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08/07 Ste Elisabeth, reine et veuve

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, Le guide dans l’année liturgique  

Déposition le 4 juillet 1336. Canonisée par Urbain VIII en 1625 ; fête inscrite au 4 juillet comme semidouble ad libitum. En 1722, semidouble de précepte, mais transféré au 8 juillet après l’Octave des Sts Apôtres.

Textes de la Messe

die 8 Iulii
le 8 juillet
SANCTÆ ELISABETH
SAINTE ÉLISABETH
Reginæ, Viduæ
Reine et Veuve
III classis (ante CR 1960 : semiduplex)
IIIème classe (avant 1960 : semidouble)
Missa Cognóvi, de Communi non Virginum 2 loco, præter orationem sequentem :Messe Cognóvi, du Commun des Saintes Femmes II, sauf l’oraison suivante :
Ant. ad Introitum. Ps. 118, 75 et 120.Introït
Cognóvi, Dómine, quia .quitas iudícia tua, et in veritáte tua humiliásti me : confíge timóre tuo carnes meas, a mandátis tuis tímui. (T.P. Allelúia, allelúia.)J’ai reconnu, Seigneur, que vos jugements sont équitables, et que vous m’avez humilié selon votre justice. Transpercez ma chair par votre crainte ; je redoute vos jugements. (T.P. Alléluia, alléluia.)
Ps. Ibid., 1.
Beáti immaculáti in via : qui ámbulant in lege Dómini.Heureux ceux qui sont immaculés dans la voie, qui marchent dans la loi du Seigneur.
V/.Glória Patri.
Oratio.Collecte
Clementíssime Deus, qui beátam Elisabeth regínam, inter céteras egrégias dotes, béllici furóris sedándi prærogatíva decorásti : da nobis, eius intercessióne ; post mortális vitæ, quam supplíciter pétimus, pacem, ad ætérna gáudia perveníre. Per Dóminum nostrum.Dieu très clément, parmi tant d’autres qualités éminentes, vous avez donné à la bienheureuse reine Élisabeth la vertu d’apaiser les fureurs de la guerre : accordez-nous, par son intercession, qu’après avoir, pendant cette vie mortelle, joui de la paix, que nous vous demandons humblement, nous parvenions aux joies éternelles.
Léctio libri Sapiéntiæ.
Prov. 31, 10-31.
Mulíerem fortem quis invéniet ? Procul et de últimis fínibus prétium eius. Confídit in ea cor viri sui, et spóliis non indigébit. Reddet ei bonum, et non malum, ómnibus diébus vitæ suæ. Quæsívit lanam et linum, et operáta est consílio mánuum suárum. Facta est quasi navis institóris, de longe portans panem suum. Et de nocte surréxit, dedítque prædam domésticis suis, et cibária ancíllis suis. Considerávit agrum, et emit eum : de fructu mánuum suárum plantávit víneam. Accínxit fortitúdine lumbos suos, et roborávit bráchium suum. Gustávit, et vidit, quia bona est negotiátio eius : non exstinguétur in nocte lucérna eius. Manum suam misit ad fórtia, et dígiti eius apprehénderent fusum. Manum suam apéruit ínopi, et palmas suas exténdit ad páuperem. Non timébit dómui suæ a frigóribus nivis : omnes enim doméstici eius vestíti sunt duplícibus. Stragulátam vestem fecit sibi : byssus et púrpura induméntum eius. Nóbilis in portis vir eius, quando séderit cum senatóribus terræ. Síndonem fecit et véndidit, et cíngulum tradidit Chananǽo. Fortitúdo et decor induméntum eius, et ridébit in die novíssimo. Os suum apéruit sapiéntiæ, et lex cleméntiæ in lingua eius. Considerávit sémitas domus suæ, et panem otiósa non comédit. Surrexérunt fílii eius, et beatíssimam prædicavérunt : vir eius, et laudávit eam. Multæ fíliæ congregavérunt divítias, tu supergréssa es univérsas. Fallax grátia, et vana est pulchritúdo : mulier timens Dóminum, ipsa laudábitur. Date ei de fructu mánuum suárum, et laudent eam in portis ópera eius.Qui trouvera la femme forte ? C’est au loin et aux extrémités du monde qu’on doit chercher son prix. Le cœur de son mari se confie en elle, et il ne manquera point de dépouilles. Elle lui rendra le bien, et non le mal, tous les jours de sa vie. Elle a cherché la laine et le lin, et elle a travaillé avec des mains ingénieuses. Elle est comme le vaisseau d’un marchand, qui apporte son pain de loin. Elle se lève lorsqu’il est encore nuit, et elle donne la nourriture à ses domestiques, et les vivres à ses servantes. Elle a considéré un champ, et elle l’a acheté ; du fruit de ses mains elle a planté une vigne. Elle a ceint ses reins de force, et elle a affermi son bras. Elle a goûté, et elle a vu que son trafic est bon ; sa lampe ne s’éteindra point pendant la nuit. Elle a porté sa main à des choses fortes, et ses doigts ont saisi le fuseau. Elle a ouvert sa main à l’indigent, et elle a étendu ses bras vers le pauvre. Elle ne craindra point pour sa maison le froid de la neige, car tous ses domestiques ont un double vêtement. Elle s’est fait un vêtement de tapisserie ; elle se couvre de lin et de pourpre. Son mari est illustre aux portes de la ville, lorsqu’il est assis avec les anciens du pays. Elle a fait une tunique de lin et elle l’a vendue, et elle a livré une ceinture au Chananéen. Elle est revêtue de force et de beauté, et elle rira au dernier jour. Elle a ouvert sa bouche à la sagesse, et la loi de la clémence est sur sa langue. Elle a considéré les sentiers de sa maison, et elle n’a pas mangé son pain dans l’oisiveté. Ses fils se sont levés, et l’ont proclamée bienheureuse ; son mari s’est levé aussi, et l’a louée. Beaucoup de filles ont amassé des richesses ; toi, tu les as toutes surpassées. La grâce est trompeuse, et la beauté est vaine ; la femme qui craint le Seigneur est celle qui sera louée. Donnez-lui du fruit de ses mains, et que ses œuvres la louent aux portes de la ville.
Graduale. Ps. 44, 3 et 5.Graduel
Diffúsa est grátia in labiis tuis : proptérea benedíxit te Deus in ætérnum.La grâce est répandue sur vos lèvres ; c’est pourquoi Dieu vous a bénie à jamais et pour tous les siècles.
V/. Propter veritátem et mansuetúdinem et iustítiam : et de ducet te mirabíliter déxtera tua.V/. Pour la vérité, la douceur et la justice ; et votre droite vous conduira merveilleusement.
Allelúia, allelúia. V/. Ibid., 5. Spécie tua et pulchritúdine tua inténde, próspere procéde et regna. Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. Avec votre gloire et votre majesté, avancez, marchez victorieusement et régnez. Alléluia.
Post Septuagesimam, ommissis Allelúia et versu sequenti, diciturAprès la Septuagésime, on omet l’Alléluia et son verset et on dit :
Tractus.Trait
Veni, Sponsa Christi, áccipe corónam, quam tibi Dóminus præparávit in ætérnum : pro cuius amóre sánguinem tuum fudísti.Venez, épouse du Christ, recevez la couronne que le Seigneur vous a préparée pour l’éternité. C’est pour son amour que vous avez répandu votre sang.
V/. Ps. 44, 8 et 5. Dilexísti iustítiam, et odísti iniquitátem : proptérea unxit te Deus, Deus tuus, óleo lætítiæ præ consórtibus tuis.V/. Vous avez aimé la justice et haï l’iniquité. C’est pourquoi Dieu, votre Dieu, vous a ointe d’une huile d’allégresse d’une manière plus excellente que toutes vos compagnes.
V/. Spécie tua et pulchritúdine tua inténde, próspere procéde et regna.V/. Avec votre gloire et votre majesté, avancez, marchez victorieusement et régnez.
Tempore paschali omittitur graduale, et eius loco dicitur :Au Temps pascal, on omet le graduel et à sa place on dit :
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 44, 5. Spécie tua et pulchritúdine tua inténde, próspere procéde et regna.Allelúia, allelúia. V/. Avec votre gloire et votre majesté, avancez, marchez victorieusement et régnez.
Allelúia. V/. Propter veritátem et mansuetúdinem et iustítiam : et dedúcet te mirabíliter déxtera tua. Allelúia.Allelúia. V/. Pour la vérité, la douceur et la justice ; et votre droite voua conduira merveilleusement. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Matthǽum.Suite du Saint Évangile selon saint Mathieu.
Matt 13, 44-52
In illo témpore : Dixit Iesus discípulis suis parábolam me : Símile est regnum cælórum thesáuro abscóndito in agro : quem qui invénit homo, abscóndit, et præ gáudio illíus vadit, et vendit univérsa, quæ habet, et emit agrum illum. Iterum símile est regnum cælórum hómini negotiatóri, quærénti bonas margarítas. Invénta autem una pretiósa margaríta, ábiit, et véndidit ómnia, quæ hábuit, et emit eam. Iterum símile est regnum cælórum sagénse, missæ in mare et ex omni génere píscium congregánti. Quam, cum impléta esset, educéntes, et secus litus sedéntes, elegérunt bonos in vasa, malos autem foras misérunt. Sic erit in consummatióne sǽculi : exíbunt Angeli, et separábunt malos de médio iustórum, et mittent eos in camínum ignis : ibi erit fletus et stridor déntium. Intellexístis hæc ómnia ? Dicunt ei : Etiam. Ait illis : Ideo omnis scriba doctus in regno cælórum símilis est hómini patrifamílias, qui profert de thesáuro suo nova et vétera.En ce temps-là : Jésus dit à ses disciples cette parabole : "Le Royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ. Quand un homme le trouve, il le cache, puis, dans sa joie, il s’en va, il vend tout ce qu’il possède, et il achète ce champ. Ou encore : Le Royaume des Cieux est comparable à un marchand qui recherche des perles fines. Quand il trouve une perle de grand prix, il s’en va, il vend tout ce qu’il possède, et il l’achète. Ou encore : Le Royaume des Cieux est comparable à un filet qu’on jette dans la mer et qui ramasse des poissons de toutes sortes. Quand il est rempli, on le tire sur le rivage ; on s’assied, et on recueille dans des paniers ce qui est bon, mais le mauvais, on le jette. Ainsi en sera-t-il à la fin du monde : les anges sortiront, ils sépareront les méchants d’avec les justes, et ils les jetteront dans la fournaise de feu. Là, seront les pleurs et les grincements de dents. Avez-vous compris tout cela ?" Ils répondirent : "Oui". Il leur dit : "C’est pourquoi tout scribe instruit du Royaume des Cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et de l’ancien."
Ant. ad Offertorium. Ps. 44. 3.Offertoire
Diffúsa est grátia in lábiis tuis : proptérea benedíxit te Deus in ætérnum, et in sǽculum sǽculi. (T.P. Allelúia.)La grâce est répandue sur vos lèvres ; c’est pourquoi Dieu vous a bénie à jamais et pour tous les siècles. (T.P. Alléluia.)
Secreta.Secrète
Accépta tibi sit, Dómine, sacrátæ plebis oblátio pro tuórum honóre Sanctórum : quorum se méritis de tribulatióne percepísse cognóscit auxílium. Per Dóminum nostrum.Qu’elle vous soit agréable, Seigneur, l’offrande que vous fait votre peuple saint en l’honneur de vos Saints, par les mérites desquels il reconnaît avoir reçu du secours dans la tribulation.
Ant. ad Communionem. Ps. 44, 8.Communion
Dilexísti iustítiam, et odísti iniquitátem : proptérea unxit te Deus, Deus tuus, óleo lætítiæ præ consórtibus tuis. (T.P. Allelúia.)Vous avez aimé la justice et haï l’iniquité ; c’est pourquoi Dieu, votre Dieu, vous a ointe d’une huile d’allégresse d’une manière plus excellente que toutes vos compagnes. (T.P. Alléluia.)
Postcommunio.Postcommunion
Satiásti, Dómine, famíliam tuam munéribus sacris : eius, quǽsumus, semper interventióne nos réfove, cuius sollémnia celebrámus. Per Dóminum.Vous avez, Seigneur, nourri votre famille de dons sacrés ; ranimez-nous toujours grâce à l’intervention de la sainte dont nous célébrons la fête.

Office

Avant 1955 : Aux Vêpres des Sts Cyrille et Méthode, commémoraison de Ste Élisabeth.

Ant. Et nunc, reges, intellígite, erudímini, qui iudicátis terram. Ant. Et maintenant, ô rois, comprenez ; instruisez-vous, vous qui jugez la terre [1].
V/. Ora pro nobis, beáta Elísabeth. V/. Priez pour nous, bienheureuse Élisabeth.
R/. Ut digni efficiámur promissiónibus Christi. R/. Afin que nous soyons rendus dignes des promesses du Christ.

A Matines avant 1960.

Invitatorium Invitatoire
Laudémus Deum nostrum * In sanctis opéribus beátæ Elísabeth.Louons notre Dieu, * Dans les œuvres saintes de la bienheureuse Élisabeth.
Psaume 94 (Invitatoire)
Hymnus Hymne [2]
Domáre cordis ímpetus Elísabeth
Fortis, inópsque Deo
Servíre, regno prǽtulit.
Dompter les mouvements de son cœur
et servir Dieu dans la pauvreté,
c’est ce que l’héroïque Élisabeth préféra à un royaume.
En fúlgidis recépta cæli sédibus,
Sidereǽque domus
Ditáta sanctis gáudiis.
Aussi la voilà reçue dans l’éblouissant palais du ciel,
et inondée des saintes délices
de la demeure céleste.
Nunc regnat inter cǽlites beátior,
Et premit astra, docens
Quæ vera sint regni bona.
Plus heureuse à présent de régner parmi les habitants des cieux,
elle domine les astres, nous apprenant
quels sont les biens de la véritable royauté.
Patri potéstas, Filióque glória,
Perpetuúmque decus
Tibi sit, alme Spíritus.
Amen.
Puissance au Père, gloire au Fils,
honneur éternel à vous,
Esprit vivifiant.
Amen.

Au deuxième nocturne.

Quatrième leçon. Élisabeth, de la famille royale d’Aragon, naquit l’an du Christ mil deux cent soixante et onze. En présage de sa future sainteté, ses parents, laissant de côté, contre l’usage, le nom de la mère et de l’aïeule, voulurent qu’on l’appelât au baptême du nom de sa grand’ tante maternelle, sainte Élisabeth, duchesse de Thuringe. Dès qu’elle vint au monde, on vit qu’elle serait l’heureuse pacificatrice des royaumes et des rois, car la joie causée par sa naissance réconcilia son père et son aïeul divisés jusque-là. Son père, admirant les heureuses dispositions qu’elle montrait en grandissant, disait que sa fille surpassait de beaucoup en vertu, à elle seule, toutes les femmes de la maison royale d’Aragon. Dédaignant la parure, fuyant le plaisir, adonnée au jeûne, aux prières continuelles, aux œuvres charitables, elle menait une vie si céleste que le roi, plein de vénération, avait coutume d’attribuer aux mérites de sa fille la prospérité de ses affaires et du royaume. La réputation d’Élisabeth s’étendant partout, plusieurs princes la recherchèrent comme épouse. Ses parents l’accordèrent à Denys, roi de Portugal, et le mariage fut célébré avec les cérémonies de la sainte Église.

Cinquième leçon. Dans la vie conjugale, Élisabeth ne mettait pas moins de soin à cultiver les vertus qu’à élever ses enfants, s’appliquant à plaire à son époux, mais encore plus à Dieu. Pendant près de la moitié de l’année, elle ne vivait que de pain et d’eau. Étant malade, et les médecins lui ayant prescrit l’usage du vin, comme elle refusait d’en boire, l’eau qu’on lui présenta fut changée en vin. Une pauvre femme dont elle baisa l’horrible ulcère s’en trouva guérie subitement. Les pièces de monnaie qu’elle s’apprêtait à distribuer aux indigents, et qu’elle voulait cacher au roi, furent changées en rosés dans la saison d’hiver. Elle rendit la vue à une jeune fille aveugle de naissance ; délivra, rien que par le signe de la croix, quantité de personnes atteintes de graves maladies, et opéra beaucoup d’autres miracles de ce genre. Des monastères, des établissements hospitaliers et des églises furent construits par ses soins, et dotés par sa munificence. Elle fut admirable de zèle pour apaiser les discordes des rois, et infatigable pour secourir les misères publiques et privées de l’humanité.

Sixième leçon. Modèle de toutes les vertus pour les jeunes filles pendant sa jeunesse, et pour les épouses pendant son mariage, elle le fut aussi pour les veuves, dans l’isolement. Après la mort du roi Denys, prenant aussitôt l’habit des religieuses de sainte Claire, elle assista sans faiblir aux funérailles du prince, et se rendit peu après à Compostelle, afin d’y offrir pour l’âme de son époux de nombreux présents, des étoffes de soie, de l’argent, de l’or et des pierres précieuses. A son retour, elle convertit en pieux et saints usages tout ce qui lui restait de cher et de précieux. C’est ainsi qu’elle acheva le monastère vraiment royal de Coïmbre qu’elle avait fondé pour des vierges. Nourrir les pauvres, protéger les veuves, défendre les orphelins, soulager tous les malheureux, était toute sa vie ; elle vivait, non pour elle, mais pour Dieu et pour le bien de tous. Dans le but de rétablir la paix entre deux rois, son fils et son gendre, elle se rendit à Estrenoz, place forte célèbre : ce fut là que, tombée malade par suite des fatigues de la route, visitée par la Vierge Mère de Dieu, elle mourut saintement, le quatrième jour de juillet de l’an mil trois cent trente-six. Après sa mort, la sainteté d’Élisabeth fut marquée par un grand nombre de miracles, spécialement par l’odeur très suave de son corps exempt de corruption depuis bientôt trois siècles ; aussi est-elle restée constamment célèbre sous le surnom de la sainte reine. Enfin, l’année du jubilé, l’an de notre salut mil six cent vingt-cinq, aux applaudissements de tout le monde chrétien et au milieu d’un immense concours, Urbain VIII l’a solennellement inscrite au nombre des Saints.

A Laudes.

Hymnus Hymne [3]
Opes decúsque régium relíqueras,
Elísabeth, Dei dicáta númini :
Recépta nunc beáris inter Angelos ;
Libens ab hóstium tuére nos dolis.
Tu as renoncé à l’opulence et aux honneurs du trône,
Élisabeth, pour te consacrer au service de la divine majesté :
admise parmi les Anges et désormais bienheureuse,
qu’il te plaise de nous protéger contre des ennemis perfides.
Præi, viámque, dux salútis, índica :
Sequémur : O sit una mens fidélium,
Odor bonus sit omnis áctio, tuis
Id ínnuit rosis opérta cáritas.
Sois notre guide et montre-nous le chemin du salut :
nous te suivrons : Oh ! puissent les fidèles avoir un même esprit,
que toutes leurs actions soient de bonne odeur,
comme ta charité dissimulée sous des roses.
Beáta cáritas, in arce síderum
Potens locáre nos per omne sǽculum :
Patríque, Filióque summa glória,
Tibíque laus perénnis, alme Spíritus.
Amen.
Bienheureuse charité, tu as le pouvoir de nous placer
pour toujours au plus haut des cieux ;
gloire souveraine au Père et au Fils,
et à vous, Esprit vivifiant, louange éternelle.
Amen.
V/. Méritis et précibus beátæ Elísabeth. V/. Grâce aux mérites et aux prières de la bienheureuse Élisabeth [4].
R/. Propítius esto, Dómine, pópulo tuo. R/. Seigneur, soyez propice à votre peuple.
Ad Bened. Ant. Tu glória Ierúsalem, * tu lætítia Israël, tu honorificéntia pópuli tui. Ant. au Benedictus Vous êtes la gloire de Jérusalem, * vous êtes la joie d’Israël, vous êtes l’honneur de votre peuple [5].

Aux Vêpres.

Hymnus Hymne [6]
Domáre cordis ímpetus Elísabeth
Fortis, inópsque Deo
Servíre, regno prǽtulit.
Dompter les mouvements de son cœur
et servir Dieu dans la pauvreté,
c’est ce que l’héroïque Élisabeth préféra à un royaume.
En fúlgidis recépta cæli sédibus,
Sidereǽque domus
Ditáta sanctis gáudiis.
Aussi la voilà reçue dans l’éblouissant palais du ciel,
et inondée des saintes délices
de la demeure céleste.
Nunc regnat inter cǽlites beátior,
Et premit astra, docens
Quæ vera sint regni bona.
Plus heureuse à présent de régner parmi les habitants des cieux,
elle domine les astres, nous apprenant
quels sont les biens de la véritable royauté.
Patri potéstas, Filióque glória,
Perpetuúmque decus
Tibi sit, alme Spíritus.
Amen.
Puissance au Père, gloire au Fils,
honneur éternel à vous,
Esprit vivifiant.
Amen.
V/. Ora pro nobis, beáta Elísabeth. V/. Priez pour nous, bienheureuse Élisabeth.
R/. Ut digni efficiámur promissiónibus Christi. R/. Afin que nous soyons rendus dignes des promesses du Christ.
Ad Magnificat Ant. Elísabeth, * pacis et pátriæ mater, in cælo triúmphans, dona nobis pacem. Ant. au Magnificat Élisabeth, * mère de la paix et de la patrie, triomphante dans le ciel, donnez-nous la paix.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Après Marguerite d’Écosse et Clotilde de France, une autre souveraine éclaire de ses rayons le Cycle sacré. Sur la limite extrême qui sépare au midi la chrétienté de l’infidélité musulmane, l’Esprit-Saint veut affermir par elle dans la paix les conquêtes du Christ, et préparer d’autres victoires. Élisabeth est son nom : nom béni, qui, à l’heure où elle vient au monde, embaume depuis un demi-siècle déjà la terre de ses parfums ; présage que la nouvellement née, séduite par les roses qui s’échappent du manteau de sa tante de Thuringe, va faire éclore en Ibérie les mêmes fleurs du ciel.

Hérédité mystérieuse des saints ! En l’année même où notre Élisabeth naissait loin du berceau où la première avait ravi les cieux à son lever si doux et pacifié la terre, une autre nièce de celle-ci, la Bienheureuse Marguerite, partie de Hongrie, quittait la vallée d’exil. Vouée à Dieu dès le sein de sa mère pour le salut des siens au milieu de désastres sans nom, elle avait rempli les espérances qui de si bonne heure étaient venues reposer sur sa tête ; les Mongols refoulés d’Occident, les loups chassés à leur suite de l’antique Pannonie redevenue quelque temps un désert, la civilisation fleurissant à nouveau sur les bords du Danube et de la Theiss : tant de bienfaits furent les fruits des vingt-huit années de prière et d’innocence que Marguerite passa ici-bas, attendant l’heure où elle transmit à la sainte que nous fêtons présentement la mission de continuer sous d’autres cieux l’œuvre de ses devancières.

Il était temps que le Seigneur dirigeât sur l’Espagne un rayon de sa grâce. Le treizième siècle finissait, laissant le monde à la dislocation et à la ruine. Las de combattre pour le Christ et bannissant l’Église de leurs conseils, les rois se retranchaient dans un isolement égoïste, où le conflit des ambitions tendait chaque jour à remplacer l’aspiration commune de ce grand corps qui avait été la chrétienté. Désastreuse pour tout l’Occident, pareille tendance l’était plus encore en face du Maure, dans cette noble contrée où la croisade avait multiplié les royaumes en autant de postes avancés contre l’ennemi séculaire. L’unité de vues, sacrifiant tout à l’achèvement de la délivrance, pouvait seule, dans ces conditions, maintenir les successeurs de Pelage à la hauteur des illustres souvenirs qui les avaient précédés. Malheureusement il s’en fallut que ces princes, presque tous héros sur les champs de bataille, trouvassent toujours la force d’âme suffisante pour mettre au-dessus de mesquines rivalités le rôle sacré que leur confiait la Providence. Vainement alors le Pontife romain s’efforçait de ramener les esprits au sentiment des intérêts de la patrie et du nom chrétien ; les tristes passions de l’homme déchu étouffaient sa voix en des cœurs magnanimes par tant d’autres côtés, et le Croissant applaudissait aux luttes intestines qui retardaient sa défaite. Navarre, Castille, Aragon, Portugal, sans cesse aux prises, voyaient dans chaque royaume le fils armé contre le père, le frère disputant au frère par lambeaux l’héritage des aïeux.

Qui rappellerait l’Espagne aux traditions, encore récentes, grâce à Dieu, de son Ferdinand III ? Qui grouperait de nouveau les volontés discordantes en un faisceau terrible au Sarrasin et glorieux au Christ ? Jacques Ier d’Aragon, le digne émule de saint Ferdinand dans la valeur et la victoire, avait épousé Yolande, fille d’André de Hongrie ; le culte de la sainte duchesse de Thuringe, dont il était devenu le beau-frère, fleurit dès lors au delà des Pyrénées ; le nom d’Élisabeth, transformé le plus souvent en celui d’Isabelle, devint comme un joyau de famille dont aimèrent à s’orner les princesses des Espagnes. La première qui le porta fut la fille de Jacques et d’Yolande, mariée à Philippe III de France, successeur de notre saint Louis ; la seconde fut la petite-fille du même Jacques Ier, l’objet des hommages de l’Église en ce jour, et dont le vieux roi, par un pressentiment prophétique, aimait à dire qu’elle l’emporterait sur toutes les femmes sorties du sang d’Aragon.

Héritière des vertus comme du nom de la chère sainte Élisabeth, elle devait mériter en effet d’être appelée mère de la paix et de la patrie. Au prix d’héroïques renoncements et par la vertu toute-puissante de la prière, elle apaisa les lamentables dissensions des princes. Impuissante un jour à empêcher la rupture de la paix, on la vit se jeter sous une grêle de traits entre deux armées aux prises, et faire tomber des mains des soldats leurs armes fratricides. Ainsi prépara-t-elle, sans avoir la consolation de le voir de ses yeux, le retour à la grande lutte qui ne devait prendre fin qu’au siècle suivant, sous les auspices d’une autre Isabelle, digne d’être sa descendante et de joindre à son nom le beau titre de Catholique. Quatre ans après la mort de notre sainte, la victoire de Salado, remportée sur six cent mille infidèles par les guerriers confédérés de l’Espagne entière, montrait déjà au monde ce qu’une femme avait pu, malgré les circonstances les plus contraires, pour ramener son pays aux nobles journées de l’immortelle croisade qui fait sa gloire à jamais.

Urbain VIII, qui inscrivit Élisabeth au nombre des Saints, a composé en son honneur un Office propre entier.

Selon l’invitation que l’Église adresse en ce jour à tous ses fils [7], nous louons Dieu pour vos œuvres saintes, ô bienheureuse Élisabeth ! Plus forte que tous ces princes au milieu desquels vous apparûtes comme l’ange de la patrie, vous portiez dans la vie privée l’héroïsme que vous saviez au besoin déployer comme eux sur les champs de bataille. Car c’était Dieu qui, par sa grâce, était le principe de votre conduite, comme sa gloire en était l’unique but. Or la divine gloire se complaît dans les renoncements qui ont le Seigneur pour seul témoin, autant et souvent plus que dans les œuvres admirées justement de tout un peuple. C’est qu’en effet sa grâce souvent y paraît plus puissante ; et presque toujours, dans l’ordre de sa Providence, les bénédictions éclatantes accordées aux nations relèvent de ces renoncements ignorés. Que de combats célèbres dans les fastes des peuples, ont été tout d’abord livrés et gagnés, sous l’œil de la Trinité sainte, en quelque point ignoré de ce monde surnaturel où les élus sont aux prises avec tout l’enfer et parfois Dieu lui-même ! Que de traités de paix fameux furent premièrement conclus dans le secret d’une seule âme, entre le ciel et la terre, comme prix de ces luttes de géants que les hommes méconnaissent ou méprisent ! Laissons passer la figure de ce monde [8] ; et ces profonds politiques qui dirigent, assure-t-on, la marche des événements, les négociateurs vantés, les fiers guerriers qu’exalte la renommée, apparaîtront pour ce qu’ils sont an palais de l’éternelle histoire : vains trompe-l’œil, masques d’un jour, ornements de façade qui voilèrent ici-bas les noms seuls dignes de l’immortalité.

Gloire donc à vous, par qui le Seigneur daigne dès maintenant lever un coin de ce voile qui dérobe aux humains les réalités du gouvernement de ce monde ! Votre noblesse, au livre d’or des élus, repose sur des titres meilleurs que ceux que vous teniez de votre naissance. Fille et mère de rois, vous aussi pourtant étiez reine, et commandiez sur une terre glorieuse ; mais plus glorieux est au ciel le trône de famille, où vous rejoignez la première Élisabeth, Marguerite, Hedwige, où d’autres vous suivront à leur tour, justifiant du même sang généreux qui coula dans vos veines.

Souvenez-vous cependant, ô mère de la patrie, que la puissance qui vous fut donnée ici-bas n’a point cessé de vous appartenir, quand le Dieu des armées vous a rappelée de ce monde pour triompher dans les cieux. La situation n’est plus la même qu’autrefois sur ce sol ibérique, qui vous doit plus qu’à bien d’autres son indépendance ; mais si les factions d’aujourd’hui ne risquent plus de ramener le Maure, il s’en faut qu’elles maintiennent le Portugal et l’Espagne à la hauteur de leurs nobles traditions : faites que ces peuples retrouvent enfin la voie des glorieuses destinées que leur marque la Providence. Du ciel où votre pouvoir ne connaît plus de frontières, jetez aussi un regard miséricordieux sur le reste du monde ; voyez les formidables armements dans lesquels les nations, oublieuses de tout autre droit que celui de la violence, engloutissent leurs richesses et leurs forces vives ; l’heure est-elle venue de ces guerres atroces, signal de la fin, où l’univers se détruira lui-même ? O mère de la paix, entendez l’Église, la mère des peuples, vous supplier d’user jusqu’au bout de votre auguste prérogative : apaisez la fureur des combats ; que cette vie mortelle soit pour nous un chemin pacifique conduisant aux joies de l’éternité [9].

Bhx cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Ce fut le pape Urbain VIII qui, en 1625, inscrivit cette attrayante figure de reine († 4 juillet 1336) vrai ange de paix, dans le catalogue des saints, et introduisit sa fête dans le Calendrier romain. La messe es du commun. Cependant la première collecte est propre et se rapporte à la grâce spéciale attribuée à la Sainte, de ramener à la concorde les peuples et les princes, alors en lutte entre eux. On sait en effet que la joie éprouvée à l’occasion de la naissance d’Élisabeth détermina, à la cour aragonaise, la réconciliation de son père et de son aïeul ; les historiens remarquent aussi que la mort surprit la bonne reine durant un voyage entrepris afin de rétablir la paix entre son fils et son gendre.

Prière. — « O Seigneur très clément qui, parmi tant d’autres dons splendide ?, avez accordé à la bienheureuse reine Élisabeth la prérogative d’apaiser la fureur de la guerre, par ses prières accordez à nos jours mortels cette paix que nous vous demandons instamment et qui nous conduira ensuite aux joies éternelles ».

La paix est l’harmonie dans l’ordre, c’est pourquoi il ne peut y avoir de paix que dans la juste sujétion de l’homme à Dieu, de la chair à l’esprit, du temporel à l’éternel. Cette harmonie dans l’ordre, c’est la grâce même de Jésus-Christ, qui, après que le péché est détruit, nous réunit à Dieu ut sint unum, comme Lui et son Père sont une identique essence.

Dom Pius Parsch, Le guide dans l’année liturgique

Sainte Élisabeth, mère de la paix et mère de la patrie, obtenez-nous la paix.

1. Sainte Élisabeth. — Jour de mort : 4 juillet 1336. Tombeau : à Coïmbre (Portugal), au monastère des Clarisses. Image : une reine, avec des roses. Vie : une sainte sur le trône ! Élisabeth, reine de Portugal, née en 1271, fut une souveraine sainte, une mère de famille et une, mère du peuple exemplaire ; la grâce particulière que l’on demande par son intercession est le rétablissement de la paix (Or. : « Seigneur qui avez accordé à sainte Élisabeth, avec d’autres faveurs remarquables, l’insigne prérogative d’apaiser les ardeurs belliqueuses »). La prière des Heures rapporte entre autres détails sur sa vie les faits suivants : Dès sa naissance elle fit voir comment elle réussirait plus tard à établir la paix entre les rois et entre les peuples, car sa naissance causa une si grande joie que son père et son grand-père, séparés jusque-là par la discorde, se réconcilièrent... Elle donna sa main au roi Denys de Portugal (1279-1325). Pendant tout le temps de leur union, elle mit tout son zèle à progresser dans la vertu, à élever leurs enfants dans la crainte de Dieu, à plaire à son époux, mais avant tout au Seigneur. Elle jeûnait au pain et à l’eau à peu près la moitié de l’année. Pour échapper aux regards du roi, l’argent qu’elle voulait distribuer aux pauvres se changea en roses au cœur de l’hiver. De même qu’elle avait été jadis, jeune fille, un modèle pour les jeunes filles, épouse, un modèle pour les épouses, ainsi, après la mort du roi Denys, elle fut, dans sa retraite, pour les veuves un modèle de toutes les vertus. Elle assista avec la plus ferme résignation aux funérailles de son époux, revêtue du costume des Clarisses.

2. La Fête. — La messe est du [10]. — La grâce spécialement soulignée dans l’oraison est celle de l’affermissement de la paix. — La prière des Heures met notre sainte en relief par des antiennes propres. « Toi, la gloire de Jérusalem ; toi, la joie d’Israël ; toi, l’honneur de ton peuple ». (Ant. de Bened.). « Élisabeth, mère de la paix et de la patrie, toi qui triomphes au ciel, obtiens-nous la paix ! » (Ant. de Magn.).

[1] Ps. 2, 10.

[2] Urbain VIII.

[3] Urbain VIII.

[4] Deut. 21, 8.

[5] Jud. 15, 10.

[6] Urbain VIII.

[7] Invitat. festi.

[8] I Cor. VII, 31.

[9] Collecta diei.

[10] commun des saintes femmes (Cognóvi)->343