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14/11 St Josaphat, évêque et martyr

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Évêque de Poloskt (Biélorussie) et martyr le 12 novembre 1623. Béatifié par Urbain VIII en 1642, Canonisé par Pie IX en 1867, Léon XIII inscrivit sa fête comme double fête en 1882 à la date du 14 novembre.

Textes de la Messe

die 14 novembris
le 14 novembre
SANCTI IOSAPHAT
SAINT JOSAPHAT
Ep. et Mart.
Evêque et Martyr
III classis (ante CR 1960 : duplex )
IIIème classe (avant 1960 : double)
Ant. ad Introitum.Introït
Gaudeámus omnes in Dómino, diem festum celebrántes sub honóre beáti Iósaphat, de cuius solemnitáte gaudent Angeli et colláudant Fílium Dei.Réjouissons-nous ensemble dans le Seigneur, car la fête que nous célébrons aujourd’hui est celle du bienheureuse Josaphat. Cette solennité réjouit les Anges et tous en chœur louent le Fils de Dieu.
Ps. 32, 1.
Exsultáte, iusti, in Dómino : rectos decet collaudátio.Justes, exultez dans le Seigneur : aux coeurs droits convient sa louange. Alléluia.
V/. Glória Patri.
Oratio.Collecte
Excita, quǽsumus, Dómine, in Ecclésia tua Spíritum, quo replétus beátus Iósaphat Martyr et Póntifex tuus ánimam suam pro óvibus pósuit : ut, eo intercedénte, nos quoque eódem Spíritu moti ac roboráti, ánimam nostram pro frátribus pónere non vereámur. Per Dóminum ... in unitáte eiúsdem.Nous vous en prions, Seigneur, suscitez dans votre Église l’Esprit qui remplissait votre bienheureux Martyr et Pontife Josaphat, et qui le porta à donner sa vie pour ses brebis ; afin qu’étant, par son intercession, animés et fortifiés, nous aussi, de ce même Esprit, nous ne craignions point de sacrifier notre vie pour nos frères.
Léctio Epístolæ beáti Pauli Apóstoli ad Hebrǽos.Lecture de l’Épître de saint Paul Apôtre aux Hébreux.
Hebr. 5, 1-6.
Fratres : Omnis póntifex ex homínibus assúmptus, pro homínibus constitúitur in iis, quæ sunt ad Deum, ut ófferat dona, et sacrifícia pro peccátis : qui condolére possit iis, qui ígnorant et errant : quóniam et ipse circúmdatus est infirmitáte : et proptérea debet, quemádmodum pro pópulo, ita étiam et pro semetípso offérre pro peccátis. Nec quisquam sumit sibi honórem, sed qui vocátur a Deo, tamquam Aaron. Sic et Christus non semetípsum clarificávit, ut Póntifex fíeret : sed qui locútus est ad eum : Fílius meus es tu, ego hódie génui te. Quemádmodum et in álio loco dicit : Tu es sacérdos in ætérnum, secúndum órdinem Melchísedech.Mes frères, tout pontife pris d’entre les hommes est établi pour les hommes en ce qui regarde le culte de Dieu, afin qu’il offre des dons et des sacrifices pour les péchés ; il peut compatir à ceux qui sont dans l’ignorance et dans l’erreur, puisqu’il est lui-même environné de faiblesse, et c’est pour cela qu’il doit offrir, pour lui-même aussi bien que pour le peuple, des sacrifices pour les péchés. Et nul ne s’attribue à lui-même cet honneur ; mais on y est appelé de Dieu, comme Aaron. Et ainsi le Christ ne s’est point arrogé à lui-même la dignité de pontife, mais il l’a reçue de celui qui lui a dit : Tu es mon Fils, je t’ai engendré aujourd’hui. Comme il dit aussi dans un autre endroit : Tu es prêtre pour l’éternité, selon l’ordre de Melchisédech.
Graduale. Ps. 88, 21-23.Graduel
Invéni David servum meum, óleo sancto meo unxi eum : manus enim mea auxiliábitur ei, et bráchium meum confortábit eum. J’ai trouvé David mon serviteur, je l’ai oint de mon huile sainte ; car ma main l’assistera et mon bras le fortifiera.
V/. Nihil profíciet inimícus in eo, et fílius iniquitátis non nocébit ei.V/. L’ennemi n’aura jamais l’avantage sur lui et le fils d’iniquité ne pourra lui nuire.
Allelúia, allelúia. V/. Hic est Sacérdos, quem coronávit Dóminus. Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. C’est le Prêtre que le Seigneur a couronné. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Ioánnem.Lecture du Saint Evangile selon saint Jean.
Ioann. 10, 11-16.
In illo témpore : Dixit Iesus pharisǽis : Ego sum pastor bonus. Bonus pastor ánimam suam dat pro óvibus suis. Mercennárius autem et qui non est pastor, cuius non sunt oves própriæ, videt lupum veniéntem, et dimíttit oves et fugit : et lupus rapit et dispérgit oves : mercennárius autem fugit, quia mercennárius est et non pértinet ad eum de óvibus. Ego sum pastor bonus : et cognósco meas et cognóscunt me meæ. Sicut novit me Pater, et ego agnósco Patrem, et ánimam meam pono pro óvibus meis. Et alias oves hábeo, quæ non sunt ex hoc o vili : et illas opórtet me addúcere, et vocem meam áudient, et fiet unum ovíle et unus pastor.En ce temps-là, Jésus dit aux pharisiens : Je suis le bon pasteur. Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis. Mais le mercenaire, et celui qui n’est point pasteur, à qui les brebis n’appartiennent pas, voit venir le loup, et abandonne les brebis, et s’enfuit ; et le loup ravit et disperse les brebis. Le mercenaire s’enfuit, parce qu’il est mercenaire, et qu’il ne se met point en peine des brebis. Je suis le bon pasteur, et je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis. J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie ; celles-là aussi, il faut que je les amène, et elles écouteront ma voix, et il n’y aura qu’une seule bergerie et qu’un seul pasteur.
Ant. ad Offertorium. Ioann. 15, 13.Offertoire
Maiórem caritátem nemo habet, ut ánimam suam ponat quis pro amícis suis.Personne ne peut avoir un plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis.
SecretaSecrète
Clementíssime Deus, múnera hæc tua benedictióne perfunde, et nos in fide confírma : quam sanctus Iósaphat Martyr et Póntifex tuus, effúso sánguine, asséruit. Per Dóminum.O Dieu très clément, répandez votre bénédiction sur ces dons et confirmez-nous dans la foi que votre Saint Martyr et Pontife Josaphat a affirmée par l’effusion de son sang.
Ant. ad Communionem. Ioann. 10, 14.Communion
Ego sum pastor bonus : et cognósco oves meas et cognóscunt me meæ.Je suis le bon pasteur et je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent.
PostcommunioPostcommunion
Spíritum, Dómine, fortitúdinis hæc nobis tríbuat mensa cæléstis : quæ sancti Iósaphat Mártyris tui atque Pontíficis vitam pro Ecclésiæ honóre iúgiter áluit ad victóriam. Per Dóminum. Que l’Esprit de force nous soit accordé, Seigneur, à cette table céleste où la vie spirituelle de saint Josaphat, votre Martyr et Pontife, s’est toujours alimentée, pour l’honneur de l’Église et pour sa propre victoire.
In Missis votivis extra Tempus Paschale, Omnia dicuntur ut supra, cum Introitu tamen, et post Septuagesimam Tractu Desidérium, ex Missa Státuit, de Communi unius Martyris 1 loco, ut infra :Aux Messes votives en dehors du temps pascal, tout est dit comme ci-dessus sauf l’introït, et après la Septuagésime le trait Desidérium, de la messe Státuit, du commun d’un Martyr 1, comme ci-dessous :
Ant. ad Introitum. Eccli. 45, 30.Introït
Státuit ei Dóminus testaméntum pacis, et príncipem fecit eum : ut sit illi sacerdótii dígnitas in ætérnum.Le Seigneur fit avec lui une alliance de paix et l’établit prince, afin que la dignité sacerdotale lui appartînt toujours.
Ps. 131, 1.
Meménto, Dómine, David : et omnis mansuetúdinis eius.Souvenez-vous, Seigneur, de David et de toute sa douceur.
Tractus. Ps. 20, 3-4.
Desidérium ánimæ eius tribuísti ei : et voluntáte labiórum eius non fraudásti eum.Vous lui avez accordé le désir de son cœur, et vous ne l’avez point frustré de la demande de ses lèvres.
V/. Quóniam prævenísti eum in benedictiónibus dulcédinis.V/. Car vous l’avez prévenu des plus douces bénédictions.
V/. Posuísti in cápite eius corónam de lápide pretióso.V/. Vous avez mis sur sa tête une couronne de pierres précieuses.
Tempore autem paschali : omnia item ut supra, sed cum introitu et allelúia cum suis versibus post epistolam ex Missa Protexísti, de Communi Martyrum 1 loco, ut infra :Pendant le temps pascal, cependant : tout est dit comme ci-dessus mais avec l’introït et l’ allelúia avec ses versets après l’épître de la Messe Protexísti, du commun d’un Martyr 1, comme ci-dessous :
Ant. ad Introitum. Ps. 63, 3.Introït
Protexísti me, Deus, a convéntu malignántium, allelúia : a multitúdine operántium iniquitátem, allelúia, allelúia.Vous m’avez protégé, ô Dieu, contre l’assemblée des méchants, contre la multitude de ceux qui commettent l’iniquité, alléluia, alléluia.
Ps. Ibid., 2.
Exáudi, Deus, oratiónem meam, cum déprecor : a timóre inimíci éripe ánimam meam.Exaucez, ô Dieu, ma prière lorsque je vous implore ; délivrez mon âme de la crainte de l’ennemi.
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 88, 6. Confitebúntur cæli mirabília tua, Dómine : étenim veritátem tuam in ecclésia sanctórum.Allelúia, allelúia. V/. Les cieux publieront vos merveilles, Seigneur, et votre vérité dans l’assemblée des saints.
Allelúia. V/. Ps. 20, 4. Posuísti, Dómine, super caput eius corónam de lápide pretióso. Allelúia.Allelúia. V/. Vous avez mis sur sa tête, Seigneur, une couronne de pierres précieuses. Alléluia.

Office

Leçons des Matines avant 1960

Au deuxième nocturne.

Quatrième leçon. Josaphat Kuncewicz naquit de parents nobles et catholiques, à Vladimir en Volhynie. Étant tout petit enfant, tandis qu’il écoutait sa mère lui parler de la passion du Christ devant une image de Jésus crucifié, un trait, parti du côté du Sauveur, vint le blesser au cœur. Embrasé de l’amour de Dieu, il s’adonna dès lors avec une telle ferveur à l’oraison et à d’autres exercices de piété, qu’il était un modèle et un sujet d’admiration pour les jeunes gens plus âgés que lui. A vingt ans, entrant dans le cloître, il embrassa la vie monastique parmi les religieux de l’Ordre de saint Basile, et fit de merveilleux progrès dans la perfection évangélique. Il marchait nu-pieds, malgré l’excessive rigueur de l’hiver dans ces contrées, ne mangeait jamais de viande, et ne prenait de vin que par obéissance ; jusqu’à la fin de sa vie, un cilice très rude affligea son corps. Josaphat conserva la fleur de sa chasteté, inviolée, qu’il avait, dès l’adolescence, consacrée à la Vierge Mère de Dieu. La renommée de sa science et de ses vertus n’ayant pas tardé à se répandre, on le chargea, quoique très jeune encore, de gouverner le monastère de Bytène ; peu de temps après, il devint Archimandrite de Vilna, et enfin, bien malgré lui, mais sur les instances des Catholiques, fut nommé Archevêque de Polotsk.

Cinquième leçon. Revêtu de cette dignité, Josaphat ne se relâcha en rien du genre de vie qu’il menait auparavant, et eut uniquement à cœur de favoriser le culte divin et d’assurer le salut du troupeau confié à sa vigilance. Énergique défenseur de l’unité et de la vérité catholiques, il travailla de tout son pouvoir à faire rentrer les schismatiques et les hérétiques dans la communion avec la chaire de saint Pierre. Pour ce qui est du souverain Pontife et de la plénitude de son autorité, il ne cessa d’en prendre la défense, contre les calomnies impudentes et les erreurs des impies, soit par des discours, soit par des écrits pleins de piété et de doctrine. Il revendiqua la juridiction épiscopale et les biens de l’église, que des laïques avaient usurpés. On aurait peine à croire combien d’hérétiques ont été ramenés par lui dans le sein maternel de l’Église. Quant à l’union de l’Église grecque avec l’Église latine, les déclarations des souverains Pontifes attestent expressément que Josaphat en a été le plus illustre promoteur. A cette fin, et aussi pour rendre aux édifices sacrés leur magnificence, construire des demeures destinées aux vierges consacrées au Seigneur et soutenir d’autres œuvres pies, il donna spontanément les revenus de sa mense épiscopale. Sa libéralité envers les indigents alia si loin, qu’un jour, ne trouvant plus rien pour soulager la misère d’une pauvre veuve, il fit mettre en gage son homophorion ou manteau épiscopal.

Sixième leçon. Un si grand développement de la foi catholique excita la haine de certains hommes corrompus, au point qu’il se forma un complot, pour attenter à la vie de ce champion du Christ. Dans un sermon à son peuple, le saint annonça lui-même la mort dont il était menacé. Comme il s’était rendu à Vitebsk, dans le but d’y faire la visite pastorale, les conspirateurs envahissent le palais archiépiscopal, frappent et massacrent tous ceux qu’ils y rencontrent. Aussitôt Josaphat, admirable de douceur, s’élance au-devant de ceux qui le cherchent, et leur adressant avec charité la parole : « Mes chers enfants, leur dit-il, pourquoi maltraiter mes serviteurs ? Si c’est à moi que vous en voulez, me voici. » Aussitôt les meurtriers se précipitent sur lui, l’accablent de coups, le percent de leurs armes, jusqu’à ce qu’enfin, l’ayant tué d’un violent coup de hache, ils jettent son cadavre dans le fleuve. C’était le douzième jour de novembre, de l’an mil six cent vingt-trois, Josaphat étant alors dans la quarante-troisième année de son âge. Son corps, entouré d’une merveilleuse lumière, fut retiré du fond du fleuve. Les meurtriers du Martyr furent les premiers à ressentir les effets salutaires de son sang : condamnés presque tous à la peine capitale, ils abjurèrent le schisme et reconnurent l’horreur de leur crime. Le saint Évêque après sa mort, s’étant illustré par de nombreux miracles, le souverain Pontife Urbain VIII lui décerna les honneurs de la béatification. Pie IX, le troisième jour des calendes de juillet, de l’an mil huit cent soixante-sept, à l’occasion des fêtes solennelles célébrées pour honorer le centenaire des princes des Apôtres, devant l’assemblée des Cardinaux, en présence des Patriarches, Métropolitains et Évêques de tous les rites, venus de toutes les parties du monde et réunis au nombre de cinq cents environ dans la basilique Vaticane, le mit solennellement au nombre des Saints, comme étant, parmi les Orientaux, le premier défenseur de l’unité de l’Église. Le souverain Pontife Léon XIII a étendu à l’Église universelle l’Office et la Messe de saint Josaphat.

Au troisième nocturne.

Lecture du saint Évangile selon saint Jean.
En ce temps-là : Jésus dit aux Pharisiens : Moi, je suis le bon pasteur. Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis. Et le reste.

Homélie de saint Jean Chrysostome.

Septième leçon. Elle est grande, mes très chers frères, elle est grande, dis-je, la dignité de prélat dans l’Église, et elle exige beaucoup de sagesse et de force en celui qui en est revêtu ! Notre courage doit, selon l’exemple proposé par Jésus-Christ, être tel que nous donnions notre vie pour nos brebis, que jamais nous ne les abandonnions, et que nous résistions généreusement au loup. Car voici la différence entre le pasteur et le mercenaire : l’un veille à sa propre conservation, sans guère s’inquiéter des brebis ; l’autre veille toujours au salut des brebis, en négligeant même ses propres intérêts. Après avoir donc caractérisé le pasteur, Jésus-Christ signale deux sortes de personnes qui nuisent au troupeau : le voleur, qui tue et ravit les brebis, et le mercenaire, qui laisse faire le voleur, ne défendant pas les brebis confiées à sa garde.

Huitième leçon. C’est là ce qui arrachait autrefois à Ézéchiel ces invectives : « Malheur aux pasteurs d’Israël ! ne se paissaient-ils pas eux-mêmes ? N’est-ce point les troupeaux que les pasteurs font paître ? » Mais eux, ils faisaient le contraire, conduite des plus criminelles, et source de calamités nombreuses. Ainsi, ajoute le Prophète : « Ils ne ramenaient pas (au bercail) la brebis égarée, ne recherchaient pas la brebis perdue, ne bandaient pas la brebis blessée, ne fortifiaient pas la brebis faible ou malade ; soucieux qu’ils étaient, non de paître le troupeau, mais de se paître eux-mêmes. » Saint Paul exprime cette vérité en d’autres termes : « Tous cherchent leurs propres intérêts, et non ceux de Jésus-Christ. »

Neuvième leçon. Le Christ se fait voir bien différent, et du voleur, et du mercenaire ; différent d’abord de ceux qui viennent pour la perte des autres, quand il dit « être venu pour qu’ils aient la vie, et l’aient avec plus d’abondance » ; différent ensuite de ceux dont la négligence permettait aux loups de ravir les brebis ; et il le montre en disant qu’il « donne sa vie pour ses brebis, afin qu’elles ne périssent pas. » En effet, bien que les Juifs cherchassent à le faire mourir, il n’a point, pour cela, cessé de répandre sa doctrine, ni abandonné ses disciples ; mais il est demeuré ferme et il a souffert la mort. Aussi a-t-il répété souvent : « Je suis le bon pasteur. » Comme on ne voyait pas de preuve de ce qu’il avançait, (car cette parole : « Je donne ma vie, » n’eut son accomplissement que peu de temps après, et celle-ci : « Afin qu’elles aient la vie, et qu’elles l’aient très abondamment, » ne devait se réaliser qu’au siècle futur,) que fait-il ? Il confirme l’une assertion par l’autre.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Contemporain de François de Sales et de Vincent de Paul, Josaphat Kuncewiez a l’allure d’un moine grec du XIe siècle, pénitent à la façon d’un ascète de la Thébaïde. Étranger à la culture intellectuelle de l’Occident, il ne connaît que les livres liturgiques et les textes sacrés à l’usage de son église ; prêtre, archimandrite, réformateur de son Ordre basilien, et enfin archevêque, il combat toute sa vie contre les conséquences du schisme de Photius ; et martyr, il cueille enfin dans cette lutte la palme de la victoire. Cependant la scène se passe en pleine Europe, dans des contrées soumises alors à la Pologne catholique, sous le règne du plus pieux de ses rois. Comment expliquer ce mystère ?

« Au lendemain des invasions mongoles, la Pologne reçut dans ses bras bien plus qu’elle ne conquit la nation ruthène, c’est-à-dire les Slaves du rit grec du Dniepr et de la Dina, qui avaient formé autour de Kiev, leur métropole religieuse et leur capitale, le noyau primitif de cette puissance, appelée aujourd’hui la Russie. En faisant participer à sa vie nationale ces frères séparés, mais non pas ennemis de l’unité romaine, qui venaient à elle pleins de confiance dans sa force et dans son équité, la Pologne aurait assuré le triomphe de la cause catholique et sa propre hégémonie dans le monde slave tout entier. L’union au Pontife romain des nouveaux arrivants, qui avec plus d’esprit politique et de zèle religieux, aurait dû être conclue dès le XIVe siècle, ne fut proclamée qu’en 1595.

« Ce fut l’Union de Brest. Par le pacte signé dans cette petite ville de Lituanie, le métropolite de Kiev et les autres évêques grecs, sujets de la Pologne, déclaraient rentrer dans la communion du Saint-Siège apostolique. Chefs spirituels de la moitié de la nation, ils achevaient ainsi la fusion des trois peuples ruthène, lithuanien et polonais, réunis alors sous le sceptre de Sigismond III. Or une réforme religieuse, fût-elle décrétée dans un concile, ne devient une réalité que si des hommes de Dieu, de vrais apôtres et, au besoin, des martyrs apparaissent pour la consommer. Tel fut le rôle de saint Josaphat, l’apôtre et le martyr de l’Union de Brest. Ce qu’il ne fit pas lui-même, ses disciples l’achevèrent. Un siècle de gloire était assuré à la nation, et sa ruine politique en fut de deux cents ans retardée.

« Mais la Pologne laissa dans un état d’infériorité humiliante ce clergé et ce peuple du rit gréco slave, qui s’abritaient dans son sein ; ses politiques n’admirent jamais dans la pratique que des chrétiens du rit grec pussent être de véritables catholiques, égaux à leurs frères latins. Bientôt cependant un duel à mort allait s’engager entre la Moscovie, personnifiant l’influence gréco-slave, et la Pologne latine. On sait comment cette dernière fut vaincue. Les historiens signalent les causes de sa défaite ; mais ils oublient d’ordinaire la principale, celle qui l’a rendue irrémédiable : la destruction presque totale de l’Union de Brest, le retour forcé au schisme de l’immense majorité des Ruthènes ramenés autrefois à l’Église catholique par saint Josaphat. La consommation de cette œuvre néfaste, bien plus que les circonstances politiques et les triomphes militaires, a rendu définitive la victoire de la Russie. La Pologne, réduite à ses neuf ou dix millions de Latins, ne peut plus lutter contre sa rivale d’autrefois, devenue sa rude dominatrice d’aujourd’hui.

« La puissance des Slaves séparés de l’unité catholique grandit chaque jour. De jeunes nations, émancipées du joug musulman, se sont formées dans la presqu’île des Balkans ; la fidélité au rite gréco-slave, dans lequel s’identifiaient pour eux leur nationalité et le christianisme, a été la force unique qui a. empêché ces peuples d’être broyés sous les pieds des escadrons turcs ; victorieux de l’ennemi séculaire, ils ne peuvent oublier d’où leur est venu le salut : la direction morale et religieuse de ces nations ressuscitées appartient à la Russie. Profitant de ces avantages avec une habileté constante et une énergie souveraine, elle développe sans cesse son influence en Orient. Du côté de l’Asie, ses progrès sont plus prodigieux encore. Le tzar qui, à la fin du XVIIIe siècle, commandait seulement à trente millions d’hommes, en gouverne aujourd’hui cent vingt-cinq ; et par la seule progression normale d’une population exceptionnellement féconde, avant un demi-siècle, l’Empire comptera plus de deux cents millions de sujets.

« Pour le malheur de la Russie et de l’Église, cette force est dirigée présentement par d’aveugles préjugés. Non seulement la Russie est séparée de l’unité catholique, mais l’intérêt politique et le souvenir des luttes anciennes lui font croire que sa grandeur est identifiée avec le triomphe de ce qu’elle appelle l’orthodoxie et qui est simplement le schisme photien. Pourtant, toujours dévouée et généreuse, l’Église romaine ouvre les bras pour recevoir sa fille égarée ; et, oubliant les affronts qu’elle en a reçus, elle réclame seulement qu’on la salue du nom de mère. Que ce mot soit prononcé, et tout un douloureux passé sera effacé.

« La Russie catholique, c’est la fin de l’Islam et le triomphe définitif de la Croix sur le Bosphore, sans péril aucun pour l’Europe ; c’est l’empire chrétien d’Orient relevé avec un éclat et une puissance qu’il n’eut jamais ; c’est l’Asie évangélisée, non plus seulement par quelques prêtres pauvres et isolés, mais avec le concours d’une autorité plus forte que celle de Charlemagne. C’est enfin la grande famille slave réconciliée dans l’unité de foi et d’aspirations pour sa propre grandeur. Cette transformation sera le plus grand événement du siècle qui la verra s’accomplir et changera la face du monde.

« De pareilles espérances ont-elles quelque fondement ? Quoi qu’il arrive, saint Josaphat sera toujours le patron et le modèle des futurs apôtres de l’Union en Russie et dans tout le monde gréco-slave. Par sa naissance, son éducation, ses études, toutes les allures de sa piété et toutes les habitudes de sa vie, il ressemblait plus aux moines russes d’aujourd’hui qu’aux prélats latins de son temps. Il voulut toujours la conservation intégrale de l’antique liturgie de son Église, et, jusqu’à son dernier soupir, il la pratiqua avec amour sans altération, sans diminution aucune, telle que les premiers apôtres de la foi chrétienne l’avaient apportée à Kiev de Constantinople. Puissent s’effacer les préjugés, fils de l’ignorance ; et si décrié que soit aujourd’hui son nom en Russie, saint Josaphat sera, aussitôt que connu, aimé et invoqué par les Russes eux-mêmes. « Nos frères gréco-slaves ne peuvent fermer plus longtemps l’oreille aux appels du Pontife suprême. Espérons donc qu’un jour viendra et qu’il n’est pas éloigné, dans lequel la muraille de division s’écroulera pour jamais, et le même chant d’action de grâces retentira à la fois sous le dôme de Saint-Pierre et les coupoles de Kiew et de Saint-Pétersbourg [1]. »

« Daignez, Seigneur, nous écouter et susciter en votre Église l’Esprit dont fut rempli le bienheureux Josaphat, votre Martyr et Pontife [2]. » Ainsi prie aujourd’hui la Mère commune ; et l’Évangile achève de montrer son désir d’obtenir des chefs qui vous ressemblent [3]. Le texte sacré nous parle du faux pasteur qui fuit dès qu’il voit le loup venir ; mais l’Homélie qui l’explique dans l’Office de la nuit flétrit non moins du titre de mercenaire le gardien qui, sans fuir, laisse en silence l’ennemi faire son œuvre à son gré dans la bergerie [4]. O Josaphat, préservez-nous de ces hommes, fléau du troupeau, qui ne songent qu’à se paître eux-mêmes [5]. Puisse le Pasteur divin, votre modèle jusqu’à la fin [6], jusqu’à la mort pour les brebis [7], revivre dans tous ceux qu’il daigne appeler comme Pierre en part d’un plus grand amour [8].

Apôtre de l’unité, secondez les vues du Pontife suprême rappelant au bercail unique ses brebis dispersées [9]. Les Anges qui veillent sur la famille Slave ont applaudi à vos combats : de votre sang devaient germer d’autres héros ; les grâces méritées par son effusion soutiennent toujours l’admirable population des humbles et des pauvres de la Ruthénie, faisant échec au schisme tout-puissant ; tandis que, sur les confins de cette terre des martyrs, renaît l’espérance avec le renouvellement de l’antique Ordre basilien dont vous fûtes la gloire. Puissent-elles ces grâces déborder sur les fils des persécuteurs ; puisse l’apaisement présent préluder au plein épanouissement de la lumière, et les ramener à leur tour vers cette Rome qui a pour eux les promesses du temps comme de l’éternité !

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Presque toutes les vérités de la théologie catholique ont leurs martyrs particuliers : saint Jean Népomucène est le martyr du sceau sacramentel, saint Tarcisius est le martyr de l’Eucharistie, saint Pierre d’Arbuès est le martyr du ministère sacré de l’Inquisition. Il fallait aussi qu’un ruthène, c’est-à-dire un représentant des vénérables églises orientales, scellât de son sang l’antique foi de Byzance catholique relativement à la primauté de Pierre sur toute l’Église. Ce martyr est Josaphat Kuncewicz, archevêque de Polotsk, né en 1580 et massacré par les schismatiques le matin du 12 novembre 1623.

Les mérites de ce Hiéromartyr pour la cause de l’union de l’Église ruthène avec l’Église romaine, sont incroyables. Se souvenant d’abord de l’action puissante de l’ancien monachisme pour tenir allumé parmi le peuple le flambeau de l’orthodoxie, Josaphat, après une enfance très chaste torturée par des pénitences volontaires, prit l’habit monastique et, avec l’aide de Benjamin Rutski, se consacra à la restauration de l’Ordre de Saint-Basile, qui était tombé en décadence.

En 1619, alors que déjà autour de lui s’était constitué un groupe de moines zélés, Josaphat échangea le siège d’archimandrite de Vilna pour le trône archiépiscopal de Polotsk.

Si, comme supérieur régulier, le Saint avait purifié ses moines du moindre ferment de schisme, devenu archevêque il poursuivit l’erreur avec tout le zèle d’une charité ardente et éclairée. A l’exemple d’une vie sainte il ajouta le ministère continuel de la parole divine, des catéchismes, des écrits apologétiques ; aussi ramena-t-il un grand nombre de ces schismatiques au sein de l’unité catholique. Cela suffit pour lui mériter de la part de ses ennemis la couronne du martyre, qu’il subit intrépide et serein à l’âge de quarante-trois ans seulement.

En 1642, Urbain VIII l’inscrivit déjà au catalogue des bienheureux ; et Pie IX, le 29 juin 1867, à l’occasion du centenaire des deux Princes des Apôtres, orna du diadème des Saints cet énergique champion de l’unité catholique dans la primauté de l’Église romaine.

Les ruthènes célèbrent sa fête le 16 septembre.

La messe emprunte l’introït, les deux lectures et la communion à la fête de saint Thomas de Cantorbéry (29 décembre) avec qui notre martyr a tant de points de ressemblance.

Le Seigneur a vraiment couronné même sur la terre son fidèle Pontife. Le martyr a reçu un coup de hache qui lui fendit la tête, mais Dieu voulut que sur ce front ensanglanté le diadème liturgique de la canonisation fût déposé par Pie IX en une circonstance solennelle entre toutes, celle du centenaire des Princes des Apôtres, alors qu’entourait le Pape une foule choisie de cardinaux et d’évêques, venus à Rome de tous les pays du monde, même les plus éloignés.

L’antienne pour l’offertoire se rapporte au martyre enduré par le Saint comme faisant partie de sa charge pastorale (Johan., XV, 13) : « Personne ne montre une plus grande charité que celui qui donne sa vie pour ses amis. »

On donne sa vie pour son troupeau, non seulement en mourant pour lui, mais surtout en vivant pour lui de telle sorte que le temps, les forces, toutes les pensées d’un saint pasteur, soient consacrés au bien spirituel des âmes qui lui sont confiées. C’est en ce sens que l’Apôtre définit l’épiscopat : bonum opus, et que, communément, les docteurs scolastiques l’appellent : status perfectionis acquisitae. Il est certain qu’aucun état n’a jamais donné plus de saints au martyrologe catholique que l’état épiscopal.

Sur les oblations. — « Répandez, Seigneur, votre bénédiction sur ces offrandes, et confirmez-nous dans cette même foi que le bienheureux pontife et martyr Josaphat confessa avec son propre sang. »
La première condition d’une vraie sainteté est une parfaite orthodoxie. Les historiens racontent à ce propos que, durant les premières années de vie religieuse de saint Josaphat, le monastère était gouverné par un métropolite schismatique de sentiments, mais hypocrite, qui évitait toute action capable de le compromettre vis-à-vis des catholiques. Dans le monastère il faisait un grand mal, mais il était difficile de trouver une occasion de briser avec un si perfide supérieur. Josaphat et Rutski devaient donc manœuvrer habilement entre l’obéissance due à l’hégoumène, encore qu’il fût schismatique en son cœur, et leur attachement à l’orthodoxie romaine.

Mais un jour vint où l’archimandrite se trahit lui-même. Il célébrait le divin Sacrifice, et Josaphat l’assistait à titre de diacre. Après la consécration, alors que, durant la litanie de la grande intercession, le célébrant doit faire lui-même la commémoration du Pontife romain, l’archimandrite passa outre. Il n’en fallait pas plus : le saint diacre se retira immédiatement de l’autel et ne voulut plus prendre aucune part à ce sacrifice sacrilège du pasteur schismatique.

Après la Communion. — « Que cette nourriture céleste alimente en nous, Seigneur, l’esprit de force qui, pour la plus grande gloire de l’Église, entraîna à la victoire la vie du bienheureux pontife et martyr Josaphat. »
Le Seigneur nous a confié ici-bas une mission redoutable, que nous devons accomplir au milieu de difficultés de tout genre. Nous nous sentons petits et impuissants. Que faire ? Désespérer ? Jamais. Jésus, grâce à l’Eucharistie, s’est mis tout entier à notre disposition. Plus grande est donc notre insuffisance, plus profondes sont nos lacunes, plus grande aussi est la place que nous laissons à la divine grâce pour combler ces lacunes et pour suppléer à cette insuffisance.

On raconte que, durant les premières années de la réforme monastique qui eut saint Josaphat pour promoteur, Satan déchargeait sa fureur en effrayant les moines lorsqu’ils se levaient la nuit pour les saintes vigiles : le Saint voulut mettre enfin un terme à ces bruits affreux, et une nuit, ayant pris entre ses mains la très sainte Eucharistie, il poursuivit le démon et le chassa hors de l’enceinte du monastère. Le fracas fut terrible, mais à la fin Satan dut se déclarer vaincu, et laisser dès lors les moines célébrer en paix leurs offices nocturnes.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

« Un martyr de l’Unité »

Saint Josaphat. — A l’époque où plus que jamais l’on travaille et l’on prie pour le retour de l’Église orientale séparée à l’unité, il conviendrait d’honorer davantage le grand champion et patron de la réunion de l’Église grecque à Rome. Saint Josaphat Kuncewicz (né vers l’an 1580) était originaire de Volhynie. Il fut moine de l’Ordre de Saint Basile, puis archimandrite de Vilna, enfin archevêque de Polotsk. En cette qualité, il travailla avec un zèle infatigable à la réunion des Églises. Il fut un grand ami des pauvres, à tel point qu’il mit un jour en gage son homophorion (pallium) archiépiscopal pour secourir une pauvre veuve. Les ennemis de l’union résolurent de le mettre à mort. Lui-même prédit dans un sermon sa mort imminente. Saint Josaphat étant venu, au cours d’un voyage de visite pastorale, à Vitebsk (Pologne), ses ennemis attaquèrent à l’improviste sa demeure et commencèrent à faire un grand massacre parmi les gens de sa suite. Le doux serviteur de Dieu se porta en hâte à leur rencontre et leur dit sur un ton plein de charité : « Mes enfants, que faites-vous ? Pourquoi massacrez-vous mes serviteurs et mes amis ? Si c’est à moi que vous en avez, me voici ! » Ils se jetèrent sur lui, le blessèrent et finalement le tuèrent d’un coup d’épée, le 12 novembre 1623. Il avait 43 ans. En 1875, lorsque la Russie supprima le dernier diocèse unit celui de Chelm, ses reliques furent mises en sûreté dans un lieu secret, pour être transférées, au cours de la guerre mondiale (1914-1918), à Vienne, où elles sont honorées aujourd’hui dans l’église des uniates dédiée à Sainte Barbe (on peut voir son corps, couché dans un cercueil de verre, revêtu des ornements épiscopaux et en partie intact.

La Messe (Gaudeamus). — La messe a des rapports voulus avec les textes de la liturgie grecque. C’est ainsi que l’Introït est emprunté à celle-ci et que les deux lectures sont également utilisées à la messe de rite grec d’un martyr pontife. La messe débute avec solennité : « Réjouissons-nous tous dans le Seigneur en ce jour de fête que nous célébrons en l’honneur de saint Josaphat, martyr… » Le leitmotiv de la messe est celui-ci : « Je suis le Bon Pasteur ; je connais les miens... » Nous l’entendons répéter trois fois : à l’Oraison, à l’Évangile et à la Communion. La parabole du Bon Pasteur se réalise doublement à la messe : dans le Christ et en saint Josaphat. Le Christ manifeste dans chaque messe son dévouement de pasteur pour ses brebis ; saint Josaphat est une reproduction et un membre du Christ qui continue sa Passion dans ses martyrs ; la messe célèbre le sacrifice de sa mort. Nous, qui sommes au Saint-Sacrifice mystiquement unis au Christ et aussi à saint Josaphat, nous voulons avoir part à l’amour, à la fidélité et au dévouement des deux Pasteurs. La belle Épître, tout à fait liturgique, tirée de la lettre aux Hébreux produit le plus grand effet. Là le souverain sacerdoce du Christ s’exprime clairement : le Christ, le Grand Prêtre éternel offre son sacrifice sanglant ; ce sacrifice trouve sa continuation à la messe, offerte par le sacerdoce des ministres consacrés de l’Église et par le sacerdoce commun du peuple.

La Liturgie grecque. — L’ami de la liturgie devrait faire connaissance avec la liturgie grecque, qui nous enveloppe de l’atmosphère persistante de l’enthousiasme des premiers chrétiens et de la profonde piété orientale. Celui qui a l’occasion d’assister à une messe du rite grec catholique fera bien de se préparer à l’office liturgique en se procurant une traduction des rites. Il est même permis à tout catholique de recevoir à cette messe la communion sous les deux espèces. On pénétrera très facilement dans l’architecture de la messe grecque si l’on compare la messe romaine connue avec la messe grecque qu’il s’agit d’apprendre à connaître en relevant les ressemblances et les différences. Si nous partons de la messe romaine connue, nous trouvons dans la messe grecque les deux mêmes parties fondamentales : l’avant-messe et le sacrifice. Dans la première, il y a pareillement un office de prière, qui est plus long que celui du rite romain, et un office de lecture composé de deux lectures, l’Épître et l’Évangile. L’avant-messe est précédée d’une assez longue préparation qui n’existe pas dans la liturgie romaine et qui se nomme la prothèse : le prêtre revêt à l’autel les ornements sacerdotaux en récitant certaines prières et prépare la matière du sacrifice (ce qui se fait en partie à notre offertoire). A remarquer encore que le prêtre découpe, tout en s’accompagnant de prières, les hosties dans un grand pain rond et blanc ; il commence par la portion principale qui est marquée d’un sceau ; puis il sépare une quantité de portions plus petites qui sont alors disposées dans un ordre prévu sur le disque (patène) et dédiées à des saints et à des personnes déterminées. — Dans le sacrifice de rite grec, nous pouvons distinguer, comme dans la messe romaine, trois parties essentielles : une sorte d’offertoire, la consécration (nommée anaphore) et la communion. L’offertoire diffère beaucoup de celui de la messe romaine, puisque la préparation des oblats a eu lieu avant la messe et qu’il n’y a pas de procession d’offrande faite par le peuple. Il consiste en une cérémonie de grand apparat, la grande entrée, accompagnée du chant de l’hymne des anges. Le prêtre va chercher les oblats, le pain et le vin, en procession à la prothèse (table où sont préparés les oblats) et les apporte, en traversant les rangs des fidèles, à l’autel où il arrive par la porte centrale. Pendant cette cérémonie, le chœur et le peuple chantent l’hymne des anges : « Nous qui, mystiquement, représentons les Chérubins et chantons à la Trinité vivifiante l’hymne trois fois sainte, déposons toute sollicitude mondaine afin de recevoir le Roi de toutes choses, escorté invisiblement des armées angéliques. Alléluia, Alléluia, Alléluia. » Pendant cette première partie de la messe, on récite aussi le Credo et l’on donne le baiser de paix. La consécration présente aussi une grande ressemblance avec celle de la messe primitive : c’est la grande prière eucharistique avec la consécration, l’anamnèse, l’épiclèse. Puis viennent les commémorai sons qui se partagent chez nous entre les deux Mementos, avant et après la consécration. La troisième partie de la messe, la communion, ne présente pas de différences essentielles avec la nôtre.

[1] Rme D. A. Guépin, Un apôtre de l’union des Egl. au XVIIe siècle, saint Josaphat ; en l’Avant-propos, passim.

[2] Collecte de la fête.

[3] Johan. X, 11-16.

[4] Chrys. in Johan. Homil. LIX.

[5] Ibid.

[6] Johan. XIII, I.

[7] Ibid. X, II.

[8] Ibid. XXI, 15-17.

[9] Ibid. X, 16.