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Mercredi de la 2ème semaine après l’Oct. de Pâque, Solennité de St Joseph

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

La fête mobile du Patronage de Saint Joseph et toute son Octave disparurent en 1955, lorsque Pie XII institua la Solennité de Saint Joseph Artisan le 1er mai.

Cette fête était d’institution récente : en 1847, Pie IX avait étendu à tout le rite romain la fête du Patronage de saint Joseph, qui était d’origine carmélitaine. Elle fut fixée au 3ème dimanche après Pâques.
En 1870, après la proclamation de saint Joseph comme Patron de l’Église universelle, Pie IX éleva la fête à la 1ère classe.
Pie X en 1911, en changea l’intitulé comme Solennité de saint Joseph, patron de l’Église universelle et la dota d’une octave commune.

La réforme du calendrier de saint Pie X, désirant libérer les dimanches perpétuellement empêchés par une fête de saint, déplaça en 1913 la solennité au mercredi précédent (le mercredi étant le jour spécialement consacré à saint Joseph dans la dévotion).

L’échec de la christianisation de la fête du travail étant patent plus de 50 ans après, et le calendrier réformé de 1969 ayant réduit la fête de saint Joseph artisan à une simple mémoire (facultative !), il nous a paru bon de rappeler le patronage de saint Joseph, peut-être trop oublié de nos jours en publiant les textes et commentaires de la Fête et de toute son Octave.

Textes de la Messe

Feria IV infra Hebdomadam II post Octavam Paschæ
le Mercredi de la deuxième semaine après l’Octave de Pâque
S. IOSEPH SPONSI B. MARIÆ V.
SAINT JOSEPH, ÉPOUX de la Bse VIERGE MARIE
Confessoris et Ecclesiæ universalis Patroni
Confesseur et Patron de l’Église universelle
Duplex I classis cum Octava communi
double de Ière classe avec Octave commune
Ant. ad Introitum. Ps. 32, 20-21.Introït
Adiútor et protéctor noster est Dominus : in eo lætábitur cor nostrum, et in nómine sancto eius sperávimus, allelúia, allelúia.Le Seigneur est notre secours et notre protecteur : c’est en lui que notre coeur se réjouira, et c’est en son saint nom que nous avons espéré. Alléluia, alléluia.
Ps. 79, 2.
Qui regis Israël, inténde : qui dedúcis, velut ovem, Ioseph.Vous qui conduisez Israël, prêtez l’oreille : vous qui menez Joseph comme une brebis.
V/. Glória Patri.
Oratio.Collecte
Deus, qui ineffabili providéntia beátum Ioseph sanctíssimæ Genetrícis tuæ sponsum elígere dignátus es : præsta, quǽsumus ; ut, quem protectórem venerámur in terris, intercessórem habére mereámur in cælis : Qui vivis.Dieu, qui dans votre ineffable providence avez daigné choisir le bienheureux Joseph pour être l’époux de votre très sainte Mère : faites, nous vous en prions ; que le vénérant comme protecteur sur cette terre, nous méritions de l’avoir pour intercesseur dans le ciel.
Léctio libri Génesis.
Gen. 49, 22-26.
Fílius accréscens Ioseph, fílius accréscens, et decórus aspéctu : fíliæ discurrérunt super murum. Sed exasperavérunt eum, et iurgáti sunt, inviderúntque illi habéntes iácula. Sedit in forti arcus eius, et dissolúta sunt víncula brachiórum et mánuum illíus per manus poténtis Iacob : inde pastor egréssus est, lapis Israël. Deus patris tui erit adiútor tuus, et Omnípotens benedícet tibi benedictiónibus cæli désuper, benedictiónibus abýssi iacéntis deórsum, benedictiónibus úberum et vulvæ. Benedictiónes patris tui confortátæ sunt benedictiónibus patrum eius, donec veníret Desidérium cóllium æternórum : fiant in cápite Ioseph, et in vértice Nazarǽi inter fratres suos.Joseph croîtra et se multipliera de plus en plus. Il est agréable à contempler ; ses rameaux courent le long de la muraille. Mais ceux qui étaient armés de dards l’ont exaspéré, l’ont querellé, et lui ont porté envie. Il a mis son arc et sa confiance dans le Très Fort, et les chaînes de ses mains et de ses bras ont été rompues par la main du Tout-Puissant de Jacob. De là est sorti le pasteur et le rocher d’Israël. Le Dieu de ton père sera ton protecteur, et le Tout-Puissant te comblera des bénédictions du haut du ciel, des bénédictions de l’abîme des eaux d’en bas, des bénédictions du lait des mamelles et du fruit des entrailles. Les bénédictions que te donne ton père surpassent celles qu’il a reçues de ses pères ; et elles dureront, jusqu’à ce que le désir des collines éternelles soit accompli. Que ces bénédictions se répandent sur la tête de Joseph, et sur le haut de la tête de celui qui est un nazaréen entre ses frères.
Allelúia, allelúia. V/. De quacúmque tribulatióne clamáverint ad me, exáudiam eos, et ero protéctor eórum semper.Allelúia, allelúia. V/. Dans quelque tribulation qu’ils m’invoquent, je les exaucerai et je serai à jamais leur protecteur.
Allelúia. V/. Fac nos innócuam, Ioseph, decúrrere vitam : sitque tuo semper tuta patrocínio. Allelúia.Allelúia. V/. Faites-nous mener, ô Joseph, une vie sans tache et qui soit toujours en sécurité sous votre patronage. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Lucam.Lecture du Saint Evangile selon saint Luc.
Luc. 3, 21-23.
In illo témpore : Factum est autem, cum baptizarétur omnis pópulus, et Iesu baptizáto et oránte, apértum est cælum : et descéndit Spíritus Sanctus corporáli spécie sicut colúmba in ipsum : et vox de cælo facta est : Tu es Fílius meus diléctus, in te complácui mihi. Et ipse Iesus erat incípiens quasi annórum trigínta, ut putabátur, fílius Ioseph.En ce temps-là : Il arriva que, tout le peuple recevant le baptême, Jésus ayant aussi été baptisé, comme il priait, le ciel s’ouvrit, et l’Esprit-Saint descendit sur lui sous une forme corporelle, comme une colombe ; et une voix se fit entendre du ciel : Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi Je me suis complu. Or Jésus avait environ trente ans lorsqu’il commença Son ministère, étant, comme on le croyait, fils de Joseph.
Credo per totam Octavam.Credo pendant tout l’Octave.
Ant. ad Offertorium. Ps. 147, 12 et 13.Offertoire
Lauda, Ierúsalem, Dóminum : quóniam confortávit seras portárum tuárum, benedíxit fíliis tuis in te, allelúia, allelúia.Jérusalem, loue le Seigneur : car il a consolidé les verrous de tes portes, il a béni tes fils au milieu de toi. Alléluia, alléluia.)
SecretaSecrète
Sanctíssimæ Genetrícis tuæ sponsi patrocínio suffúlti, rogámus, Dómine, cleméntiam tuam : ut corda nostra fácias terréna cuncta despícere, ac te verum Deum perfécta caritáte dilígere : Qui vivis.Soutenus par le patronage de l’époux de votre très sainte Mère, nous implorons, Seigneur , votre cléménce : faites que nos cœurs méprisent toutes les choses terrestres et vous aiment d’une parfaite charité, vous le vrai Dieu.
Præfatio de S. Ioseph Et te in Festivitáte, quæ dicitur per totam Octavam, iuxta Rubricas. Préface de saint Joseph Et, en cette fête..., que l’on dit pendant tout l’Octave selon les rubriques.
Ant. ad Communionem. Matth. 1, 16.Communion
Iacob autem génuit Ioseph, virum Maríæ, de qua natus est Iesus, qui vocátur Christus, allelúia, allelúia.Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle est né Jésus, qui est appelé Christ. Alléluia, alléluia.
PostcommunioPostcommunion
Divíni múneris fonte refécti, quǽsumus, Dómine, Deus noster : ut, sicut nos facis beáti Ioseph protectióne gaudére ; ita, eius méritis et intercessióne, cæléstis glóriæ fácias esse partícipes. Per Dóminum.Rassasiés à la source du don divin, nous vous demandons, Seigneur, notre Dieu : de même que vous nous avez donné la joie d’être sous la protection du bienheureux Joseph ; ainsi, par ses mérites et son intercession, vous nous fassiez devenir participant de la gloire céleste.

Office

AUX PREMIÈRES VÊPRES.

Ant. 1 Jacob engendra * Joseph, époux de Marie, de laquelle est né Jésus, qui est appelé Christ, alléluia.
Ant. 2 Il fut envoyé * de Dieu, l’Ange Gabriel, dans la ville de Galilée, appelée Nazareth, à une Vierge qu’avait épousée un homme nommé Joseph, alléluia.
Ant. 3 Joseph monta * de Nazareth, ville de Galilée, en Judée, dans la ville de David, qui est appelée Bethléem, alléluia.
Ant. 4 Ils vinrent donc en grande hâte, * et ils trouvèrent Marie et Joseph, et l’Enfant couché dans une crèche, alléluia.
Ant. 5 Or Jésus * avait environ trente ans, étant, comme l’on croyait, fils de Joseph, [1] alléluia.
Capitule. Gen. 19, 26.Les bénédictions de ton père seront fortifiées par les bénédictions de ses pères, jusqu’à ce que vienne le désir des collines éternelles ; qu’elles se répandent sur la tête de Joseph et sur la tête de celui qui est Nazaréen entre ses frères.

Hymnus Hymne
Te, Ioseph, célebrent ágmina cælitum,
Te cuncti résonent christíadum chori,
Qui clarus méritis, iunctus est ínclytæ
Casto fœdere Vírgini.
Que les chœurs célestes célèbrent ta gloire, ô Joseph !
Que les chants de tous les Chrétiens fassent résonner tes louanges !
Glorieux déjà par tes mérites, tu es uni
par une chaste alliance à l’auguste Vierge.
Almo cum túmidam gérmine cóniugem
Admírans, dúbio tángeris ánxius,
Afflátu súperi Fláminis Angelus
Concéptum Púerum docet.
Lorsque, en proie au doute et à l’anxiété,
tu t’étonnes de l’état où se trouve ton épouse,
un Ange vient t’apprendre que l’enfant qu’elle a conçu,
l’a été par l’opération de l’Esprit-Saint.
Tu natum Dóminum stringis, ad éxteras
Ægypti prófugum tu séqueris plagas ;
Amíssum Sólymis quæris, et ínvenis,
Miscens gáudia flétibus.
Le Seigneur est né, tu le presses dans tes bras ;
tu fuis avec lui vers les plages lointaines d’Égypte ;
tu le cherches à Jérusalem où tu l’as perdu, et tu le retrouves :
ainsi tes joies sont mêlées de larmes.
Post mortem réliquos sors pia cónsecrat,
Palmámque eméritos glória súscipit :
Tu vivens, Súperis par, frúeris Deo,
Mira sorte beátior.
D’autres sont glorifiés après une sainte mort, c
eux qui ont mérité là palme sont reçus au sein de la gloire ;
mais toi, par une admirable destinée, égal aux Saints, plus heureux même,
tu jouis dès cette vie de la présence de Dieu.
Nobis, summa Trias, parce precántibus,
Da Ioseph méritis sídera scándere :
Ut tandem líceat nos tibi pérpetim
Gratum prómere cánticum. Amen.
Trinité souveraine, exaucez nos prières, donnez-nous le pardon ;
que les mérites de Joseph nous aident à monter dans les cieux,
pour qu’il nous soit enfin donné de chanter à jamais
le cantique de la reconnaissance et de la félicité. Amen.
V/. Il l’a établi maître de sa maison, alléluia.
R/. Et prince de toutes ses possessions, alléluia.
Ant.au Magnificat Tandis qu’était fiancée * à Joseph Marie, Mère de Jésus, elle fut trouvée, avant qu’ils vinssent ensemble, enceinte par l’opération du Saint-Esprit, alléluia.

A MATINES.

Invitatoire. Louons notre Dieu, * En vénérant le bienheureux Joseph, notre protecteur, alléluia.

Hymne comme aux 1ères Vêpres ci-dessus.

Au premier nocturne.

Ant. [2]Un Ange du Seigneur * apparut à Joseph pendant son sommeil, et dit : Lève-toi, prends l’Enfant et sa Mère, fuis en Égypte et restes-y jusqu’à ce que je te parle, alléluia.

V/. Je glorifierai votre nom, alléluia.
R/. Parce que vous m’êtes devenu un aide et un protecteur, alléluia.

Du livre de la Genèse. Cap. 39, 1-6 ; 41, 37-49.

Le Patriarche Joseph
Première leçon. Joseph fut donc mené en Égypte, et Putiphar, Égyptien, eunuque de Pharaon et chef de l’armée, l’acheta de la main des Ismaélites par lesquels il avait été amené. Et le Seigneur fut avec lui, et c’était un homme prospérant en toutes choses : il demeura dans la maison de son maître, qui connaissait très bien que le Seigneur était avec lui, et que tout ce qu’il faisait, le Seigneur le dirigeait entre ses mains. Ainsi Joseph trouva grâce devant son maître, et il le servait ; préposé par lui à toutes choses, il gouvernait la maison qui lui était confiée, et tout ce qui avait été remis à ses soins. Et le Seigneur bénit la maison de l’Égyptien à cause de Joseph, et il multiplia tous ses biens, tant à la ville que dans les champs. Et il ne connaissait autre chose que le pain dont il se nourrissait. Or Joseph était beau de .visage et d’un aspect très agréable.
R/. Le peuple cria au roi, demandant des vivres. * Et il leur répondit : Allez à Joseph, alléluia. V/. Notre salut est en votre main ; ayez seulement égard à nous, et joyeux, nous servirons le roi. * Et il leur répondit : Allez à Joseph, alléluia.

Deuxième leçon. Ce conseil plut à Pharaon et à tous ses ministres ; et il leur demanda : Pourrons-nous trouver un tel homme qui soit plein de l’esprit de Dieu ? Il dit donc à Joseph : Puisque Dieu t’a montré tout ce que tu as dit, pourrai-je trouver quelqu’un plus sage que toi, et même semblable à toi ? C’est toi qui seras sur ma maison, et au commandement de ta bouche, tout le peuple obéira ; et c’est par le trône royal seulement que j’aurai sur toi la préséance. Pharaon dit encore à Joseph : Voici que je t’établis sur toute la terre d’Égypte. Et il ôta l’anneau de sa main, et il le mit à la main de Joseph : il le revêtit aussi d’une robe de fin lin, et lui mit autour du cou un collier d’or. Il le fit monter sur son second char, un héraut criant que tous devant lui fléchissent le genou, et sussent qu’il était préposé sur toute la terre d’Égypte.
R/. Dieu m’a établi comme père du roi. et maître de toute sa maison : * Il m’a élevé, pour sauver beaucoup de peuples, alléluia. V/. Venez à moi, et moi je vous donnerai tous les biens de l’Égypte, afin que vous vous nourrissiez de la moelle de cette terre. * Il m’a élevé, pour sauver beaucoup de peuples, alléluia.

Troisième leçon. Le roi dit aussi à Joseph : Moi je suis Pharaon, mais sans ton commandement nul ne remuera la main ou le pied dans toute la terre d’Égypte. Et il changea son nom, et il l’appela en langue égyptienne, Sauveur du monde. Il lui donna pour femme Aseneth, fille de Putiphar, prêtre d’Héliopolis. Joseph sortit donc pour visiter la terre d’Égypte. (Or il avait trente ans, quand il fut présenté au roi Pharaon), et il fit le tour de toutes les provinces de l’Égypte. Cependant arriva la fertilité des sept années, et les blés, mis en gerbes, furent recueillis dans les greniers de l’Égypte. Toute l’abondance des grains fut mise aussi en réserve dans chacune des villes. Et si grande fut l’abondance du froment, qu’il égalait le sable de la mer, et que la quantité surpassait toute mesure.
R/. Maintenant je mourrai joyeux, puisque j’ai vu ta face, et que je te laisse vivant après moi. Je n’ai pas été privé de te voir ; * De plus le Seigneur m’a montré ta postérité, alléluia. V/. Que celui qui me nourrit depuis mon enfance bénisse ces enfants, et que mon nom soit invoqué sur eux. * De plus le Seigneur m’a montré ta postérité, alléluia. Gloire au Père. * De plus le Seigneur m’a montré ta postérité, alléluia.

Au deuxième nocturne.

Ant. Un Ange du Seigneur * apparut à Joseph pendant son sommeil, disant : Lève-toi, prends l’Enfant et sa Mère, et va dans la terre d’Israël, car ils sont morts, ceux qui recherchaient la vie de l’Enfant, alléluia.

V/. Regardez du haut du ciel et voyez, et visitez cette vigne, alléluia.
R/. Et faites-la prospérer, alléluia.

Sermon de saint Bernardin de Sienne.

Quatrième leçon. C’est une règle universelle pour toutes les grâces accordées à quelque créature raisonnable : lorsque la bonté divine choisit quelqu’un pour l’honorer d’une grâce singulière ou l’élever à un état sublime, toujours elle accorde à cet élu tous les dons qui sont nécessaires à sa personne et à l’accomplissement de sa mis-sion.et elle l’orne libéralement de ces dons. Ce principe s’est surtout vérifié en saint Joseph, père putatif de notre Seigneur Jésus-Christ, et véritable époux de la Reine du monde, de la Souveraine des Anges. Choisi par le Père éternel pour être le fidèle nourricier et le gardien de ses plus grands trésors, c’est-à-dire de son Fils et de son épouse, il s’est acquitté très fidèlement de son office. Aussi le Seigneur lui a dit : « Serviteur bon et fidèle, entre dans la joie de ton Seigneur. »
R/. Vous m’avez donné la protection de votre salut, et votre droite m’a soutenu : * Vous êtes mon protecteur et la corne de mon salut, alléluia. V/. Je suis ton protecteur, et ta récompense grande à l’infini. * Vous êtes mon protecteur et la corne de mon salut, alléluia.

Cinquième leçon. Si vous considérez saint Joseph par rapport à toute l’Église du Christ, n’est-il point cet homme choisi et doué d’une prérogative unique, sous la garde duquel le Christ a été placé à son entrée dans le monde, et dont Dieu s’est servi pour sauvegarder l’ordre et l’honneur de cette naissance divine ? Si donc l’Église entière est redevable à la vierge mère, puisque c’est par Marie qu’elle a été rendue digne de recevoir le Sauveur, sans aucun doute, après Marie, l’Église doit une reconnaissance et une vénération singulières à saint Joseph. Il est comme la clef de l’ancien Testament, car c’est en lui que le mérite des Patriarches et des Prophètes a atteint le terme de ses espérances. Seul il possède réellement ce que la bonté divine promit à ces justes des temps anciens. I ! est donc figuré avec raison par ce Patriarche Joseph, qui conserva le froment aux peuples. Cependant il le surpasse, car il a fait plus que fournir aux Égyptiens le pain de la vie matérielle ; en nourrissant Jésus avec un soin très vigilant, il a procuré à tous les élus, le pain du ciel, qui donne la vie céleste.
R/. Il établira ses fils sous son abri et demeurera sous ses branches : il sera protégé sous son couvert contre la chaleur. * Et il reposera dans sa gloire, alléluia. V/. Espérez en lui, vous tous, l’assemblée du peuple ; répandez devant lui vos cœurs. * Et il reposera dans sa gloire, alléluia.

Sixième leçon. Assurément il ne faut point douter que le Christ, se comportant envers Joseph comme un fils envers son père, n’ait conservé dans les cieux, ou plutôt n’ait augmenté et consommé la familiarité, le respect et la dignité très sublime qu’il lui avait accordés pendant sa vie terrestre. C’est donc avec raison que, dans la parole divine citée plus haut, le Seigneur ajoute : « Entre dans la joie de ton Seigneur ». Bien que la joie de l’éternelle béatitude entre dans le cœur de l’homme, néanmoins le Seigneur a préféré dire : « Entre dans la joie », pour insinuer mystérieusement que cette joie n’est pas seulement en lui, mais qu’elle l’enveloppe de tous côtés, l’absorbe et le submerge comme un abîme sans fond. Souvenez-vous donc de nous, ô bienheureux Joseph, intercédez pour nous par le suffrage de votre prière, auprès de celui qui a passé pour votre fils ; et en même temps rendez-nous propice votre épouse, la bienheureuse Vierge mère de celui qui, avec le Père et le Saint-Esprit, vit et règne dans tous les siècles. Amen.
R/. Si des camps s’établissent contre moi, mon cœur ne craindra pas : * Si un combat est livré contre moi, j’y mettrai mon espérance, alléluia. V/. Vous avez toujours été l’objet de mes chants, parce que vous êtes un aide puissant. * Si un combat est livré contre moi, j’y mettrai mon espérance, alléluia. Gloire au Père. * Si un combat est livré contre moi, j’y mettrai mon espérance, alléluia.

Au troisième nocturne.

Ant. Joseph, s’étant levé, * prit l’Enfant et sa Mère et vint dans la terre d’Israël, et habita une ville qui est appelée Nazareth, alléluia.

V/. J’ai invoqué le Seigneur, Père de mon Seigneur, alléluia.
R/. Afin qu’il ne me laisse point sans secours au jour de ma tribulation, alléluia.

Lecture du saint Évangile selon saint Luc. Cap. 3, 21-23.
En ce temps-là : Il arriva que, tout le peuple recevant le baptême, Jésus ayant aussi été baptisé, comme il priait, le ciel s’ouvrit. Et le reste.

Homélie de saint Augustin, Évêque.

Septième leçon. Il est évident que si l’Évangéliste saint Luc emploie cette locution : « Comme on le croyait, fils de Joseph », c’est à cause de ceux qui pensaient que Jésus-Christ était issu de Joseph à la façon des autres hommes. Quant à ceux qui sont surpris que saint Matthieu, en descendant de David jusqu’à Joseph, et saint Luc, en remontant de Joseph jusqu’à David, donnent à Jésus-Christ des ancêtres différents, if leur est facile de remarquer que Joseph a pu avoir deux pères, celui qui l’avait engendré et celui qui l’avait adopté. C’était un antique usage, même chez le peuple de Dieu, que ceux qui n’avaient point d’enfants en adoptaient, et l’on peut en conclure que saint Luc a nommé comme père de Joseph, non pas celui qui l’avait engendré, mais celui qui l’avait adopté, et ce sont les aïeux de ce père adoptif qu’il énumère dans son Évangile en remontant de Joseph à David.
R/. Joseph, fils de David, ne crains point de prendre avec toi Marie, ton épouse ; car ce qui a été engendré en elle est du Saint-Esprit ; elle enfantera un fils. * Et tu lui donneras le nom de Jésus, alléluia. V/. Car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. * Et tu lui donneras le nom de Jésus, alléluia.

Huitième leçon. En effet, comme nous sommes obligés d’admettre la véracité des deux Évangélistes saint Matthieu et saint Luc, d’admettre en conséquence que l’un dresse la généalogie du père naturel de Joseph et l’autre celle de son père adoptif, lequel des deux a dû tracer plus probablement la généalogie du père adoptif ? N’est-ce pas celui qui n’a point voulu dire que Joseph avait été engendré par celui qu’il lui donne pour père ? Or saint Matthieu disant : « Abraham engendra Isaac, Isaac engendra Jacob ; » et continuant à employer ce même verbe engendrer .jusqu’à ce qu’il ait dit enfin : « Jacob engendra Joseph, » montre assez par là qu’il a suivi la ligne des ancêtres directs de Joseph, et a nommé le père qui l’avait engendré et non pas adopté.
R/. Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, fuis en Égypte : * Et restes-y, jusqu’à ce que je te parle, alléluia. V/. Afin que soit accomplie cette parole que le Seigneur a dite par le Prophète : J’ai rappelé mon fils de l’Égypte. * Et restes-y, jusqu’à ce que je te parle, alléluia. Gloire au Père. * Et restes-y, jusqu’à ce que je te parle, alléluia.

Neuvième leçon. Mais supposons même que saint Luc ait dit que Joseph avait été engendré par Héli, cette expression ne devrait point nous troubler et nous empêcher de croire que l’un des deux Évangélistes a mentionné le père naturel de Joseph, et l’autre son père adoptif. On peut dire, en effet, sans absurdité, que celui qui adopte un fils l’engendre, non selon la chair, mais par l’affection qu’il lui porte. C’est ainsi que Dieu, en nous donnant le pouvoir de devenir ses enfants, ne nous a pas engendrés de sa nature et de sa substance comme son Fils unique, mais nous a adoptés par amour [3]. A LAUDES.

Ant. 1 Jacob engendra * Joseph, époux de Marie, de laquelle est né Jésus, qui est appelé Christ, alléluia.
Ant. 2 Il fut envoyé * de Dieu, l’Ange Gabriel, dans la ville de Galilée, appelée Nazareth, à une Vierge qu’avait épousée un homme nommé Joseph, alléluia.
Ant. 3 Joseph monta * de Nazareth, ville de Galilée, en Judée, dans la ville de David, qui est appelée Bethléem, alléluia.
Ant. 4 Ils vinrent donc en grande hâte, * et ils trouvèrent Marie et Joseph, et l’Enfant couché dans une crèche, alléluia.
Ant. 5 Or Jésus * avait environ trente ans, étant, comme l’on croyait, fils de Joseph, alléluia.
Capitule. Gen. 19, 26.Les bénédictions de ton père seront fortifiées par les bénédictions de ses pères, jusqu’à ce que vienne le désir des collines éternelles ; qu’elles se répandent sur la tête de Joseph et sur la tête de celui qui est Nazaréen entre ses frères.

Hymnus Hymne
Cǽlitum Ioseph, decus atque nostræ
Certa spes vitæ, columénque mundi,
Quas tibi læti cánimus benígnus
Súscipe laudes.
Honneur des habitants du ciel, Joseph,
espérance assurée de notre vie, colonne du monde,
reçois, dans ta bonté, les louanges que nous t’offrons
avec joie en nos chants.
Te Sator rerum státuit pudícæ
Vírginis sponsum, voluítque Verbi
Te patrem dici, dedit et minístrum
Esse salútis.
Le Créateur de toutes choses t’a choisi
pour l’époux de la Vierge très pure,
il a voulu qu’on t’appelât le père de son Verbe,
il t’a donné d’être le ministre du salut.
Tu Redemptórem stábulo iacéntem,
Quem chorus Vatum cécinit futúrum,
Aspicis gaudens, humilísque natum
Numen adóras.
Le Rédempteur, dont le chœur des Prophètes a annoncé la venue,
tu le vois couché dans une étable,
tu le contemples avec joie, et tu adores humblement
ce Dieu nouveau-né.
Rex Deus regum, Dominátor orbis,
Cuius ad nutum tremit inferórum
Turba, cui pronus famulátur æther,
Se tibi subdit.
Le Roi, Dieu des rois, dominateur de l’univers,
celui dont le moindre signe fait trembler la troupe infernale
et que les cieux servent en s’inclinant,
se soumet à toi.
Laus sit excélsæ Tríadi perénnis,
Quæ tibi præbens súperos honóres,
Det tuis nobis méritis beátæ
Gáudia vitæ. Amen.
Louange éternelle à la très sainte Trinité
qui t’a déféré de sublimes honneurs ;
qu’elle nous donne, par tes mérites, les joies
de la vie bienheureuse. Amen.
V/. Vous m’avez donné la protection de votre salut, alléluia.
R/. Et votre droite m’a soutenu, alléluia.

Ant. au Bénédictus Joseph, fils de David, * ne crains point de prendre avec toi Marie, ton épouse, car ce qui a été engendré en elle est du Saint-Esprit, alléluia.

AUX DEUXIÈMES VÊPRES.

Les Antiennes et le Capitule de Laudes

Hymnus Hymne
Te, Ioseph, célebrent ágmina cælitum,
Te cuncti résonent christíadum chori,
Qui clarus méritis, iunctus est ínclytæ
Casto fœdere Vírgini.
Que les chœurs célestes célèbrent ta gloire, ô Joseph !
Que les chants de tous les Chrétiens fassent résonner tes louanges !
Glorieux déjà par tes mérites, tu es uni
par une chaste alliance à l’auguste Vierge.
Almo cum túmidam gérmine cóniugem
Admírans, dúbio tángeris ánxius,
Afflátu súperi Fláminis Angelus
Concéptum Púerum docet.
Lorsque, en proie au doute et à l’anxiété,
tu t’étonnes de l’état où se trouve ton épouse,
un Ange vient t’apprendre que l’enfant qu’elle a conçu,
l’a été par l’opération de l’Esprit-Saint.
Tu natum Dóminum stringis, ad éxteras
Ægypti prófugum tu séqueris plagas ;
Amíssum Sólymis quæris, et ínvenis,
Miscens gáudia flétibus.
Le Seigneur est né, tu le presses dans tes bras ;
tu fuis avec lui vers les plages lointaines d’Égypte ;
tu le cherches à Jérusalem où tu l’as perdu, et tu le retrouves :
ainsi tes joies sont mêlées de larmes.
Post mortem réliquos sors pia cónsecrat,
Palmámque eméritos glória súscipit :
Tu vivens, Súperis par, frúeris Deo,
Mira sorte beátior.
D’autres sont glorifiés après une sainte mort, c
eux qui ont mérité là palme sont reçus au sein de la gloire ;
mais toi, par une admirable destinée, égal aux Saints, plus heureux même,
tu jouis dès cette vie de la présence de Dieu.
Nobis, summa Trias, parce precántibus,
Da Ioseph méritis sídera scándere :
Ut tandem líceat nos tibi pérpetim
Gratum prómere cánticum. Amen.
Trinité souveraine, exaucez nos prières, donnez-nous le pardon ;
que les mérites de Joseph nous aident à monter dans les cieux,
pour qu’il nous soit enfin donné de chanter à jamais
le cantique de la reconnaissance et de la félicité. Amen.

V/. A l’ombre de celui que j’avais désiré, je me suis assis, alléluia.
R/. Et son fruit est doux à ma bouche, alléluia.

Ant. au Magnificat Mon Fils, pourquoi avez-vous agi ainsi * avec nous ? Voici que votre père et moi, fort affligés, nous vous cherchions, alléluia.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

La série des mystères du Temps pascal est suspendue aujourd’hui ; un autre objet attire pour un moment nos contemplations. La sainte Église nous propose de donner la journée au culte de l’Époux de Marie, du Père nourricier du Fils de Dieu, Patron de l’Église universelle. Au 19 mars cependant nous lui avons rendu notre hommage annuel : aussi n’est-ce pas proprement sa fête que nous allons célébrer en ce jour. Il s’agit d’ériger par la piété du peuple chrétien un monument de reconnaissance au puissant Protecteur, à Joseph, le recours et l’appui de tous ceux qui l’invoquent avec confiance. Assez de bienfaits lui ont mérité cet hommage ; la sainte Église se propose aujourd’hui, dans l’intérêt de ses enfants, de diriger leur confiance vers un secours si puissant et si opportun.

La dévotion à saint Joseph avait été réservée pour ces derniers temps. Le culte de cet admirable personnage, culte fondé sur l’Évangile même, ne devait pas se développer dans les premiers siècles de l’Église ; non pas que les fidèles, considérant le rôle sublime de saint Joseph dans l’économie du mystère de l’Incarnation, fussent entravés en quelque chose dans les honneurs qu’ils auraient voulu lui rendre ; mais la divine Providence avait ses raisons mystérieuses pour retarder le moment où la Liturgie devait prescrire chaque année les hommages publics à offrir à l’Époux de Marie. L’Orient précéda l’Occident, ainsi qu’il est arrivé d’autres fois, dans le culte spécial de saint Joseph ; mais au XVe siècle l’Église latine l’avait adopté tout entière ; et depuis lors il n’a cessé de faire les plus heureux progrès dans les âmes catholiques. Les grandeurs de saint Joseph ont été exposées au 19 mars ; le but de la présente fête n’est pas de revenir sur cet inépuisable sujet. Elle a son motif spécial d’institution qu’il est nécessaire de faire connaître.

La bonté de Dieu et la fidélité de notre Rédempteur à ses promesses s’unissent toujours plus étroitement de siècle en siècle, pour protéger en ce monde l’étincelle de vie surnaturelle qu’il doit conserver jusqu’au dernier jour. Dans ce but miséricordieux, une succession non interrompue de secours vient réchauffer, pour ainsi dire, chaque génération, et lui apporter un nouveau motif de confiance dans la divine Rédemption. A partir du XIIIe siècle, où le refroidissement du monde commença à se faire sentir, ainsi que l’Église elle-même nous en rend témoignage [4], chaque époque a vu s’ouvrir une nouvelle source de grâces. Ce fut d’abord la fête du très saint Sacrement, dont les développements ont produit successivement la Procession solennelle, les Expositions, les Saluts, les Quarante Heures. Ce fut ensuite la dévotion au saint Nom de Jésus, dont saint Bernardin de Sienne fut le principal apôtre, et celle du Via crucis ou Chemin de la Croix, qui produit tant de fruits de componction dans les âmes. Le XVIe siècle vit renaître la fréquente communion, par l’influence principale de saint Ignace de Loyola et de sa Compagnie. Au XVIIe fut promulgué le culte du sacré Cœur de Jésus, qui s’établit dans le siècle suivant. Au XIXe, la dévotion à la très sainte Vierge a pris des accroissements et une importance qui sont un des caractères surnaturels de notre temps. Le saint Rosaire, le saint Scapulaire, que nous avaient légués les âges précédents, ont été remis en honneur ; les pèlerinages aux sanctuaires de la Mère de Dieu, suspendus parles préjugés jansénistes et rationalistes, ont repris leur cours ; l’Archiconfrérie du Saint-Cœur de Marie a étendu ses affiliations dans le monde entier ; des prodiges nombreux sont venus récompenser la foi rajeunie ; enfin notre temps a vu le triomphe de l’Immaculée Conception, préparé et attendu dans des siècles moins favorisés.

Mais la dévotion envers Marie ne pouvait se développer ainsi sans amener avec elle le culte fervent de saint Joseph. Marie et Joseph ont une part trop intime dans le divin mystère de l’Incarnation, l’une comme Mère du Fils de Dieu, l’autre comme gardien de l’honneur de la Vierge et Père nourricier de l’Enfant-Dieu, pour que l’on puisse les isoler l’un de l’autre. Une vénération particulière envers saint Joseph a donc été la suite du développement de la piété envers la très sainte Vierge. Mais la dévotion à l’égard de l’Époux de Marie n’est pas seulement un juste tribut que nous rendons à ses admirables prérogatives ; elle est encore pour nous la source d’un secours nouveau aussi étendu qu’il est puissant, ayant été déposé entre les mains de saint Joseph par le Fils de Dieu lui-même. Écoutez le langage inspiré de l’Église dans la sainte Liturgie : « O Joseph, l’honneur des habitants du ciel, l’espoir de notre vie ici-bas, le soutien de ce monde [5] ! » Quel pouvoir dans un homme ! Mais aussi cherchez un homme qui ait eu avec le Fils de Dieu sur la terre des rapports aussi intimes que Joseph. Jésus daigna être soumis à Joseph ici-bas ; au ciel, il tient à glorifier celui dont il voulut dépendre, et à qui il confia son enfance avec l’honneur de sa Mère. Il n’est donc pas de limites au pouvoir de saint Joseph ; et la sainte Église nous invite aujourd’hui à recourir avec une confiance absolue à ce tout-puissant Protecteur. Au milieu des agitations terribles auxquelles le monde est en proie, que les fidèles l’invoquent avec foi, et ils seront protégés. En tous les besoins de l’âme et du corps, en toutes les épreuves et toutes les crises que le chrétien peut avoir à traverser, dans l’ordre temporel comme dans l’ordre spirituel, qu’il ait recours à saint Joseph, et sa confiance ne sera pas trompée. Le roi de l’Égypte disait à ses peuples affamés : « Allez à Joseph [6] » ; le Roi du ciel nous fait la même invitation ; et le fidèle gardien de Marie a plus de crédit auprès de lui que le fils de Jacob, intendant des greniers de Memphis, n’en eut auprès de Pharaon.

La révélation de ce nouveau refuge préparé pour les derniers temps a été d’abord communiquée, selon l’usage que Dieu garde pour l’ordinaire, à des unies privilégiées auxquelles elle était confiée comme un germe précieux ; ainsi en fut-il pour l’institution de la fête du Saint-Sacrement, pour celle du sacré Cœur de Jésus, et pour d’autres encore. Au XVIe siècle, sainte Thérèse, dont les écrits étaient appelés à se répandre dans le monde entier, reçut dans un degré supérieur les communications divines à ce sujet, et elle consigna ses sentiments et ses désirs dans sa Vie écrite par elle-même. On ne s’étonnera pas que Dieu ait choisi la réformatrice du Carmel pour la propagation du culte de saint Joseph, quand on se rappellera que ce fut par l’influence de l’Ordre des Carmes, introduit en Occident au XIIIe siècle, que ce culte s’établit d’abord dans nos contrées. Voués depuis tant de siècles à la religion envers Marie, les solitaires du Mont-Carmel avaient découvert avant d’autres le lien qui rattache les honneurs auxquels a droit la Mère de Dieu à ceux qui sont dus à son virginal Époux. Sur cette terre où s’est accompli le divin mystère de l’Incarnation, l’œil du fidèle plonge plus avant dans ses augustes profondeurs. Entouré de tant de souvenirs ineffables, le chrétien arrive plus promptement à comprendre que le Fils de Dieu prenant la nature humaine, s’il lui fallait une Mère, il fallait à cette Mère un protecteur ; en un mot que Jésus, Marie et Joseph forment à des degrés divers l’ensemble de relations et d’harmonies sous lesquelles l’ineffable mystère devait se produire sur la terre.

Voici donc comment s’exprime la séraphique Thérèse : « Je pris pour avocat et pour protecteur le glorieux saint Joseph, et je me recommandai très instamment à lui. Son secours éclata de la manière la plus visible. Ce tendre père de a mon âme, ce bien-aimé protecteur se hâta de me tirer de l’état où languissait mon corps, comme il m’a arrachée à des périls plus grands d’un autre genre, qui menaçaient mon honneur et mon salut éternel. Pour comble de bonheur, il m’a toujours exaucée au delà de mes prières a et de mes espérances. Je ne me souviens pas de lui avoir jamais rien demandé jusqu’à ce jour, qu’il ne l’ait accordé. Quel tableau je mettrais sous les yeux, s’il m’était donné de retracer les grâces insignes dont Dieu m’a comblée, et les dangers, tant de l’âme que du corps, dont il m’a délivrée par la médiation de ce bienheureux saint ! Le Très-Haut donne seulement grâce aux autres saints pour nous secourir dans tel ou tel besoin ; mais le glorieux saint Joseph, je le sais par expérience, étend son pouvoir à tous. Notre-Seigneur veut nous faire entendre par là que, de même qu’il lui fut soumis sur cette terre d’exil, reconnaissant en lui l’autorité d’un père nourricier et d’un gouverneur, de même il se plaît encore à faire sa volonté dans le ciel, en exauçant toutes ses demandes. C’est ce qu’ont vu comme moi, par expérience, d’autres personnes auxquelles j’avais conseillé de se recommander à cet incomparable Protecteur ; aussi le nombre des âmes qui l’honorent commence-t-il à être grand, et les heureux effets de sa médiation confirment de jour en jour la vérité de mes paroles [7]. »

Ces paroles, accompagnées de plusieurs autres témoignages de la même précision et de la même énergie, trouvèrent un écho dans les âmes. Elles avaient été semées en leur temps ; leur germination fut lente, mais elle fut sûre. Dès la première moitié du XVIIe siècle, le pressentiment qu’un jour l’Église dans sa Liturgie convierait les fidèles à recourir à leur puissant Protecteur, se manifestait chez les dévots clients de saint Joseph. Nous lisons ces paroles, que l’on dirait inspirées, dans un livre pieux public à Dijon en 1645 : « Beau soleil, père des jours, hâte ta course, fais vitement naître cette heure fortunée, en laquelle doivent être accomplis les oracles des saints, qui nous promettent que, sur le déclin du monde, on fera magnifiquement paraître toutes les grandeurs de saint Joseph ; qui nous assurent que Dieu même a tirera le rideau, et déchirera le voile qui nous a empêchés jusqu’à maintenant de voir à découvert les merveilles du sanctuaire de l’âme de Joseph ; qui prédisent que le Saint-Esprit agira incessamment dans le cœur des fidèles, pour les émouvoir à exalter la gloire de ce divin personnage, lui consacrant des maisons religieuses, lui bâtissant des temples et dressant des autels ; qui publient que, par tout l’empire de l’Église militante, on reconnaîtra pour Protecteur particulier ce saint qui l’a été de Jésus-Christ, fondateur du même empire ; qui nous font espérer que les Souverains Pontifes ordonneront, par un secret mouvement du ciel, que la fête de ce grand Patriarche soit solennellement célébrée par toute l’étendue du domaine spirituel de saint Pierre ; qui annoncent que les plus savants hommes de l’univers s’emploieront à la recherche des dons de Dieu cachés dans saint Joseph, et qu’ils y rencontreront des trésors de grâces incomparablement plus précieux et plus abondants, que n’en posséda la meilleure partie des prédestinés de l’Ancien Testament par l’espace de quarante siècles [8]. »

De si ardents désirs ont été comblés. Déjà depuis plus d’un siècle un Office en l’honneur du Patronage de saint Joseph avait été présenté à l’approbation du Siège Apostolique par l’Ordre des Carmes, et il avait été accepté. Un grand nombre d’Églises en avaient successivement sollicité et obtenu l’extension. Un dimanche avait été choisi pour la célébration de cette pieuse solennité, afin d’y intéresser le peuple fidèle, qui n’est pas appelé par le devoir à l’église au jour de la propre fête de saint Joseph. Cette fête principale tombant toujours en Carême, on choisit pour la seconde le troisième dimanche après Pâques, afin d’unir aux joies pascales les consolations et les espérances que cette solennité apporte avec elle. La nouvelle fête allait s’étendant peu à peu par des concessions locales, lorsque tout à coup un Décret apostolique du 10 septembre 1847 vint l’établir dans toute la chrétienté. A la veille des grandes tribulations de l’Église, Pie IX, par un instinct surnaturel, appelait Joseph au secours du troupeau confié au successeur de Pierre. Nous avons vu comment le titre et les honneurs de Patron de l’Église universelle sont venus, au temps marqué, donner satisfaction entière à la piété des fidèles, et confirmer leur confiance envers le puissant Protecteur qui jamais n’eut tant de maux à combattre, ni tant de fléaux a détourner.

Mettons donc notre confiance dans le pouvoir de l’auguste Père du peuple chrétien, Joseph, sur qui tant de grandeurs n’ont été accumulées qu’afin qu’il répandit sur nous, dans une mesure plus abondante que les autres saints, les influences du divin mystère de l’Incarnation dont il a été, après Marie, le principal ministre sur la terre.

Le troisième Dimanche après Pâques porte, dans L’Église grecque, le nom de Dimanche du Paralytique, parce qu’on y célèbre d’une manière particulière la commémoration du miracle que notre Seigneur opéra à la Piscine Probatique.

L’Église Romaine commence aujourd’hui, à l’Office des Matines, la lecture de l’Apocalypse de saint Jean.

A LA MESSE.

En cette fête dédiée à saint Joseph comme Protecteur des fidèles, la sainte Église, dans l’Introït, nous met à la bouche les paroles dans lesquelles David exprime la confiance qu’il a placée dans la Protection du Seigneur. Saint Joseph est le ministre de cette protection divine, et Dieu nous la promet, si nous nous adressons à son incomparable serviteur.

Dans la Collecte, l’Église relève le choix que Dieu a daigné faire de saint Joseph pour Époux de Marie, et elle nous apprend que ce choix a eu pour effet de nous assurer en lui un Protecteur, qui répondra toujours à nos hommages par son intercession toute-puissante.

ÉPÎTRE.

Cette magnifique prophétie de Jacob mourant, et révélant à son fils Joseph le sort glorieux qui l’attend dans sa personne et dans ses enfants, vient à propos en ce jour pour nous rappeler les touchantes relations que saint Bernard a si éloquemment relevées entre les deux Joseph. Nous les avons signalées au dix-neuf mars, et le pieux lecteur a pu se convaincre que le premier Joseph fut le type du second. Le vieux Patriarche, après avoir prophétisé la destinée de ses dix premiers enfants, s’arrête avec complaisance sur le fils de Rachel. Après avoir loué sa beauté, il rappelle les persécutions auxquelles il fut en butte de la part de ses frères, et les voies merveilleuses par lesquelles Dieu le délivra de leurs mains, et le conduisit à la puissance. De là Jacob montre ce fils de sa tendresse élevé en gloire, et devenu le type du second Joseph. Qui a mérité plus que l’Époux de Marie, le Protecteur des fidèles, d’être appelé « le Pasteur d’un peuple et la force d’Israël » ? Nous sommes tous sa famille : il veille sur nous avec amour ; et dans nos tribulations, nous pouvons appuyer sur lui notre confiance, comme sur un roc inébranlable. L’héritage de saint Joseph est l’Église, que les eaux du Baptême arrosent sans cesse et rendent féconde ; c’est là qu’il exerce son pouvoir bienfaisant sur ceux qui se confient en lui. Jacob promet au premier Joseph d’immenses bénédictions, dont l’effet durera jusqu’au jour où le Sauveur promis a descendra des « collines de l’éternité ». Alors commencera le ministère du second Joseph, ministère de secours et de protection, qui durera jusqu’au second avènement du Fils de Dieu. Enfin, si le premier Joseph est présenté dans la prophétie comme Nazaréen, c’est-à-dire consacre à Dieu et saint au milieu de ses frères, le second remplira l’oracle plus littéralement encore ; car non seulement sa sainteté dépassera celle du fils de Jacob, mais sa demeure sera Nazareth. C’est dans cette ville qu’il habitera avec Marie, dans cette ville qu’il reviendra au retour de l’Égypte, dans cette ville qu’il achèvera sa sainte carrière ; enfin pour avoir habité cette ville avec lui, son fils adoptif, Jésus, Verbe éternel, « sera appelé Nazaréen [9] ».

Dans le premier Verset alléluiatique on entend la voix de saint Joseph. Il invite les fidèles à recourir à lui, et leur promet un prompt secours. Dans le second, l’Église demande pour ses enfants qu’ils soient empressés à imiter la pureté de l’Époux de Marie, en même temps qu’elle implore pour eux son Patronage.

ÉVANGILE.

« Jésus était regardé comme le fils de Joseph ! » Ainsi l’amour filial de Jésus pour sa Mère, les égards dus à l’honneur de la plus pure des vierges, allèrent jusqu’à faire accepter au Fils de Dieu, durant trente années, le nom et l’extérieur de fils de Joseph. Joseph s’est entendu appeler père par le Verbe incréé dont le Père est éternel ; il a reçu d’un homme mortel les soins de l’enfance et les aliments dans ses premières années. Joseph a été le chef de la sainte famille de Nazareth, et Jésus a reconnu son autorité. L’économie de la divine incarnation exigeait ces étonnantes relations entre le créateur et la créature. Mais si le Fils de Dieu assis à la droite de son Père a retenu la nature humaine indissolublement unie à sa personne divine, il n’a pas non plus dépouillé les sentiments qu’il professa ici-bas envers les deux autres membres de la famille de Nazareth. Envers Marie, qui sera éternellement sa Mère dans l’ordre de l’humanité, sa tendresse filiale et ses égards n’ont fait que s’accroître ; mais nous ne pouvons douter que l’affection et la déférence qu’il eut pour son père d’adoption ne soient aussi représentées éternellement dans le cœur de l’Homme-Dieu. Nul mortel n’a eu avec Jésus des rapports aussi intimes et aussi familiers. Joseph, par ses soins paternels envers le fils de Marie, a fait ressentir la reconnaissance au Fils de l’Eternel ; il est juste de penser que des honneurs particuliers et un crédit supérieur dans le ciel ont acquitté cette reconnaissance. Telle est la croyance de l’Église, telle est la confiance des âmes pieuses, tel est le motif de l’institution de la solennité d’aujourd’hui.

Dans l’Offertoire formé des paroles du Psaume CXLVII, Jérusalem, c’est-à-dire l’Église, est félicitée du soin que Dieu a pris d’elle, en l’assurant contre ses ennemis par de forts remparts. La protection de saint Joseph est l’un des plus invincibles.

Dans la Secrète, l’Église implore pour ses enfants la grâce d’imiter le détachement du charpentier de Nazareth.

L’Antienne de la Communion est le passage de saint Matthieu dans lequel l’Evangéliste inscrit le titre glorieux de notre grand Protecteur : « Joseph, époux de Marie », et le titre plus glorieux encore de Marie, « de laquelle est né Jésus ».

La sainte Église demande dans la Postcommunion que saint Joseph, notre Protecteur durant la vie présente, veuille bien aussi intervenir dans l’intérêt de notre bonheur éternel.

Père et protecteur des fidèles, glorieux Joseph, nous bénissons notre mère la sainte Église qui, dans ce déclin du monde, nous a appris à espérer en vous. De longs siècles se sont écoulés sans que vos grandeurs fussent encore manifestées ; mais vous n’en étiez pas moins au ciel l’un des plus puissants intercesseurs du genre humain. Chef de la sainte famille dont un Dieu est membre, vous poursuiviez votre ministère paternel à notre égard. Votre action cachée se faisait sentir pour le salut des peuples et des particuliers ; mais la terre éprouvait vos bienfaits, sans avoir encore institué, pour les reconnaître, les hommages qu’elle vous offre aujourd’hui. Une connaissance plus étendue de vos grandeurs et de votre pouvoir, la proclamation de votre auguste Patronage, de votre Protectorat sur tous nos besoins, étaient réservées à ces temps malheureux où l’état du monde aux abois appelle des secours qui ne furent pas révélés aux âges précédents. Nous venons donc à vos pieds, ô Joseph ! afin de rendre hommage en vous à une puissance d’intercession qui ne connaît pas de limites, à une bonté qui embrasse tous les frères de Jésus dans une même adoption.

Nous savons, ô Marie, qu’il vous est agréable de voir honorer l’Époux que vous avez aimé d’une incomparable tendresse. Vous accueillez avec une faveur particulière nos demandes, lorsqu’elles vous sont présentées par ses mains. Les liens formés par le ciel à Nazareth subsisteront éternellement entre vous et Joseph ; et l’amour sans bornes que vous portez à votre Fils divin resserre encore l’affection que votre cœur si aimant conserve pour jamais à celui qui fut en même temps le nourricier de Jésus et le gardien de votre virginité. O Joseph, nous sommes aussi les fils de votre épouse Marie ; prenez dans vos bras tous ces nouveaux enfants, souriez à cette nombreuse famille, et daignez accepter nos instances que la sainte Église encourage, et qui montent vers vous plus pressantes que jamais.

Vous êtes « le soutien du monde , columen mundi », l’un des appuis sur lesquels il repose ; car le Seigneur, en vue de vos mérites et par déférence à votre prière, le souffre et le conserve malgré les iniquités qui le souillent. Votre effort est grand, ô Joseph, en ces temps « où les saints manquent, où les vérités sont diminuées [10] » ; il vous faut peser de tout le poids de vos mérites, pour que le fléau de la divine balance n’incline pas du côté de la justice. Daignez, ô Protecteur universel, ne pas vous lasser dans ce labeur ; l’Église de votre Fils adoptif vous en supplie aujourd’hui. Le sol miné par la liberté effrénée de l’erreur et du mal est, à chaque instant, sur le point de fondre sous ses pieds ; ne vous reposez pas un instant, et par votre intervention paternelle, hâtez-vous de lui préparer une situation plus calme.

Aucune de nos nécessités n’est étrangère à votre connaissance ni à votre pouvoir ; les moindres enfants de l’Église ont droit de recourir à vous jour et nuit, assurés de rencontrer près de vous l’accueil d’un père tendre et compatissant. Nous ne l’oublierons pas, ô Joseph ! Dans tous les besoins de nos âmes, nous nous adresserons à vous. Nous vous demanderons de nous aider dans l’acquisition des vertus dont Dieu veut que notre âme soit ornée, dans les combats que nous avons à soutenir contre notre ennemi, dans les sacrifices que nous sommes si souvent appelés à faire. Rendez-nous dignes d’être appelés vos fils, ô vous le Père des fidèles ! Mais votre souverain pouvoir ne s’exerce pas seulement dans les intérêts de la vie future ; l’expérience de tous les jours montre combien votre crédit est puissant pour nous obtenir la protection céleste dans les choses même du temps, lorsque nos désirs ne sont pas contraires aux desseins de Dieu. Nous osons donc déposer entre vos mains tous nos intérêts de ce monde, nos espérances, nos vœux et nos craintes. Le soin de la maison de Nazareth vous fut confié ; veuillez être le conseil et le secours de tous ceux qui remettent entre vos mains leurs affaires temporelles.

Auguste chef de la sainte Famille, la famille chrétienne est placée sous votre garde spéciale ; veillez sur elle en nos temps malheureux. Répondez favorablement à ceux et à celles qui s’adressent à vous, dans ces moments solennels où il s’agit pour eux de choisir l’aide avec lequel ils doivent traverser cette vie et préparer le passage à une meilleure. Maintenez entre les époux la dignité et le respect mutuel qui sont la sauvegarde de l’honneur conjugal ; obtenez-leur la fécondité, gage des bénédictions célestes. Que vos clients, ô Joseph, aient çn horreur ces infâmes calculs qui souillent ce qu’il y a de plus saint, attirent la malédiction divine sur les races, et menacent la société d’une ruine à la fois morale et matérielle. Dissipez des préjugés aussi honteux que coupables, remettez en honneur cette sainte continence dont les époux chrétiens doivent toujours conserver l’estime, et à laquelle ils sont tenus de rendre souvent hommage, sous peine de ressembler à ces païens dont parle l’Apôtre, « qui ne suivent que leurs appétits, parce qu’ils ignorent Dieu [11]. »

Une dernière prière encore, ô glorieux Joseph ! Il est dans notre vie un moment suprême, moment qui ne se présente qu’une fois, moment qui décide de tout pour l’éternité : c’est le moment de notre mort. Nous nous sentons cependant portés à l’envisager avec moins d’inquiétude, lorsque nous nous souvenons que la divine bonté en a fait l’un des principaux objets de votre souverain pouvoir. Vous avez été investi du soin miséricordieux de faciliter au chrétien qui recourt à vous, le passage du temps à l’éternité. C’est à vous, ô Joseph, que nous devons nous adresser pour obtenir une bonne mort. Cette prérogative vous était due, à vous dont l’heureuse mort, entre les bras de Jésus et de Marie, a fait l’admiration du ciel, et l’un des plus sublimes spectacles qu’ait offert la terre. Soyez donc notre recours, ô Joseph, à ce solennel et dernier instant de notre vie terrestre. Nous espérons en Marie, que nous supplions chaque jour de nous être propice à l’heure de notre trépas ; mais nous savons que Marie se réjouit de la confiance que nous avons en vous, et que là où vous êtes, elle daigne être aussi. Fortifiés par l’espérance en votre paternelle bonté, ô Joseph, nous attendrons avec calme cette heure décisive ; car nous savons que si nous sommes fidèles à vous la recommander, votre secours nous est assuré.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Cette fête, instituée par Pie IX dès le début de son pontificat, fut plus tard rendue obligatoire pour toute l’Église, à l’époque où, après l’occupation de Rome par les troupes de Victor-Emmanuel II, le Pontife déclara saint Joseph patron de la famille catholique opprimée, et confia à son patronage la défense de l’Église. L’objet de cette solennité est la fonction spéciale, mystérieusement confiée au très pur Époux de Marie, en vertu de laquelle, de même qu’il tenait la place du Père éternel dans la sainte Famille de Nazareth et en exerçait la patria potestas sur Jésus et Marie, il entoure maintenant de ses soins paternels l’Église catholique, extension et continuation de la société domestique de Bethléem et de Nazareth. En d’autres termes, le décret de la Sacrée Congrégation des Rites daté du 8 décembre 1870, où saint Joseph est déclaré Patron de l’Église universelle, n’est pas tant une libre élection de Pie IX, comme cela arrive parfois pour d’autres saints, choisis comme patrons de cités ou d’instituts, que la reconnaissance authentique d’un mystère évangélique et d’une disposition ineffable de Dieu envers la famille catholique.

La fête du patronage de saint Joseph fut d’abord fixée au IIIe dimanche après Pâques ; mais quand, lors de la réforme liturgique de Pie X, on voulut restituer à l’office dominical la préséance sur celui des saints, celui de saint Joseph dut lui aussi céder sa place, et on le fixa au mercredi précédent. En compensation, la fête fut élevée à l’honneur de solennité de première classe suivie d’une octave.

L’introït est moderne, on le voit aisément à sa structure, car l’antienne est tirée du psaume 32 et le verset suivant du 79e.

Dans la collecte, on indique avec une précision lumineuse la raison de l’immense sainteté et de la puissance de saint Joseph, raison qui doit être cherchée dans les fonctions qui lui furent attribuées au sein de la sainte Famille.

La lecture est tirée de la Genèse (XLIX, 22-16) et rapporte les bénédictions de Jacob mourant à son fils bien-aimé Joseph. Le vice-roi du Pharaon est le symbole d’un autre Joseph sur la tête duquel devaient se concentrer toutes les bénédictions messianiques jadis accordées aux Patriarches et aux Prophètes, et qui, élevé à l’honneur d’être appelé dans l’Évangile le Père de Jésus, les transmettrait à son tour à l’unique et véritable héritier du Père éternel, Jésus-Christ.

Des deux versets alléluiatique, le premier est tiré d’une antienne d’introït assignée primitivement au XIXe dimanche après la Pentecôte. Le texte ne se rencontre pas dans la Vulgate, aussi a-t-on pensé qu’il était emprunté à l’Itala.

Le deuxième verset est un distique : « Faites, ô Joseph, que nous menions une vie sans tache, protégée toujours par votre patronage. »

La lecture évangélique est tirée de saint Luc (III, 21-23) et traite de la double génération de Jésus. Tandis que le Père éternel proclame du haut du Ciel que c’est son Fils bien-aimé qui s’humilie en se plongeant dans les eaux du Jourdain, sous l’autorité de Jean-Baptiste, l’Esprit Saint guide la pensée et la phrase de l’Évangéliste pour attester que le même Jésus est vraiment fils de Marie, épouse de Joseph, et donc fils de David, d’Abraham et d’Adam.

L’antienne de l’offertoire est tirée du psaume 147 : « Jérusalem, rends gloire à Yahweh, loue, ô Sion, ton Dieu ; lui qui renforce les barres de tes portes, et qui bénit au milieu de toi tes fils. ». Ce renforcement des portes symbolise ici l’intercession des saints qui nous obtiennent la divine grâce, afin que nous tirions le plus grand fruit des sacrements. — Les véritables portes de l’Église et du Royaume de Dieu, les artères de la vie chrétienne, ce sont les sacrements.

La secrète est la suivante : « Nous confiant dans le patronage de l’Époux de votre très sainte Mère, nous supplions, Seigneur, votre clémence, afin que, méprisant toutes les choses caduques, nous vous aimions, vous, le vrai Dieu, d’une charité parfaite. » : La charité est appelée ici parfaite, parce qu’en elle consiste proprement la perfection chrétienne. La charité parfaite est celle qui quae sua sunt non quaerit, mais qui ordonne l’homme et tous ses actes à la gloire de Dieu.

La préface est de facture toute récente : le classique cursus romain fait ici défaut ; toutefois les gloires et la dignité de saint Joseph sont soigneusement exprimées.

L’antienne pour la Communion du peuple, à l’encontre des règles antiques, est tirée d’un texte évangélique différent de celui assigné à la messe de ce jour (Matth., I, 16) : « Jacob engendra Joseph, époux de Marie, de qui naquit Jésus, appelé le Christ. » Cette dénomination, il l’obtint de Dieu, qui unit sa sainte humanité à la nature du Verbe divin dans l’unité de personne, et le constitua Chef des anges et des hommes, Sauveur du genre humain et premier-né de toute la création.

Voici la prière d’action de grâces après la sainte Communion : « Désaltérés à la source même de la divine grâce, nous vous en supplions, Seigneur : comme vous nous réconfortez par la protection du bienheureux Joseph, ainsi accordez-nous, par ses mérites et par ses prières, d’arriver à la possession de la gloire céleste. » Dans sa liturgie, l’Église attribue à saint Joseph une grâce spéciale d’intercession en faveur des agonisants. Le très saint Patriarche eut, dans son agonie, pour l’assister, Jésus et Marie, entre lesquels il rendit son âme à Dieu. Cette mort privilégiée, due plutôt à la véhémence de son amour qu’à l’œuvre de la maladie, lui a valu la gloire d’être constitué par le Seigneur patron et avocat des fidèles qui se confient à lui en ce moment redoutable a quo pendet aeternitas.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Fais, O Joseph, que nous passions une vie innocente et qu’elle soit toujours en sûreté sous ton patronage.

Fête du patronage de Saint Joseph. — Dans la semaine du Bon Pasteur, l’Église célèbre la grande fête d’un autre Bon Pasteur, la fête de saint Joseph, patron de l’Église universelle. Lui qui reçut en dépôt les deux plus grands trésors de Dieu, Jésus et Marie, est aussi le protecteur de l’Église, le corps mystique du Christ, l’Épouse du Christ. Le 19 mars, nous avons célébré davantage la personne de saint Joseph et sa sainteté. Aujourd’hui, nous faisons du patronage du saint le mystère de la fête. Le culte de saint Joseph n’est pas encore très ancien. En Occident, il apparaît au XIVe siècle dans quelques Ordres religieux, par exemple chez les Servites (1324), les Franciscains (1399). Une nouvelle impulsion est donnée à ce culte par les grands prédicateurs de pénitence, comme saint Vincent Ferrier (+1418), saint Bernardin de Sienne (+1444). Dans les temps modernes, sainte Thérèse montra un grand zèle pour le culte de saint Joseph. Peu de temps après la canonisation de la sainte, la fête de saint Joseph fut élevée au rang de fête d’obligation. En 1847, Pie IX institua la fête du patronage de saint Joseph, le troisième dimanche après Pâques, pour l’Église universelle. Pie X donna une octave à cette fête et la transféra au mercredi qui suit le deuxième dimanche après Pâques. On sait que le mercredi est le jour particulièrement consacré au père nourricier de Jésus. — Sans vouloir aucunement faire tort au culte de saint Joseph, il serait très désirable, selon l’esprit de la liturgie, de transférer cette fête en dehors du temps pascal

La messe. — La messe commence immédiatement par la pensée de la fête : « Adjutor et protector. » — « Aide et protecteur ». Dans le verset, qui est emprunté à un autre psaume, le nom de Joseph est cité. L’Introït unit la fête avec le dimanche du Bon Pasteur. Le Christ confie son troupeau à la protection de son père nourricier. Dans la leçon, Joseph l’Égyptien apparaît comme la figure de saint Joseph (c’est la même chose dans les leçons du premier nocturne). Le passage est emprunté à la bénédiction que Jacob mourant donne à son fils Joseph. Cette bénédiction s’est accomplie de la manière la plus parfaite dans le père nourricier de Jésus. Ce que beaucoup de Patriarches ont désiré voir et n’ont point vu, saint Joseph l’a possédé. Sur sa tête repose la plénitude de la bénédiction. A l’Alléluia, saint Joseph s’offre lui-même comme protecteur : « Dans toutes les tribulations où vous m’invoquerez, je vous exaucerai, je serai toujours votre protecteur. » Invités par lui, nous faisons entendre sur-le-champ nos prières : « Fais, Ô Joseph, que nous passions une vie innocente... » L’Évangile du baptême de Jésus est choisi à cause de la phrase finale : « Il passait pour le fils de Joseph. » C’est dans ces paroles que se trouve exprimée la plus grande dignité du patron de l’Église. A l’Offertoire, nous invitons Jérusalem, l’Église, à louer Dieu qui, par saint Joseph, a fortifié les verrous de ses portes et nous a bénis, nous, les enfants de l’Église. La Communion contient une pensée eucharistique : « Joseph, l’époux de Marie, de laquelle est né Jésus ». Le Sauveur, Fils le Marie, nous le portons en nous.

La prière des Heures. — La prière des Heures porte toutes les marques d’un office nouveau, construit selon un système nouveau. Les antiennes contiennent toute l’histoire de saint Joseph, telle que la décrit l’Écriture. Les leçons du premier nocturne, ainsi que leurs répons, sont consacrées à la figure de saint Joseph, à Joseph l’Égyptien (le premier nocturne était toujours, autrefois, emprunté à l’Ancien Testament ; l’heure de minuit est le symbole de l’Ancienne Alliance). Au second nocturne, nous lisons un sermon édifiant de, saint Bernardin de Sienne : « Il y a, pour les grâces accordées à une créature raisonnable, une règle générale. Quand la grâce divine appelle un homme à une vocation particulière ou à une fonction de choix, elle lui accorde aussi tous les charismes utiles et nécessaires pour l’accomplissement de cette fonction ; elle les lui accorde même avec surabondance. C’est ce que nous voyons réalisé, d’une manière toute spéciale, chez saint Joseph, le père nourricier de Notre Seigneur Jésus-Christ et le véritable époux de la Reine du monde et de la Souveraine des anges. Il a été choisi par le Père éternel pour être le nourricier et gardien fidèle de ses plus chers trésors, c’est-à-dire de son Fils et de son Épouse ; et Joseph s’est acquitté de cette tâche de la manière la plus exacte. C’est pourquoi, à lui aussi, le Seigneur a dit : « Bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton Seigneur ! »... Si la sainte Église doit une grande reconnaissance à la Vierge Mère parce que c’est par elle qu’elle a reçu le Christ, elle doit aussi à saint Joseph, après Marie, une reconnaissance particulière et un culte particulier. Il est, pour ainsi dire, la clef de l’Ancien Testament par laquelle les Patriarches et les Prophètes ont reçu le fruit promis. C’est lui, en effet, qui a vraiment possédé ce que la divine faveur leur avait promis. C’est à bon droit que nous le comparons au Patriarche Joseph, qui conserva le froment pour tout le peuple. Mais notre Joseph est élevé bien au-dessus du Patriarche, car il n’a pas seulement gardé, pour les Égyptiens, le pain qui donnait la vie corporelle, mais il a gardé, pour tous les élus, le pain du ciel qui donne la vie éternelle et il l’a élevé avec le plus grand soin ».

[1] Certains traducteurs mettent ici : que l’on croyait fils de Joseph, mais d’autres plus nombreux rendent ce texte ainsi : Jésus étant comme l’on croyait fils de Joseph, car le saint époux d »Marie avait, de par la délégation divine, autant que par son chaste mariage et ses sentiments paternels, le droit de nommer Jésus son fils.

[2] Pendant le Temps pascal, les trois psuames de chacun des nocturnes des Matines sont dits sous une seule antienne.

[3] L’opinion de saint Augustin n’est pas la seule qui ait été émise au sujet de la double généalogie de Jésus-Christ. Un autre sentiment très ancien et très commun chez les Docteurs jusqu’au XVe siècle, regardant les deux généalogies comme propres à saint Joseph, en explique les différences par un usage juif, celui du lévirat. En Judée, quand une femme restait veuve et sans enfant, elle devenait t’épouse de son beau-frère ou d’un de ses proches, et les enfants qui naissaient de cette union prenaient le nom du premier mari défunt. De là, pour un grand nombre, la pluralité des généalogies, les lignes fictives ou légales s’adjoignant aux lignes naturelles ou à la descendance réelle. — Un troisième sentiment tient que saint Matthieu a donné la généalogie de saint Joseph et saint Luc celle de la sainte Vierge. Cette hypothèse semble plausible pour deux raisons : car il était naturel que saint Matthieu, écrivant pour les Juifs, fît voir que Jésus était héritier de David et qu’il prouvât par sa généalogie légale ou paternelle, qu’on ne pouvait contester au Christ le droit de succession. Il convenait également que saint Luc, qui écrivait pour les Gentils, considérât le Sauveur comme né de la femme, et qu’il exposât sa généalogie réelle (Bacuez) ; affirmant également sa descendance de David. « La tournure employée par S. Luc : Jésus que l’on croyait fils de Joseph, qui l’était d’Héli, favorise cette supposition, le nom de Marie étant supprimé, puisqu’il n’entrait pas dans les usages de mentionner les femmes dans les généalogies et celui d’Héli ou Eliakim semblant le même que celui de Joachim, père de Marie » (Thiriet). Chez le peuple Hébreu, on conservait avec soin les listes généalogiques, pour garder les titres des tribus et des familles, et particulièrement de la tribu de Lévi qui était vouée au culte du Seigneur, de la tribu de Juda et de la famille de David, desquelles devait naître le Messie. Hérode, en haine des anciennes familles devant lesquelles ressortait mieux sa qualité d’étranger, avait ordonné de brûler tous les documents généalogiques. Mais on avait dû en sauver quelques-uns : Joseph, en se faisant inscrire à Bethléem comme descendant de David avait dû faire la preuve. Les deux généalogies de S. Matthieu et de S. Luc paraissent empruntées à des actes publics : elles en ont la forme (Thiriet).

[4] Frigescente mundo. Oraison de la fête des Stigmates de saint François.

[5] « Cœlitum, Joseph, decus atque nostrae
Certa spes vite, columenque mundi. »(Hymne des Laudes de la fête du patronage de saint Joseph.).

[6] Gen. XLI, 55.

[7] Vie de sainte Thérèse. Traduction de Bouix, page 64.

[8] La gloire de saint Joseph, par le P. Jean Jacquinot, de la Compagnie de Jésus. Nouvelle édition, page 204.

[9] Matth. II, 23.

[10] Psalm. XI, 1.

[11] I Thess. IV, 5.