurs de Dieu garder leur voix libre et leur cœur sans défaillance par la force divine ; ils étaient -dépourvus d’armes séculières, mais munis des armes de la foi ardente. Torturés, ils étaient plus forts que leurs bourreaux. De ceux qui les frappaient et les déchiraient avec des ongles de fer, leurs membres frappés et déchirés triomphèrent. Leur foi invincible ne put être vaincue par les coups répétés, alors même qu’on leur arrachait les entrailles et qu’on torturait non plus les corps des serviteurs de Dieu, mais leurs blessures. Leur sang coulait, ce sang capable d’éteindre l’incendie des persécutions et d’assoupir les flammes de l’enfer par sa rosée glorieuse. Quel spectacle ce fut pour le Seigneur, quel spectacle sublime et grandiose ! Dieu l’accepta comme le serment de fidélité de son soldat. C’est écrit dans les psaumes quand le Saint-Esprit nous exhorte et nous avertit en nous disant : « Précieuse est aux yeux du Seigneur la mort de ses justes ». Elle est précieuse la mort de celui qui a acheté l’immortalité au prix de son sang ; cette mort a reçu la couronne après la consommation d’une vie vertueuse. Combien le Christ s’est réjoui alors ; avec quelle joie il a combattu pour de tels serviteurs ! Le Christ assistait au combat livré pour lui, il excitait les combattants et les confesseurs de son nom, il les fortifiait et les encourageait. Et celui qui pour nous a vaincu une fois la mort en triomphe toujours en nous ».

[1] II Tim. II, 5.

[2] Eph VI, 13-17.